Manche 1, épreuve Citrouille : écrivez une histoire d'horreur entre 500 et 600 mots inspirée d'une phobie.
TW : scotophobie ( peur d'être observée )
Ceci est tiré d'une histoire vraie.
Lundi 28 octobre 2024 :
J'observe Eve chaque jour depuis ses 15 ans. Je la regarde. Certains diront que je l'épie, moi je préfère le terme « contempler », car c'est celui que l'on utilise pour parler d'une œuvre d'art.
Eve me plaît un peu, beaucoup, à la folie. Elle est grande, très grosse, elle a d'immenses lunettes rondes qui lui mangent le visage et j'adore ça.
Parfois, je la suis jusqu'à chez elle et je la photographie, caché derrière un buisson. Des photos d'Eve, j'en ai à la pelle : Eve qui mange, qui boit, qui chie, qui se douche, Eve qui cuisine ou qui lit.
Eve.
Croyez-moi, je me fous de ressembler au cliché du voyeur pervers, parce que les jours où elle se déshabille en oubliant de fermer les rideaux de sa chambre sont les plus beaux de ma vie.
Je ne me montre pas. Eve ne me comprendrait pas. Ce n'est pas grave.
Quelquefois, elle tourne la tête, cherche du regard d'où vient la présence qu'elle sent peser sur ses épaules. Mais elle ne me voit jamais.
Eve n'a pas compris que l'œil adorateur qui la fait frémir provient des toutes petites caméras que j'ai réussi à installer dans sa maison.Mardi 29 octobre 2024 :
Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve. Eve.
Eve.
Eve.
Eve.Mercredi 30 octobre 2024 :
Je suis très heureux.
Elle prenait sa douche et moi je la regardais, confortablement installé dans mon canapé, une boîte de mouchoirs à portée de main. Soudain, elle s'est figée et a coupé l'eau. Et alors, elle a commencé à beaucoup parler, beaucoup. Elle a dit : « Je ne sais pas si je suis folle, je ne sais pas, mais je... Je me sens observée, tout le temps. »
Puis elle a respiré un grand coup :
« Il y a quelqu'un ? »
Je n'ai rien répondu. Je ne m'appelle pas quelqu'un. Elle ne pouvait pas savoir, la pauvre. Ce n'est pas grave.
Eve est restée quelques secondes silencieuse, puis elle a ri nerveusement, et elle a rallumé l'eau.
Je ne suis pas sûr, mais je crois qu'elle veut me rencontrer.
Eve...
Elle est ma princesse et ses désirs sont aussi les miens. Elle veut me voir, soit.
Eve me verra.Jeudi 31 octobre 2024 :
Je suis caché derrière les rideaux. J'ai décidé de lui faire une surprise. Après l'avoir entendue, je suis sûr qu'elle m'aimera, elle aussi. Devant moi sont étalées toutes les photos que j'ai prises, et les cadavres des caméras gisent sur le tapis. Ce sont des cadeaux.
J'entends la clé dans la serrure. Salaud de cœur, vas-tu te taire ?! Il ne faut pas qu'elle m'entende.
La voilà qui entre. Qui s'avance.- C'est quoi ce... Oh putain !!
Ok, stop. J'ai besoin d'une pause.
Un peu perturbée, je verse du lait dans mon café brûlant, lorsqu'un frisson glacé me parcourt brusquement.
J'ai l'impression qu'on me regarde.- Il y a quelqu'un ?
Pas de réponse.
- Tu es ridicule, ma fille, me sermonnais-je à voix basse avec un petit rire nerveux. Qu'est-ce qui te prend d'écrire des histoires d'horreur le soir d'Halloween, franchement ?
Je me tourne, pose ma bouteille de lait, quand soudain,
je hurle.
Là.
Dans les buissons, protégé par la nuit ou par le Diable, il y a un homme qui m'observe.