Les Mondes d'Olympia

Chapitre 1

Sombrant dans l'inconscience, impuissante je laisse défiler ma vie. Du haut de mes quarante ans, j'ai construit une vie à mon image. Et je n'ai aucun doute sur le fait que mon mariage avec Jérôme fut la plus belle chose qui me soit arrivé. Il est doux, drôle, patient, intelligent, passionnant, aimant... Mieux que tout ce que j'aurais pu rêver. Je pense à mes trois enfants, mes trois trésors, mon aîné de 15 ans nommée Hélène, mon second de treize ans nommé Charles, et ma dernière, qui venait d'avoir dix ans nommée Alice. Nous étions une belle famille unis. À l'instar de celle que j'ai formé avec mes parents et ma sœur, bien que celle-ci ne fut pas toujours là de la manière que je souhaitais. La famille était donc pour moi ce qui était le plus important.

Bien sûr j'ai des amis, bien que se soit pour la plupart des collègues. Mais c'est pour ça que je les ai choisi pour travailler dans mon entreprise, parce que je peux avoir confiance en eux, et que je sais qu'ils sont extrêmement compétent. J'ai toujours séparé très clairement amitié et famille. Je n'ai rien à voir avec ces héros de film prêt à tout sacrifier pour leurs amis, loin de là. Moi je suis de ceux qui pourrait tout abandonner pour ma famille, juste pour ma famille. Et jamais par un ami je n'avais cherché à compenser ce que je croyais être l'absence de ma sœur bien plus âgé. J'avais fini par comprendre avec le temps que celle-ci avait toujours été là, à sa façon.

J'avais comme croyance qu'il n'y avait jamais d'embûches sur la rivière de la vie, tout au plus des courbes et des remous, et que quand on se croit perdu, il suffit de remonter à la surface et de se détacher des lourdes chaînes de la dépendance au matériel. Parce qu'à mes yeux, la vie ne se résume pas à ça. Parce qu'il y a longtemps déjà que j'ai abandonné le poids de l'argent. Parce que je pense que tout est à portée de main, il suffit de le saisir. Il n'y avait plus que dans ma vie de la place pour le bonheur.

Dans ma jeunesse, j'avais beaucoup fait de théâtre, et j'avais développé un certain talent qui m'avais ensuite servi dans mon entreprise dans la diplomatie. J'étais, depuis ma plus petite enfance, extrêmement doué dans ce domaine, surtout dans ce qui était de l'impassibilité,  j'avais monté ma propre académie sur l'esprit et la diplomatie. Cette école était devenue à présent très prestigieuse. Notamment grâce à l'aide de ma marraine. Ah ma marraine... Quelqu'un d'exceptionnel ! Elle avait toujours été là pour moi, elle m'avait toujours soutenu ! Chacun de ses moments d'absence n'en avait pas été un. C'était une personne silencieuse et d'une présence très forte et charismatique. Elle n'usait de sa parole que pour dire des choses pertinentes, et passait des heures à élaborer des phrases mystiques pleine de sagesse. Autrefois, elle avait été une très grande diplomate très prisée. Aujourd'hui elle travaillait dans mon académie, notre académie. Un lien de confiance très puissant s'était installé entre nous, il suffisait de la présence de l'une pour apaiser l'autre, pour se retrouver dans un état d'âme en paix. Ensemble on avait choisi chacun des professeurs. Ensemble, nous avions toujours été ensemble...

C'était une fin de journée comme les autres, et je m'apprêtais à rentrer chez moi. J'adressa un sourire comme au revoir à Maria-Line, une jeune élève très prometteuse qui restait toujours des heures étudier dans la bibliothèque après les cours. Celle-ci me répondit par un geste de la main mal-assuré. Une élève prometteuse et timide, étrange combinaison.
- À demain madame.
- Anne, pas madame.
- Oui, Anne...

Je savoura du regard les jolies maisons alignées repeintes fraîchement, le trottoir de pierre sale et humide, les gens marchant dans la rue. Au loin, j'aperçus la petite forêt qui dissimulait ma maison.

À peine arrivée à l'orée du bois, je ferma les yeux pour sentir le vent dans mes cheveux, l'odeur du pin et des bruyères, la chaleur du soleil... Mais je ne senti rien. J'ouvris précipitamment les yeux.