La Stryge de Manhattan (Sous Contrat d'Édition)

Chapitre 1

Je n'avais pas envisagé de passer mon vendredi soir comme ça à l'origine.

J'étais dans un studio sale et miteux, en plein Manhattan, agenouillée au-dessus du cadavre pestilentielle d'une enchanteresse, avec mes coéquipiers. Mon dîner aux chandelles arrosé de champagne avec Michael tombait totalement à l'eau. Mais mon devoir de Venor était d'être là, sur la scène de crime. Faire en sorte que le monde surnaturel reste dissimulé, préserver la paix entre les différents peuples et enquêter sur des crimes aux allures magiques, voilà en quoi consistait le travail d'un Venor. Je passais ma vie entourée de cadavres et de mystères en tout genre, et pourtant, j'avais appris à aimer ma profession. Rétablir la justice, aider la population et rendre fiers les miens, c'était mon quotidien.

- Bryana, que peux-tu me dire sur la victime ?

Les bras croisés, Léodagan, mon chef d'équipe, me fixait de son regard vert émeraude, l'air impassible.

- L'enchanteresse se nomme Alva Uglov et elle est d'origine russe. Elle avait vingt-six ans et vivait seule dans ce petit studio insalubre. Elle travaillait en tant que femme de ménage dans des immeubles huppés de la ville, et bossait le soir dans un fast-food pour arrondir ses fins de mois. Elle était un membre peu actif de la communauté magique. Elle préférait vivre parmi les humains.

Léodagan hocha la tête, ce qui fit légèrement virevolter ses longues bouclettes brun foncé.

- C'était une Vanesc ?

Les Vanesc, comme nous aimions les appeler, étaient des êtres surnaturels qui préféraient taire leur nature magique afin de vivre comme les humains. Ces individus étaient très mal vus au sein de la société surnaturelle. Beaucoup ne comprenaient pas cette nécessité à vouloir faire disparaitre ce qui nous rendait si différents. Mais certains oubliaient aussi que tous ne le faisaient pas par choix, mais par obligation.

- Non. Même si elle était assez isolée de son Cercle, elle continuait toujours à pratiquer la magie avec ses consœurs, quand la Dom, leur chef, les appelait à se rassembler. Morgane a eu sa confirmation de vive-voix au téléphone il y a quelques instants.

- Très bien.

- D'après ses voisins, c'était une jeune fille calme, toujours souriante, et qui aimait aider son prochain, malgré les problèmes et les difficultés qu'elle pouvait rencontrer. La vie ne lui faisait vraiment pas de cadeaux. Elle peinait à sortir de ses problèmes pécuniers, elle était sur le point de se retrouver à la rue, et elle attendait un enfant.

Léodagan se rapprocha consciencieusement de la fenêtre du studio, la lumière de la lune éclairant doucement son teint halé.

- On sait qui est le père ?

- Morgane est en bas, dans le van, et elle effectue des recherches à son sujet, mais pour l'instant on n'en sait pas plus.

- Marvin, que peux-tu déduire de l'état de son corps ?

Ce dernier releva littéralement son nez du corps de la victime et fixa le chef d'un air pensif. Il semblait toujours en pleine réflexion, paressant en perpétuelle recherche de réponses à des questions que seul lui se posait. Il caressa lentement son menton, couvert d'un léger duvet brun, et ses sourcils froncés sous l'effort intellectuel, firent plisser ses yeux bleu azuré.

- Elle n'est pas morte depuis très longtemps, je dirais même que le décès remonte à une heure, voire moins. Il n'y a aucune trace de lutte dans le studio, et pourtant, Alva a de nombreuses blessures sur le corps. On peut voir plusieurs lacérations au niveau des seins et de la gorge notamment. Les griffures ne sont pas très profondes comme vous pouvez le voir. Mais le plus étonnant reste son ventre qui a complètement été déchiqueté, ouvert et vidé ! J'ai rarement vu ça vous savez !