Chapitre huit

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« Hervé Bazin a écrit "Une vie sans avenir est souvent une vie sans souvenir." Connerie. Parfois les souvenirs sont tellement douloureux qu'ils nous laissent sans avenir. » - Harry

✉ -16. Tu viens au bal masqué demain ?

✉ Non.

✉ Pourquoi ?

✉ Parce que je n'aime pas les bals, les masques et les gens.

✉ Et danser ?

✉ Jamais.

✉ C'est dommage que tu ne viennes pas.

✉ Pourquoi ?

✉ Parce que ça aurait pu être sympa. L'anonyme qui porte un masque perdu au milieu de la foule. Enfin tu vois le genre.

✉ J'aime bien l'idée.

✉ Alors tu viendras ?

✉ Non. Je n'aime toujours pas les gens.

Et c'est sûrement idiot mais ça m'a fait sourire. Il n'aime pas les gens mais il m'aime bien moi. Cette sensation, ce sentiment de se dire qu'aux yeux de quelqu'un on est différent, qu'on sort du lot. C'est valorisant. Avec Anonyme j'ai l'impression de compter, d'être utile. Pas que j'ai une basse estime de moi ou ce genre de connerie, au contraire même. Je sais ce que je vaux et j'en suis fier. Mais avec lui, c'est différent, j'ai l'impression que ce que je fais compte réellement. Comme ne pas lui en vouloir quand il ne me parle pas, ou lui parler quand il se sent triste. Il a cette façon de rendre les choses, même les plus anodines, importantes. Je crois que c'est ce que je préfère chez lui, cette façon qu'il a de me rendre important sans le vouloir.

"Et celle-ci ?"

Je perds rapidement mon sourire et relève les yeux en soufflant agacé.

"Elle est parfaite."

Comme les huit autres qu'elle a déjà essayées. Je ne sais pas comment j'ai pu me faire avoir. Ça fait bientôt deux heures que je suis assis sur le canapé devant les cabines d'essayage à regarder Eleanor essayer des robes. J'ai beau lui dire qu'elles sont toutes bien, elle n'en a toujours pas choisi une. Elle fait la moue et je la vois venir à 1000 kilomètres.

"Je vais en essayer une autre."

Alors là, sûrement pas. Plutôt me pendre ou sauter dans le vide que de rester encore une heure de plus ici. À mon tour de la manipuler un peu. Donnant/donnant. Je me relève et l'enlace par la taille en me collant à elle.

"Non, celle-ci est parfaite.

- Mais tu as dis ça pour toutes les autres aussi."

Je me penche et lui mords doucement le lobe de l'oreille. "Mais celle-là, je me vois déjà te l'arracher après le bal..." Efficace. Vingt minutes plus tard on est dehors.

La soirée a commencé depuis bientôt deux heures maintenant et je dois en être à mon septième ou huitième verre de Whisky. Je ne sais pas et je m'en fous. La salle de réception de l'Université est décorée façon XVI siècle. Les filles sont en robe et les mecs en costard. Tout le monde porte un masque. À coté du buffet, un verre à la main, je discute avec une blonde dont j'ai déjà oublié le prénom. Eleanor m'a tellement fait chier pour aller danser que je l'ai envoyé se faire foutre. J'ai horreur de danser et elle le sait très bien. Au milieu des insultes, elle a eu la gentillesse de me prévenir que ce serait un autre mec qui lui arracherait sa robe après le bal. Ô joie, enfin la paix. Tant mieux. Blondie me raconte... En fait, je n'ai pas la moindre idée de ce qu'elle me raconte. Je louche sur son décolleté, il est bien plus intéressant. Elle interrompt brusquement son monologue et fixe quelque chose derrière moi.

DEGRADATION Tome I Où les histoires vivent. Découvrez maintenant