L'air est frais. Je le sens, sur mon visage, glissant sur mes joues rougies. L'hiver est à son apogée, à cette époque. La neige flotte gracieusement dans l'air, semblant hésiter du chemin à suivre pour retrouver le sol. La neige est rouge, dans cette vallée, d'un rouge profond auquel la science ne s'est pas encore intéressé. Il n'y a qu'un seul village dans cette vallée. Une seule rue, et elle est déserte. Je regarde au loin, scrutant avec incertitude, essayant de trouver l'horizon. En vain. Je ne distingue que certains toits de maisons, rouges, eux aussi, mais moins. D'une sort une légère fumée, qui monte, discrètement. Puis elle se dissipe à mis chemin, balayée par une bourrasque plus forte qu'elle. Je fais un pas. Le doux bruissement de la neige qui s'aplatit sur elle-même me plaît. Je recommence, mais plus difficilement, le vent semble vouloir m'en empêcher. Je l'entends qui siffle, qui plaque mes vêtements contre moi. Je resserre mon écharpe. Inutilement bien entendu, mais cela me conforte. Je marche, tentant de me retrouver dans ce paysage éblouissant, qui ne semble plus être le même. Je sens dans mes chaussures mes doigts de pieds, qui me piquent. J'entraperçois le reste des lettres encore épargnée d'un panneau "Rue des Embruns".
J'arrive chez eux, enfin chez elle maintenant. La porte me barre l'entrée, surplombée d'un "16". Elle est grande, en bois, mais tout aussi blanche que le reste. Je balaye la neige qui se trouve sur sa poignée, et toque. J'entends des bruits de chaussons claquants sur un carrelage. Ce ne sont que des pas, mais ils ont l'air aussi affolés qu'un Homme peut l'être.
"-J'arrive, j'arrive ! me dit-on, ayant peur de me faire patienter. Pourtant, ça ne me dérange pas moi, la neige. On m'ouvre la porte, comme on aurait ouvert un cadeau, du moins avec le même empressement.
-Entrez entrez ! me dit-elle. Mais c'est que vous devriez vous habiller plus par un temps pareil ! lance-t-elle en me recouvrant d'une serviette que je n'ai pas demandée.
C'est une petite femme. Vêtue d'un tablier de cuisine rose, que je trouve d'ailleurs assez laid, elle me sourit en m'indiquant le chemin du salon :
-Venez vous asseoir ici, voilà.
Elle me pose sur une chaise, devant un feu, et s'empresse de me chercher quelque chose à manger. Je la regarde faire, dans son tablier, recouvrant son ventre bien rebondi pour une femme de sa taille. Mais dans son visage, il y a de la douceur. La douceur d'une femme triste. Sur ces joues rosâtres pigmentée de taches de rousseurs, des rides commences à se dessiner. Je l'entends farfouiller dans la pièce voisine qui doit sûrement être la cuisine.
Lorsqu'elle revient, elle tient dans sa main droite une baguette, et dans sa gauche une soupière, et qui vu la courbure de son poignet, est sûrement remplie. Elle pose la nourriture sur une petite table que je n'avais pas remarquée, et s'assoit.
"-Quand ? dis-je.
-Demain.
Elle baisse les yeux. Je lui soulève le menton, la forçant à soutenir mon regard.
-Quand ? répété-je.
-Dès l'aube.
Sans mot, je me lève. L'aube. Il est16h. Cela ne me laisse donc que 14h.
-Merci."
VOUS LISEZ
Soleil noir
Science Fiction2939, surpopulation, les états se réunissent et mettent en place des mesures limitation. Thea, une enfant illégal adopté contre les règles, est pourchassé, alors même qu'elle découvre que le garçon qu'elle aime est membre de l'Inquisition qui le tra...