NOUVEAUX CONTES DE FÉES POUR ***
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NOUVEAUX CONTES DE FÉES POUR LES PETITS ENFANTS
PAR
MME LA COMTESSE DE SÉGUR NÉE ROSTOPCHINE
ILLUSTRÉS DE 46 VIGNETTES PAR GUSTAVE DORÉ ET JULES DIDIER
1896
A MES PETITES-FILLES CAMILLE ET MADELEINE DE MALARET
Mes très chères enfants,
Voici les contes dont le récit vous a tant amusées, et que je vous avais promis de publier.
En les lisant, chères petites, pensez à votre vieille grand'mère, qui, pour vous plaire, est sortie de son obscurité et a livré à la censure du public le nom de la
COMTESSE DE SÉGUR, née ROSTOPCHINE.
HISTOIRE DE BLONDINE, DE BONNE-BICHE ET DE BEAU-MINON
[Illustration]
I
BLONDINE
Il y avait un roi qui s'appelait Bénin; tout le monde l'aimait, parce qu'il était bon; les méchants le craignaient, parce qu'il était juste. Sa femme, la reine Doucette, était aussi bonne que lui. Ils avaient une petite princesse qui s'appelait Blondine à cause de ses magnifiques cheveux, blonds, et qui était bonne et charmante comme son papa le roi et comme sa maman la reine. Malheureusement la reine mourut peu de mois après la naissance de Blondine, et le roi pleura beaucoup et longtemps. Blondine était trop petite pour comprendre que sa maman était morte: elle ne pleura donc pas et continua à rire, à jouer, à téter et à dormir paisiblement. Le roi aimait tendrement Blondine, et Blondine aimait le roi plus que personne au monde. Le roi lui donnait les plus beaux joujoux, les meilleurs bonbons, les plus délicieux fruits. Blondine était très heureuse.
Un jour, on dit au roi Bénin que tous ses sujets lui demandaient de se remarier pour avoir un fils qui pût être roi après lui. Le roi refusa d'abord; enfin il céda aux instances et aux désirs de ses sujets, et il dit à son ministre Léger:
«Mon cher ami, on veut que je me remarie; je suis encore si triste de la mort de ma pauvre femme Doucette, que je ne veux pas m'occuper moi-même d'en chercher une autre. Chargez-vous de me trouver une princesse qui rende heureuse ma pauvre Blondine: je ne demande pas autre chose. Allez, mon cher Léger; quand vous aurez trouvé une femme parfaite, vous la demanderez en mariage et vous l'amènerez.»
Léger partit sur-le-champ, alla chez tous les rois, et vit beaucoup de princesses, laides, bossues, méchantes; enfin il arriva chez le roi Turbulent, qui avait une fille jolie, spirituelle, aimable et qui paraissait bonne. Léger la trouva si charmante qu'il la demanda en mariage pour son roi Bénin, sans s'informer si elle était réellement bonne. Turbulent, enchanté de se débarrasser de sa fille, qui avait un caractère méchant, jaloux et orgueilleux, et qui d'ailleurs le gênait pour ses voyages, ses chasses, ses courses continuelles, la donna tout de suite à Léger, pour qu'il l'emmenât avec lui dans le royaume du roi Bénin.
Léger partit, emmenant la princesse Fourbette et quatre mille mulets chargés des effets et des bijoux de la princesse.
Ils arrivèrent chez le roi Bénin, qui avait été prévenu de leur arrivée par un courrier; le roi vint au-devant de la princesse Fourbette. Il la trouva jolie; mais qu'elle était loin d'avoir l'air doux et bon de la pauvre Doucette! Quand Fourbette vit Blondine, elle la regarda avec des yeux si méchants, que la pauvre Blondine, qui avait déjà trois ans, eut peur et se mit à pleurer.