Macron a son costume tout bleu; celui que sa femme aime, voir sur lui. Chose étrange, aujourd'hui, ce n'est pas à elle qu'il pense. Il ya deux yeux noirs dans ses songes éveillés; deux puits à lumières qui ramènent un soupir. Mercredi. Le conseil; Em' est excité, presque un gosse dans une chemise grande; il sautille vers sa porte, les gardes font deux ombres entre ses pas. Bientôt, la ville défile par la fenêtre de la voiture, et il y a une belle couleur dans le ciel. La teinte d'or et de rose. L'eau du matin brille sur les trottoirs quelques passants s'engouffrent d'un métro à l'autre. La vie s'éveille, la ville s'allume. L'Elysée. Déjà, deux, trois, journalistes. Il y a le mignion du petit journal; le tout jeune. Martin. Celui dont il a frappé la cuisse à Végas.
Lui. Sur le parvis; les marches. Jour de noir; très serré, son costume épousse l'ensemble. Beau. Macron chantonne; la ceinture de sécurité se rebiffe, fait comme un mouvement pour le retenir. Trop tard. Il est devant Manuel. A lui serré la main; à lui sourire poliement; à lui dire des choses futiles. Quelque part; son coeur saigne. D'être l'unique poutre d'un radeau sans mât. Il dérive.
Une étreinte; qui reste. Une minute en trop. Presque un message en langage du corps. Manuel baisse sa tête; tend son cou; le capture par en dessous de son regard dur. Dans sa grande main; Em a le bras qui vacille. Le reste de lui; tout entier; tremble.
Manuel s'approche; il n'y a plus l'eau de lumière; plus la ville aux médias, dehors; plus même cette teinte de ciel. A vrai dire; il n'y à rien à en voir.
Ses lèvres. Les siennes. L'ombre qui l'emporte; quelque part.