Je me réveille avec un fort mal de crâne. C'est qu'elle y est pas allée mollo, Ag... C'est quand même dingue les catastrophes qu'on peut engendrer avec un rien. En occurrence, un caillou... Jamais je n'aurais cru ma sœur aurais pu être aussi enragée, encore plus à propos d'un homme. Il faut croire que l'impression d'avoir à nouveau une certaine emprise sur moi l'a rendue folle. Le pouvoir, toujours ce Pouvoir... Cela dit, au lieu de plonger dans mes pensées, je ferais mieux d'aller voir ce qui passe dehors; je pourrais toujours réfléchir plus tard.
J'ouvre une paupière hésitante avant de la refermer immédiatement sous l'excès de lumière. Comme je m'en doutais, je suis à l'hôpital. Peu à peu, je retrouve ma vue, mais aussi mon ouïe, que je ne m'étais pas rendue compte avoir perdu. Autour de moi, aucun "bip-bip" régulier, rien ne fait aucun bruit, dans cette pièce quasi-vide -si ce n'est le lit dans lequel je suis allongée, une télé débranchée, une petite armoire métallique où sont entreposées me affaires et des rideaux entrouvert au minimum, ainsi qu'un pied à roulettes en métal qui porte trois poches, une de sang et deux autres d'un liquide transparent, dont je n'arrive pas à lire l'étiquette. A travers les store qui marquent avec les vitres les limites de ma chambre, je perçois l'agitation de l'hôpital. Jade s'énerve, jonglant avec trois téléphones portables qu'elle met successivement à son oreille. Le personnel court dans tous les sens, évacuant des gens, fermant des stores... Je fronce les sourcils: jamais, des quelques fois où je suis allée à l'hôpital, il n'avait été si actif!... Quelque chose se passe, c'est sûr!
Je me lève alors et mes jambes tremblantes et m'appuie sur le pied pour ne pas tomber. Prudente, je ne touche pas aux rideaux, me contentant de me contorsionner de mon mieux pour voir ce qui se passe dehors. Un foule massive, dont beaucoup de journalistes, sont retenus par une chaîne de gendarmes, policiers et autres gardes du corps, qui se tiennent les mains, comme lors des grosses manifestations. La foule semble en colère, et portent de grandes pancartes que ma vision encore un peu floue n'arrive pas à lire. En me retournant, je croise alors le regard courroucé de Jade. Elle m'intime, à travers la vitre, de retourner sur le lit par le biais d'un regard d'une noirceur que je n'avais encore jamais vu. Je lui obéis, de toute façon je n'aurais pas pu rester guère longtemps debout, mes jambes ne me portaient plus.
J'attendis donc sagement, comme une enfant, assise sur le lit, mes jambes se balançant. Enfin Jade arrive, furieuse:
- NON MAIS QU'EST-CE QUI T'ES PASSÉ PAR LE TÊTE ?
Elle ignora mon air interloqué pour continuer, plus calmement cependant:
-Déjà, venir à cette soirée débile était complètement idiot, mais alors, là, tu atteint tous les records! Te rends-tu seulement compte des conséquences !? Mon dieu, mon dieu, tout va se précipiter maintenant...
Sa voix finit en un chuchotement léger. Je suis pétrifiée. Jamais, au grand Jamais elle ne m'avait parlé ainsi. Je pensais qu'elle ne se le serait pas permis. Mais pourtant, il est grand tant pour moi de me rendre à l'évidence: elle a beaucoup, beaucoup plus de pouvoir et de succès que moi, au sein de ma propre entreprise. Elle a le respect et l'admiration de la quasi totalité des employés, est saluée, reconnue, elle avait fait des grandes et belles choses dans sa jeunesse, et encore maintenant continue. Elle est considérée comme la vraie tête de l'entreprise. Mais moi?
Peu de gens ne connaissent plus que mon nom. On me voie comme une excentrique dandy, qui joue de la musique, enfermée dans sa bulle. Une grande enfant, coupée du monde et de la réalité, incapable de rien, sauf des choses de l'Art, pas même engagé. Et puis, je me pétrifie. Non pas à cause d'un élément extérieur, mais parce que mon cerveau tourne à plein régime. Je retiens inconsciemment mon souffle. Tout se mit en place très clairement dans mon cerveau, avec une logique implacable que jamais auparavant je n'avais éprouvé. Puis j'accueillis la nouvelle avec froideur, comme un élément qui m'était totalement anodin, alors même qu'il me touchait jusqu'au cœur.

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Ma vie de notes
AventuraAlexandre est encore jeune, mais elle est déjà connue. Son nom, en tout cas. Elle a déjà son emprise sur le monde, et ne cesse de l'étendre. Elle se dit que c'est parce qu'elle est partie tôt de chez ses parents, contrairement à sa sœur jumelle. Sa...