II.10

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Le matin suivant, Jimin se tenait face à son reflet dans le grand miroir, une surface froide mais révélatrice. Aujourd'hui, il avait décidé d'affronter un défi à la fois audacieux et périlleux. Avec une douce résolution, il utilisa sa voix contre lui-même :

"J'ai entendu dire que tu te sentais beaucoup plus heureux aujourd'hui." Ces mots s'échappèrent de ses lèvres comme une brume légère, des ondes délicates se mêlant à son image, cherchant à atteindre son cœur.

Une vague de chaleur l'enveloppa, une caresse fugace qui disparut comme un souffle au vent, le laissant dans un abîme de vide.

"Pourquoi ça ne fonctionne-t-il pas avec moi ?" se lamenta-t-il, son cœur lourd de désespoir.

Les effets de son don - de cette magie qui pouvait ravir les autres - semblaient l'exclure, le condamnant à porter seul ses douleurs. Désormais, l'unique moyen pour lui de se décharger des émotions négatives était la musique. Il quitta hâtivement sa chambre, sa décision affirmée. Le premier acte de son cœur, celui d'un jeune homme en quête de liberté.

Il se dirigea vers la salle de musique, conscient que son cœur battant allait bientôt manquer le début de son cours de littérature. Peu importait si leur mère serait mécontente ; il devait se libérer. Après avoir revêtu des vêtements chauds, il saisit son précieux violon et s'élança vers la sortie du manoir. En chemin, les domestiques le saluèrent avec respect, des visages familiers dans cette maison qui l'étouffait parfois.

Une fois dehors, le froid hivernal le frappa de plein fouet, mais il ignora la morsure du temps. Son esprit était occupé par la recherche d'un havre de paix. Il s'enfonça dans le jardin, traversant le pont au-dessus de la petite rivière qui murmurait des secrets. Il marcha pendant plusieurs minutes, puis se retrouva devant le labyrinthe de haies qu'il connaissait si bien. L'entrée apparut comme une promesse de solitude et de réconfort.

Là, il s'engouffra, se sentant le roi d'un monde secret. Il prit à gauche, puis tout droit, encore à droite, et finalement à gauche, débouchant sur une petite tour en pierre. D'un geste habile, il déverrouilla la porte et entra dans ce lieu hors du temps.

À l'intérieur, il trouva une petite trappe au sol, qu'il ouvrit sans hésitation. Descendant dans l'obscurité, il alluma une ampoule qui éclaira le refuge, révélant une pièce quasi vide, à l'exception d'une chaise maladroite. Lorsqu'il s'y installa, le monde extérieur devint une chimère, encapsulé par l'écho de ses pensées.

Saisissant son violon, Jimin sentait une tension électrique monter en lui, créant une connexion entre son âme et l'instrument. Ses doigts se crispèrent sur le bois lisse comme s'il cherchait à en extirper toute la douleur accumulée. Puis, avec un mouvement ample de l'archet, il laissa s'échapper un flot de notes déchirantes, des vibrations sombres et tourmentées qui résonnaient dans l'espace autour de lui.

Les premières ondes sonores s'élevèrent en vagues concentriques, balayant l'air ambiant comme des ondulations à la surface d'un étang troublé. Jimin pouvait presque voir ces sons onduler, toucher chaque recoin de la pièce. Le choix de ce refuge ne venait pas du hasard ; il savait qu'une fois libéré, ses mélodies pouvaient toucher ceux qui l'entouraient. Quand il se libérait de sa désolation accumulée, ceux qui avaient le malheur d'entendre sa musique étaient pour beaucoup condamnés souffrir parfois jusqu'à se donner ma mort. Ici, il était à l'abri des conséquences.

Chaque note jouée était un cri, une prière, une libération de ses émotions lourdes. Les infortunes des autres se reflétaient dans son jeu ; certains pouvaient se sentir mal, tandis que d'autres seraient submergés par une mélancolie profonde. Jimin savait que, pour les plus fragiles, il pouvait être dangereux. Cela le poussa encore davantage à éloigner sa musique des oreilles curieuses.

𝘿𝙚𝙨𝙘𝙚𝙣𝙙𝙖𝙣𝙩𝙨ᵗᵃᵉᵏᵒᵒᵏ ❤️🖤Où les histoires vivent. Découvrez maintenant