Ce matin là, il l'appela, la prévint de son départ. Il viendra la chercher dans une heure. Son unique amour l'avait invité à déjeuner. Elle enfila une magnifique robe beige qui faisait ressortir ses yeux verts, ses cheveux châtains et son visage pâle. Une teinte de marron venait surligner ses cils décorés de mascara noir. Il ne restait plus que dix minutes avant que son bien aimé ne passe la récupérer. Elle s'aspergea d'un parfum boisé: c'était son préféré. Mayra croqua dans une pomme rouge comme ses lèvres et sortit de chez elle. Elle patienta vingt bonnes minutes avant de s'asseoir sur les marches de l'entrée de sa maison. Elle se mit à penser. Jamais elle n'eût cessé de l'attendre. Si bien que la nuit daigna même tomber. La jeune femme était sûre que la lune, elle, ne lui sera pas infidèle. Chaque soir, sa lumière éclairait les murs de sa chambre. Et ses sujettes, les milliards d'étoiles, l'aidaient à rêver. Rêver d'une vraie vie, où jamais elle ne souffrirait. Mais une vie comme celle-là n'existe pas. C'est bien pour ça que la rêveuse en rêve. Car un rêve est fait pour nous rester en tête, nous rendre heureux, qu'il soit réalisable ou non. La sonnerie de son téléphone l'arracha à ses pensées. Avant de décrocher, elle jeta un œil sur l'heure: vingt et une heure. Son doigt pressa le bouton vert de l'écran. Son interlocutrice, la mère de son petit ami, se présenta à elle. Dans sa voix, Mayra détecta quelques sanglots, et une voix très peu assurée. Il lui vint alors en tête qu'une mauvaise nouvelle allait lui être transmise.
«[...] Dylan est mort aujourd'hui, sur la route.»
Elle laissa tomber son portable, qui dévala les quatre marches avant de se briser dans un bruit sourd. Ce même bruit sourd qui résonna dans sa tête comme dans une grotte aussi profonde que le vide. Elle ne retint pas ses larmes qui, ardentes, emportaient sur leur passage son maquillage. Elle se recroquevilla sur elle-même dans une position fœtale: ses bras entouraient ses jambes et sa tête était posée sur ses genoux. Elle pleura comme jamais elle n'avait pleuré. Des tâches noirâtres apparurent sur sa robe. Mais l'adolescente s'en contre-fichait. Tout ce qu'elle voulait, c'était récupérer son seul amour. Elle leva les yeux au ciel et dans un dernier soupir, elle laissa son âme s'emporter dans les cieux.