la maison au fenêtre fermée

de retour au village

La nuit tombe sur le petit village de Cold Hollow, niché au cœur de la forêt dense. À l’entrée du village se dresse une vieille demeure, ses murs couverts de lierre, ses volets fermés depuis des décennies. Les habitants racontent que personne n’y a habité depuis des années, que les fenêtres ne s’ouvrent jamais, même lors des tempêtes les plus violentes. Mais ils disent aussi que parfois, la nuit, on peut voir une lueur filtrer à travers les planches clouées, comme si quelqu’un, ou quelque chose, se promenait à l’intérieur.

Lina, une jeune femme de vingt-six ans, revient à Cold Hollow après des années d’absence. Sa tante, la seule famille qui lui restait, est morte récemment, laissant derrière elle une lettre étrange. « Lina, la maison des Ashford te revient. Mais ne cherche pas à ouvrir les fenêtres. Ne cherche jamais à savoir ce qui se cache derrière. »

Lina se tient maintenant devant la maison, ses clés en main. Elle n’a pas remis les pieds ici depuis son enfance, mais la curiosité la pousse à entrer. La porte grince en s’ouvrant, révélant un hall poussiéreux et sombre. Tout est figé dans le temps : les meubles recouverts de draps, l’air chargé de moisi, et ce silence, lourd et pesant, qui s’attarde dans chaque pièce.

Elle s'installe dans la chambre de son enfance, mais le sentiment que quelque chose cloche ne la quitte pas. Les volets, cloués de l'intérieur, bloquent la moindre lueur extérieure, plongeant la maison dans une obscurité perpétuelle. La nuit venue, elle allume une bougie pour s’éclairer, mais les ombres qui dansent sur les murs semblent trop vivantes, trop mouvantes.

La Première Nuit

Alors que Lina s’apprête à s’endormir, un léger bruit attire son attention. Un chuchotement, presque imperceptible, semble venir du couloir. Elle tend l’oreille, le cœur battant plus fort. « Lina… viens voir… »

Elle sursaute, le souffle coupé. Cette voix, elle la reconnaît. C’est celle de sa tante. Mais sa tante est morte, enterrée dans le cimetière au bout du village. Malgré la peur qui serre sa gorge, une force irrésistible la pousse à sortir de son lit et à suivre le murmure. Elle descend l’escalier, sa bougie vacillant entre ses doigts tremblants, jusqu’à atteindre le salon. Le murmure s’amplifie, mais semble provenir de derrière les volets fermés.

Elle s’approche de l’une des fenêtres, où la lumière de la lune tente en vain de percer à travers les planches de bois. L’envie de soulever les planches, de regarder ce qui se cache derrière, devient presque insupportable. Sa tante lui a interdit de le faire, mais la voix continue de l’appeler.

Elle tend la main, prête à retirer l’une des planches clouées. Mais au moment où ses doigts touchent le bois, une brise glaciale souffle à travers la pièce, éteignant la bougie. Le chuchotement cesse, et un silence mortel tombe sur la maison.

Le Secret Dévoilé

Le lendemain, Lina se réveille dans le salon, glacée jusqu’aux os. La maison est de nouveau silencieuse, mais quelque chose a changé. Elle remarque un vieux journal posé sur la table, un journal qu’elle n’avait jamais vu avant. La couverture est usée, et les pages jaunies. En l’ouvrant, elle découvre des écrits de sa tante.

« La maison veille sur nous, Lina. Tant que les fenêtres restent fermées, elle nous protège. Mais si quelqu’un les ouvre, ce qui est dehors viendra pour nous. »

Chaque page raconte l’histoire des Ashford et de la malédiction qui pèse sur la maison. Il y a cent ans, la famille Ashford avait découvert que les fenêtres de la maison étaient un portail vers une autre dimension, un endroit où des ombres intelligentes attendaient de pouvoir traverser. Pour les contenir, les fenêtres avaient été scellées. Sa tante avait pris soin de cette maison pendant des années, veillant à ce que les volets restent fermés. Mais maintenant, c'était à Lina de poursuivre cette mission.

La Nuit de la Terreur

Cette nuit-là, Lina entend à nouveau les chuchotements, plus insistants, plus pressants. Les voix ne se contentent plus de murmurer son nom ; elles crient, frappent contre les volets. La maison tremble sous la pression, et Lina comprend que les ombres cherchent à entrer.

Elle monte dans le grenier, où se trouve la dernière fenêtre scellée, celle qui donne directement sur la forêt. Les voix se pressent contre elle, la suppliant de les libérer. « Nous voulons rentrer, Lina… ouvre la fenêtre, et nous serons libres... »

Au lieu de céder à la peur, elle saisit un vieux marteau rouillé et commence à clouer à nouveau les planches, une à une. Les voix hurlent de rage, le bois grince, mais elle persévère. Chaque coup de marteau semble affaiblir les ombres, jusqu’à ce qu’un dernier coup fasse taire les murmures pour de bon.

Essoufflée, les bras tremblants, elle descend les escaliers et retourne au salon. La maison est de nouveau calme, et la sensation de froid a disparu. Mais sur le sol, là où la lumière de la lune filtre à travers une fente dans les volets, elle distingue une ombre qui ne bouge pas, une silhouette humaine.

Le Visage dans l'Ombre

Lina s’approche, son cœur battant à tout rompre. L’ombre reste immobile, mais elle y distingue des contours familiers, ceux de sa tante. Une larme roule sur sa joue alors qu’elle comprend la vérité : sa tante n’a jamais vraiment quitté la maison. Elle était piégée entre les dimensions, entre la lumière et les ombres.

« Merci, » murmure l’ombre, sa voix éthérée flottant dans l’air. « Continue de protéger la maison, Lina. Ne laisse jamais les fenêtres s’ouvrir. »

Puis la silhouette s’efface, se fondant dans la lumière de la lune. Lina, les mains encore tachées de poussière, s’assoit sur le canapé du salon, éreintée mais déterminée. Elle comprend maintenant que son destin est lié à cette maison, à ses secrets et à ses ombres. Elle devra veiller sur elle, coûte que coûte.

La nuit passe lentement, et à l’aube, une nouvelle lueur éclaire la vieille demeure. Lina sait qu'elle devra rester vigilante, car les ombres attendront toujours, patiemment, derrière les fenêtres fermées.