Chapitre 1

23 3 0
                                    


                           Prolongation


"Je suis fatiguée, fatiguée de ce silence, de cette peur qui nous ronge depuis que maman est partie. Fatiguée de voir chacun d'entre nous souffrir en silence, sans réponse, sans vérité," déclara-t-elle d'une voix forte, pleine de colère et de défi. "Papa, je te le dis ici devant tout le monde : je vais retrouver maman. Je vais découvrir ce qui lui est arrivé. Et peu importe ce que je vais devoir faire pour y arriver."

La salle était figée, et tout le monde écoutait avec des visages déconcertés. Mais Ndeye Amy n'en avait pas fini.

"Je suis désolée, mais tu ne pourras pas m'arrêter," dit-elle en fixant son père, sa voix empreinte de défi. "Je ferai tout ce qu'il faut. Peut-être que tu as fait taire maman, mais moi, je ne me tairai pas !"

Cette fois, l'audace de Ndeye Amy dépassa les limites. Seydou Diop, dont le visage devint rouge de colère, se leva brusquement et, avant que quiconque n'ait pu réagir, gifla violemment sa fille, lui coupant la parole.

"Je n'ai pas permis ça dans ma maison !" s'écria Seydou. "Tu as perdu tout respect, Ndeye Amy ! Je t'ai donné tout ce dont tu as besoin, mais tu n'es qu'une ingrate !"

Mariéme Soda, sa sœur jumelle, se leva et s'approcha de Ndeye Amy avec une expression de tristesse et de compassion.

"Ndeye Amy, calme-toi," murmura-t-elle, tentant de la raisonner. "Papa est strict, mais il reste notre père. Tu lui dois du respect. Nous tous, nous devons l'écouter..."

Mais Ndeye Amy secoua la tête, furieuse. "Mariéme, tu ne comprends rien ! Papa nous a menti toute notre vie ! Comment peux-tu encore le défendre après tout ça ?"

Mansour, le frère aîné, qui avait toujours ressenti un mélange d'amour et de ressentiment envers Seydou, se leva pour la soutenir.

"Ndeye Amy a raison," dit-il avec une fermeté qui surprit l'assemblée. "Depuis que maman a disparu, c'est comme si tout le monde faisait semblant. Personne ne veut en parler, personne ne veut affronter la vérité. Peut-être qu'il est temps que cela change."

Seynabou Diop, la demi-sœur de Seydou, intervint alors, cherchant à calmer les esprits.

"Mansour, Ndeye Amy, je comprends votre douleur. Mais ce n'est pas le moment de..."

"Non, Tata Seynabou !" la coupa Ndeye Amy. "Vous avez peut-être choisi de fermer les yeux, mais moi, je refuse de rester dans cette ignorance. Vous pouvez tous continuer votre petit jeu, mais moi, je veux la vérité."

Le regard de Ndeye Amy parcourut la salle une dernière fois, et sans dire un mot de plus, elle tourna les talons, quittant la pièce avec une détermination glaciale. Elle claqua la porte derrière elle, le bruit résonnant dans toute la maison comme un coup de tonnerre.

~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~


La famille Diop était une dynastie en elle-même, un nom qui inspirait respect et crainte. Au cœur de cette famille se tenait Seydou Diop, un homme rigide, forgé par l'ambition et les responsabilités. Depuis la mort de son père, Seydou portait sur ses épaules le poids de l'entreprise familiale, un empire bâti sur des décennies de travail acharné. Héritier principal avec sa demi-sœur, Seynabou Diop, Seydou avait longtemps veillé sur l'entreprise et la fortune familiale avec une vigilance presque obsessionnelle.

Pourtant, des fissures avaient commencé à apparaître dans cet édifice familial. Seydou doutait de son propre fils aîné, Mansour, à qui les responsabilités semblaient glisser des doigts. Cet aîné, pourtant si prometteur dans sa jeunesse, n'avait pas, aux yeux de son père, l'étoffe d'un dirigeant. En revanche, son deuxième fils, Abdou Karim, était l'héritier idéal pour Seydou. Il l'avait façonné à son image, inculquant en lui des valeurs de discipline et de rigueur. À ses côtés, les jumelles, Mariéme Soda et Ndeye Amy, représentaient un mystère pour leur père. Bien qu'il les ait élevées avec amour, il les voyait comme des figures secondaires, éclipsées par les enjeux de l'entreprise.

Les héritiers de l'ombre Où les histoires vivent. Découvrez maintenant