Tête à l'envers

- Dis, tonton 'Susu, tu peux me dire comment t'as rencontré tonton 'Toto ?

- Je te l'ai déjà dit au moins trois millions de fois...

- M'en fiche, redis !

Je me mis à dévisager ma tête de mule de neveu, essayant par la force psychique de le faire changer d'avis. Combien de fois m'a-t-il posé cette question ? Et pourquoi c'est toujours à moi de lui répondre ? C'est tellement humiliant ! ... et révoltant ! Et l'autre pignouf qui se fout de ma gueule ! Heureusement qu'il est sensé être mon compagnon, le roc sur lequel je peux m'appuyer, mon soutien pour toutes les dures épreuves que la vie me lâchera à la gueule -et là, c'en était une. Traître, tu me le paieras.

- Mais oui, vas-y. Tu ne voudrais tout de même pas décevoir ton cher petit neveu d'amour ?

C'est ça, enfonce bien le couteau. Et enlève-moi tout de suite ton putain de sourire triomphant avant que je ne t'arrache la bouche ! Baisse les yeux aussi, tu me donnes envie de les enfoncer dans ta cervelle. Au moins, comme ça tu te rendras compte à quelle point celle-ci est inexistante ! Ah, tu parles d'un soutien...

- Alors les enfants, vous avez été sages pendant mon absence ?

Itachi, mon frère chéri, si tu savais combien je peux t'aimer en ce moment-même ! Promis, je ne dirai plus jamais de mal de ton affreuse chemise trop large pour toi aux affreux imprimés de cocotiers flashy.

- Oui ! hurla son fils en se retournant sur le canapé. Tonton 'Susu allait me dire comment il a rencontré tonton 'Toto !

- Ah oui ? Attendez-moi alors. Je ne voudrais rater ça pour rien au monde ! dit son père en déposant sa veste sur le porte-manteau, avant de venir nous rejoindre dans le salon, positionnant son fils sur ses genoux après avoir pris place sur le canapé en face de moi.

Itachi, faux frère, je te hais ! J'espère que tu crèveras, étouffé par ta langue, après une crise d'épilepsie pour avoir regardé trop longtemps ton horrible chemise.

Je regarde alternativement les personnes assises à côté ou en face de moi. Deux paires de yeux noirs me font face, alors que je sens le regard de mon compagnon à mes côtés. Ils me fixent tous c'est pesant, insistant, irritant et insoutenable.

- Hn.

Moi, Sasuke Uchiha, jeune homme de vingt-deux ans innocent et sans problèmes -si on omet les personnes qui composent mon entourage ici présent-, vais probablement mourir de honte dans les minutes qui vont suivre.

« C'était une belle journée. Ah ça oui, une très belle journée ! Même s'il faisait un peu frisquet en raison de la saison automnale qui avait pointé le bout de son nez, le soleil brillait et le ciel était dépourvu de nuages encombrants.

C'était aussi un joli petit pré. L'herbe était verdoyante, les arbres -même peu nombreux- donnaient du relief, et le son de la rivière en contre-bas remplissait ce magnifique tableau aux allures de petit paradis parfait.

Oh oui ! Tout était parfait, tout était beau, tout était magnifique, sauf une chose, une seule petite chose, une riquiqui, minuscule chose...

J'avais la tête à l'envers. Littéralement.

Mon pied gauche était suspendu par une corde accrochée à une branche d'arbre à peu près haute de deux mètres cinquante, ma tête, elle, se trouvait à presque quatre-vingt centimètres du sol.

Et j'avais les boules. Je n'avais pas de couteau sur moi -qu'est-ce que je ferais avec ?-, ni autre objet pouvant m'aider à me sortir de ce merdier. J'étais juste seul avec moi-même, faisant un tête à tête avec un paysage renversé. Cool.