𝗖𝗵𝗮𝗽𝗶𝘁𝗿𝗲 𝟮𝟲.

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Le métal froid du conduit grince sous mes mouvements précipités, mais je n'y prête plus attention. Mes pensées se bousculent, l'instinct de survie dominant tout le reste. Je dois avancer, peu importe la douleur dans mes bras, la poussière qui m'irrite la gorge, ou la brûlure de mes genoux contre la surface rugueuse.

Chaque respiration devient plus difficile, le conduit rétrécissant légèrement. Je me sens comme une proie traquée, coincée dans un labyrinthe dont les murs se referment lentement sur moi. Le rire de cet homme résonne encore dans ma tête, glaçant et cruel. Il prend plaisir à cette chasse, à ce jeu malsain. Je dois le distancer, je dois trouver une sortie.

Le conduit bifurque soudain à droite, me forçant à ralentir. Un frisson glacé parcourt ma colonne vertébrale. Et s'il attendait au bout de ce virage ? S'il connaissait déjà chaque recoin de cet endroit mieux que moi ? Non, je ne peux pas m'arrêter, pas maintenant. Je prends une profonde inspiration et m'engage dans le virage.

Soudain, un léger cliquetis. Un bruit infime, presque imperceptible, mais qui semble tout déchirer dans le silence étouffant du conduit. Mon sang se glace. Il est proche. Trop proche.

Mes pensées se précipitent, cherchant un plan, une solution. Mon esprit fatigué envisage toutes les possibilités : m'arrêter pour l'écouter, continuer à ramper, ou peut-être même trouver un endroit où me cacher ? Mais où me cacher dans ce conduit exigu ? Chaque seconde compte, et l'idée de ralentir, même une fraction de seconde, me terrorise.

Je me force à avancer, mes coudes et genoux hurlant de douleur, chaque mouvement me rapprochant peut-être de la liberté... ou de lui. Mon souffle est saccadé, mais je tente de le maîtriser, de rendre mes mouvements plus silencieux. Si je parviens à rester discrète, peut-être que je pourrais gagner du temps, suffisamment pour trouver une sortie.

Je continue de ramper, sentant enfin l'air devenir un peu plus frais. Le conduit s'élargit, et mes mains touchent le bord d'une grille légèrement desserrée. J'accélère, poussée par l'adrénaline, et donne un dernier coup de pied pour me libérer. La grille cède, et je tombe brusquement dans une pièce, atterrissant avec fracas sur un sol en marbre.

Je me redresse difficilement, ma respiration haletante, et scrute rapidement les alentours. C'est un bureau. Mais pas n'importe lequel. Le luxe se dégage de chaque détail : des étagères remplies de livres anciens, un grand bureau en acajou au centre, et un canapé en cuir qui semble presque trop confortable pour cet endroit de cauchemar.

C'est là que je l'aperçois.

Dans un coin sombre de la pièce, une paire d'yeux brillants me fixe. Une panthère noire. Un bébé, mais déjà assez grand pour être dangereux. Elle émet un grondement bas, ses muscles tendus, prête à attaquer. Mon cœur s'emballe, mais je garde mon calme.

Je sais que si je montre ma peur, c'en est fini de moi. Lentement, je m'accroupis, mes yeux ne quittant pas les siens.

— Doucement, murmuré-je, ma voix douce et apaisante, comme pour calmer une tempête.

La panthère grogne à nouveau, mais cette fois, un doute traverse ses yeux. Je tends ma main, aussi lentement que possible, mes mouvements mesurés. Elle hésite, ses griffes toujours prêtes à frapper. Puis, elle s'approche prudemment, curieuse, comme si elle essayait de comprendre qui je suis.

Mes doigts touchent enfin son pelage. Elle se fige, et un instant, j'ai peur d'avoir fait une erreur. Mais elle ne bouge pas, se laissant doucement apprivoiser. Une tension s'évapore de la pièce. La panthère pousse un petit gémissement, se frottant contre ma main. Elle m'accepte.

Je soupire de soulagement et ferme doucement la porte du bureau derrière moi, prenant soin de la verrouiller pour empêcher quiconque d'entrer.

Je m'effondre sur le canapé en cuir, mes muscles enfin relâchés. Ma gorge est sèche, et mon regard se pose sur un minibar non loin de là. Je me sers un verre rapidement, le liquide frais me brûlant agréablement la gorge. C'est la première fois que je m'accorde un moment de répit depuis... je ne sais même plus combien de temps. Chaque fibre de mon corps me hurle de m'échapper maintenant, mais je sais que je dois reprendre des forces avant de continuer.

Mon regard se tourne vers une fenêtre entrouverte au fond de la pièce. Une échappatoire. Une lueur d'espoir. Mais quelque chose me retient. Ce n'est pas seulement la fatigue. C'est une intuition, une sensation que je ne peux pas encore expliquer.

Je repose mon verre, les pensées s'entrechoquant dans ma tête. Quelque chose cloche. S'il y a une sortie ici, pourquoi serait-elle si facile à atteindre ?

Je me lève lentement du canapé, mon regard fixé sur la fenêtre. Elle semble si proche, si accessible, mais l'ombre d'un doute plane au-dessus de moi. Je m'approche prudemment, mes pas résonnant légèrement sur le sol de marbre. L'air frais qui s'échappe par l'ouverture me donne l'impression d'une promesse, celle d'une liberté que je pourrais presque toucher.

La panthère, désormais calme, s'est allongée dans un coin de la pièce, ses yeux mi-clos, mais je sens qu'elle est toujours en alerte. J'hésite un instant, la fixant. Est-ce qu'elle sait quelque chose que j'ignore ? Pourquoi n'a-t-elle pas tenté de fuir elle-même ?

Je m'approche enfin de la fenêtre. Une légère brise caresse mon visage, emportant avec elle un parfum d'humidité. Je me penche doucement, essayant de voir à l'extérieur. Le vide. Un gouffre noir s'étend sous moi. Pas de toit voisin, pas de corniche sur laquelle poser les pieds. Un saut ici serait synonyme de mort certaine.

Mon cœur se serre. Évidemment. C'était trop beau pour être vrai.

Je me redresse, la frustration montant en moi. Ce bureau est une illusion de liberté, un piège savamment conçu pour me donner l'impression d'avoir une chance. Un frisson glacé parcourt ma colonne vertébrale. Tout ça fait partie de son jeu. Il a dû prévoir chaque mouvement, chaque décision. Je suis encore dans ses griffes.

Je retourne vers le canapé, les pensées tourbillonnant dans ma tête. Je dois trouver une autre sortie, un autre moyen de renverser la situation. Mes doigts effleurent la fourrure soyeuse de la panthère qui me regarde d'un air presque complice. Elle sait que, tout comme elle, je suis une bête traquée. Mais elle est là, libre malgré tout. Elle m'a acceptée, comme si elle reconnaissait une alliée.

Soudain, un bruit sourd à l'extérieur du bureau. Quelqu'un approche.

Je me redresse d'un bond, mon esprit cherchant une solution rapide. Il est trop tôt pour qu'il revienne. Je pensais avoir encore du temps. Mes yeux balaient la pièce. Il y a toujours la porte verrouillée, mais je sais qu'il a les moyens d'entrer s'il le souhaite. La fenêtre est une impasse. Il ne reste qu'une option.

Je me tourne vers la panthère, une idée folle traversant mon esprit. Je ne suis pas seule dans cette pièce. Si je dois me battre, elle pourrait être la clé. Mais comment utiliser cette alliance imprévue à mon avantage ?

Le bruit derrière la porte se fait plus pressant. Mon cœur tambourine dans ma poitrine. Je m'approche de la panthère, accroupie devant elle, cherchant son regard.

— On va devoir s'entraider, murmuré-je.

Elle me fixe, ses yeux noirs brillants d'une intelligence animale. C'est un pari risqué, mais je n'ai pas d'autre choix.

Jeux de pouvoir- tome 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant