Les ombres du passé

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Quelques jours après leur échange au parc, Claire se sentait tiraillée entre la douleur de son passé et des sentiments troublants qu'elle n'arrivait pas à comprendre. Elle avait passé les nuits suivantes à repenser à cette rencontre, à ce moment où elle avait partagé son secret avec Émilie, mais une autre vérité, plus dérangeante, commençait à s'imposer dans son esprit.

« Émilie, je... je dois te parler de quelque chose d'important, » commença Claire, le regard fixé sur le sol. Elles étaient assises sur un banc dans le même parc où elles avaient discuté la semaine précédente, l'air frais du matin enveloppant doucement leurs visages. Émilie se tourna vers elle, sa préoccupation visible.

« Qu'est-ce qui ne va pas, Claire ? » demanda-t-elle, attentive. « Tu as l'air préoccupée. »

Claire inspira profondément. « C'est à propos de... de lui. Mon agresseur. » Elle marqua une pause, cherchant les mots justes. « Depuis notre dernière conversation, j'ai essayé de chasser ces pensées, mais... c'est comme si elles prenaient de plus en plus de place dans ma tête. »

Émilie la regarda avec une intensité qui lui était propre. « Que veux-tu dire par là ? »

« Je sais que c'est irrationnel, mais j'ai développé des sentiments pour lui. C'est comme... une partie de moi veut le détester, mais une autre partie... » Elle s'arrêta, mal à l'aise. « Elle se souvient des moments où il a été doux. Je sais que c'est fou, mais je ne peux pas m'en empêcher. »

Le silence qui suivit était lourd. Émilie déglutit, réalisant la complexité de la situation. « Claire... » Elle hésita, puis continua avec soin. « Ce que tu ressens est plus courant qu'on ne le pense. Parfois, les victimes développent un lien avec leurs agresseurs, ce qui peut être très déroutant. Mais ça ne veut pas dire que ce qu'il a fait est acceptable. »

Claire ferma les yeux, luttant contre le tourbillon d'émotions qui l'envahissait. « J'ai l'impression que je ne peux pas contrôler ça. Pourquoi est-ce que je ressens ça ? Comment cela peut-il être possible ? »

« Il peut y avoir plusieurs raisons, » répondit Émilie. « Parfois, c'est une réponse psychologique à un traumatisme. Cela ne diminue en rien la gravité de ce qu'il a fait. Mais... tu ne devrais pas traverser cela seule. Je pense qu'il serait bon d'en parler à un professionnel. »

« Un psy ? » demanda Claire, un frisson de nervosité parcourant son échine. Elle avait toujours eu une certaine réticence à l'idée de consulter un thérapeute, mais en même temps, elle savait qu'elle avait besoin d'aide.

« Oui, » affirma Émilie. « J'en connais un très bien. C'est quelqu'un de compréhensif et de compétent. Il peut t'aider à mettre des mots sur ce que tu ressens et à comprendre ces émotions. »

Claire réfléchit un instant, pesant le pour et le contre. L'idée de parler à quelqu'un lui faisait peur, mais elle savait aussi qu'elle ne pouvait pas continuer à porter ce poids seule. « D'accord, je vais essayer. Mais... est-ce que tu viendras avec moi ? »

Émilie sourit doucement, touchée par la demande de son amie. « Bien sûr, je serai là pour toi. Tu n'as pas à affronter ça toute seule. »

Les jours qui suivirent, Claire se concentra sur l'idée de prendre ce rendez-vous. Elle savait que cela serait difficile, mais elle se sentait déterminée. Un matin, elle prit son téléphone et chercha le numéro du psy qu'Émilie lui avait recommandé. En quelques clics, elle avait son contact et, hésitante mais résolue, elle composa le numéro.

« Bonjour, ici le cabinet de Dr Léonard, comment puis-je vous aider ? » répondit une voix apaisante au bout du fil.

« Bonjour, je... je souhaiterais prendre rendez-vous avec le Dr Léonard, s'il vous plaît, » balbutia Claire. Elle avait l'impression que son cœur battait la chamade, une anxiété mêlée d'espoir.