Partie 2

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Elle n'était plus la même femme depuis qu'on lui avait annoncé qu'elle ne pourrait plus avoir d'enfant.

Sa troisième fausse couche avait été horrible pour elle, à son septième mois de grossesse, cette fois-ci elle était persuadée que Félix verrait le jour. Lors des échographies, aucune malformation n'était apparue et son petit cœur semblait battre à merveille.

Chaque soir quand elle se couchait, elle déposait ses mains sur son ventre et caressait son enfant, l'enjoignait de bien grandir, de prendre le temps d'être beau, grand et fort, en pleine santé pour rejoindre ses parents.

Elle avait beaucoup lu sur cette période si importante qu'est la grossesse et les différentes théories sur la réceptivité des enfants aux émotions des parents.

Ils avaient fait, elle et lui, tout pour Félix : cours de préparation à l'accouchement, sophrologie, haptonomie.

On lui avait même lors de son cinquième mois dit d'arrêter de travailler.

Claire était très jolie, de longs cheveux blond, mais un peu trop ondulé à son goût, de grandes jambes et des formes que beaucoup de femmes lui enviaient. On lui enviait aussi son compagnon William et l'amour mutuel et sincère qu'il se portait. Quand elle annonce à son travail, qu'ils avaient décidé avec son conjoint, qu'elle cesserait de travailler pour son bien et celui de son enfant, certains eurent un sourire méchant, mais qui ne s'affichait que quand elle avait le dos tourné.

Elle avait récupéré toutes ses affaires et salué tous ses camarades de travail et pensait déjà le superbe week-end que Willam avait prévu pour elle.

Elle venait de dépasser le dernier kilomètre qui la séparait de son domicile quand un chauffard lui refusa la priorité.

Le choc fut très violent. La voiture la percuta latéralement et la tôle froissée de la portière vint lui rentrer dans la chair. Le pare-brise qui éclata instantanément lui déchira le visage, la ceinture lui brisa trois côtes et son ventre s'écrasa contre le volant, car l'airbag ne se déclencha pas.

Quand elle se réveilla dans son lit d'hôpital, Willem lui tenant la main, elle sut immédiatement et ne put l'accepter.

Elle détourna le regard, sa rage était si grande qu'elle ne put y faire face. Elle se rendormit et entra dans le coma durant deux semaines.

Lors de son deuxième réveil, elle n'était plus la même femme.

Elle était froide, et distante avec William, elle refusa de lui parler de l'accident, refusa toute l'aide qu'on lui conseillait.

Elle n'alla voir aucun psychiatre, aucun psychologue, ne sollicita aucune aide et garda sa rancœur gelée avec le reste de ses sentiments.

Le soir quand ils se couchaient et que William passait délicatement sa main sur le dos de Claire, il ressentait ce froid et cette distance infinie qui semblait maintenant les séparer. Dans un frisson, il retirait sa main et se tournait de son côté se sentant de plus en plus seul dans son couple, dans son lit, dans sa vie, dans sa tête.

Par le froid, elle s'éloignait de lui.

Arriva le moment où ils se séparèrent, on ne pas pas dire que cela fut difficile sur le plan matériel, car, elle ne demanda rien. Cela fut brutal pour Willam, brutal et définitif. Aussi belle et enviable fut leur histoire à son début, aussi horrible quand un chauffard vint la faire voler en éclat.

Elle ne retourna plus travailler, loua une sordide chambre meublée et n'en sortit plus jusqu'à ce que tout lui apparaisse clairement et que sa décision soit totale.

Deux ans passèrent, mais le froid qui l'habitait fit que sa détermination resta contente. Elle avait vécu recluse et coupée du monde ne subsistant qu'avec des aides sociales. Le jour où le chauffard sortit de prison fut le premier depuis bien longtemps ou un sourire s'imprima sur ses lèvres. Elle avait réussi à savoir quand est-ce qu'il serait libéré.

Elle prit sa voiture et suivit de près le taxi qui amena le chauffard de la prison à son domicile sans se faire remarquer. Quand le véhicule s'arrêtera devant une vieille maison, elle était à une distance raisonnable et de toute façon il ne la reconnaîtrait certainement pas, même si elle se tenait face à lui.

Elle attendit que le taxi parte, elle vit une femme et deux filles sortir sur le porche pour accueillir l'homme. C'est au moment où il était encore sur le trottoir avec sa valise qu'elle écrasa la pédale d'accélération à son maximum.

Une immense sensation de liberté la submergea quand le corps de l'homme vient s'écraser sur son pare-brise et y laisser de grosses traces de sang avant de passer sur le toit pour retomber violemment sur la chaussée. Elle s'arrêta un bref instant sans prêter attention à ce qui se passait autour d'elle. La femme horrifiée sur le seuil hurlait et cachait de ses mains les yeux des deux fillettes dans un réflexe instinctif de protection.Elle enclencha la marche arrière et roula sur le corps à deux reprises, pour être sûre que cette ordure soit morte, avant de prendre la fuite.

Elle gara son véhicule dans une rue étroite du centre-ville et marcha jusqu'à ce que la nuit tombe.

Elle avait suffisamment d'argent sur elle pour se payer une nuit d'hôtel dans un établissement sans prétention.

Elle entra dans la chambre et se fit couler un bain. Pour la première fois depuis longtemps, elle se sentit redevenir faible, elle repensa à l'accident, à sa séparation, et commença à pleurer. Alors elle sortit de la baignoire, passa sous la douche qu'elle fit couler glacée sur sa peau, jusqu'à ce que sa peau devienne violette. Elle voulait s'anesthésier.

Elle s'habilla et se rendit dans le premier bar qu'elle croisa dans la rue, il était sordide et triste à souhait. Cela lui conviendrait parfaitement. Elle avait à la fois soif de sexe et d'alcool. Elle entra et s'assit au bar, commanda une double vodka sans glace et puis d'autres jusqu'à ce que son ivresse lui fît paraître beaux et suffisamment désirable ces solitaires piliers de bar à l'haleine forte d'alcool et de tabac.

Un homme s'approcha d'elle, son odeur était très forte et écœurante, derrière son ivresse c'est sa tristesse qui la poussa à suivre cet homme jusqu'à sa voiture.

Elle ne fit pas cas de la route qu'il prenait, elle se laissa porter par cet homme qu'elle ne connaissait pas.

Il gara la voiture dans un champ loin de toute lumière, seule la lune à un quart pleine les éclairait.

Elle perçut l'étrange luminescence de la peau de l'homme et l'odeur de pourri et de sucré se décupla quand il quitta ses habits.

Elle sentit la nausée la gagner, maintenant, ses sens étaient en éveil et son rythme cardiaque commençait à l'alerter que quelque chose n'allait pas.

Alors qu'il avançait lentement sa bouche vers elle, elle se retourna et attrapa la poignée de la porte pour sortir de la voiture. Elle trébucha et au moment de se relever elle sentit une douleur atroce au niveau de son oreille gauche. L'homme était en train de la lui mordre, elle se mit à hurler, mais il resserra son étreinte sur elle, la panique inonda tout son corps et elle le repoussa de toutes ses forces. Elle réussit à le faire décoller au prix d'un terrible effort qui ne fit qu'accroître sa douleur. Elle eut le temps de voir avec horreur que son oreille pendait entre les dents de l'homme et seule de la rage se lisait dans son regard, une telle furie qu'elle sut qu'il en servait n'a rien de courir ou de s'enfuir. La colère et la folie qu'elle lut dans le regard de cet homme était tellement vaste, qu'elle en fut pétrifiée. Ce n'était plus un homme, c'était un animal en furie. Alors elle abandonna.

Quand ses dents s'attaquèrent à la peau de son cou et qu'elle sentit ses chairs s'ouvrir et par-delà l'infinie douleur, elle se dit qu'après tout ce n'était tout ce qu'elle mériterait, car l'estime qu'elle avait d'elle-même l'avait fui depuis longtemps.

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 04, 2018 ⏰

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