Chapitre 19

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Leerian et Mishi avaient marché toute la journée d'hier et une bonne partie d'aujourd'hui. Main dans la main, toujours avec le sourire, en se lançant des blagues ou se remémorant des anecdotes un peu moins drôles. Mais ils éprouvaient du plaisir, car c'était la première fois, depuis leur rencontre avec Danayelle, qu'ils étaient seuls, l'un avec l'autre. C'était rafraichissant.

Ils avaient traversé des plaines, des rivières, des collines. Ils durent faire des détours pour éviter des lutins sauvages, avec la simple intention de ne pas les déranger dans l'une de leurs rave-party. Ils croisèrent plusieurs troupeaux de licornes, et même, à quelques reprises, des pégases ; de magnifiques chevaux ailés, d'une robe souvent plus sombre, entre le gris ou le noir. Mishi était totalement émerveillé ; bien qu'elle eût passé sa vie à Celeyste, elle n'avait encore jamais vu de pégases, qui étaient tout de même assez rares. Ses créatures étaient très timides et avaient tendance à s'envoler dès le premier bruit suspect. Et surtout, lui apprit Leerian d'un chuchotement à l'oreille, elles préféraient les hauteurs, c'était pourquoi elles étaient plus nombreuses à l'ouest de la forêt. Le terrain s'était en effet mis à monter, si doucement que la sirène ne l'avait à peine remarqué. Mais ils s'étaient approchés de la grande chaine de montagnes d'Emyskan, dont un bout traversait la forêt Celeyste.

Il était presque midi quand Leerian s'arrêta pour observer son environnement ; ils n'étaient plus très loin du but, mais il avait besoin de se retrouver. La dernière fois qu'il était venu par ici, il devait avoir... dix ans ? Douze, pas plus. Les arbres avaient grandi, mais leurs branches étaient nues par le froid de l'hiver.

Une main se glissa entre ses doigts, et il la pressa par réflexe.

— Nous ne sommes pas perdus, hein ? demanda Mishi.

— Jusqu'à maintenant, non. J'essaie juste de me souvenir du chemin, à partir d'ici. Mais nous ne sommes vraiment plus très loin.

Mishi lâcha un bref soupir en lançant un regard à la ronde. Le paysage était le même que partout ailleurs dans cette vaste forêt... à un détail près ; le sol était principalement constitué de pierre grise, et non de terre. Ils avaient les pieds sur la montagne. La toute première montagne d'Emyskan, et la seule qui appartenait vraiment à Celeyste.

— Tu es sûr que ton djinn te permet d'être ici ?

— Bien sûr. Nous sommes à Celeyste ! Et puis, vu l'avertissement qu'il m'a fait, je crois que je m'en rendrais compte assez rapidement, quand je mettrais un orteil de l'autre côté de la ligne.

Leerian s'avança un peu dans une direction au hasard et remarqua vite un grand chêne. Il était même franchement immense ; cet arbre devait bien avoir plusieurs centaines d'années, peut-être un millier. Son tronc, si large qu'il aurait fallu au moins cinq trolls se tenant la main pour en faire le tour, était couvert de petit trou, comme s'il avait été malmené par des pics-bois. Mais les trous étaient trop propres pour être l'œuvre d'oiseaux. Il s'agissait en fait de nids de pixies.

Leerian fit un sourire en coin tout en levant un doigt vers l'arbre. Mishi siffla entre ses lèvres en le remarquant.

— Ouah. Il est vachement vieux, celui-là.

— Je me souviens de lui. C'est par ici.

Leerian prit Mishi par la main pour l'entrainer à sa suite, à droite du grand chêne, tout droit vers un amoncellement de branches serrées l'une contre l'autre. Mishi hésita un instant, avant de se laisser guider.

— Nous ne sommes plus très loin. Quelques minutes... quelques secondes...

— Et tu ne me dis toujours pas ce qu'on cherche ?

La légende de Nyirdall, Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant