Je me souviens de tes cheveux noirs. D'abord long, tu es arrivée un jour furieuse. Furie, tu pestais contre le funeste idiot qui t'avait mutilé. Tes désormais courtes boucles d'ébène, tu les repoussais toujours avec colère quand elles avaient le culot de passer devant tes yeux.
Je me souviens de tes grands éclats de rire. Jamais on ne pouvait arrêter ton hilarité. Tu te pliais en deux sous le poids de la joie. Du fond de ma mémoire, remonte l'amusement que cela provoquait en moi.
Je me souviens de tes yeux. Leur couleur m'a toujours échappée, envoûtant mystère. Au fond, tout au fond, se cachait un étrange sentiment. Je cherchais à le capter mais, évanescente, tu te dérobais à mes recherches.
Je me souviens de ta rage devant les louanges que m'adressaient nos camarades. Tu disais que je n'étais pas différent des autres, que le succès scolaire n'a rien à voir avec l'intelligence. Mais ce que tu n'as jamais voulu comprendre, c'est que jamais je je me suis vanté. J'acceptais les compliments d'un simple hochement de tête mais cela semblait pour toi déjà trop suffisant.
Je me souviens de ton refus de me dire au revoir. Tu t'esquivais, clouais tes yeux au mien pour voir ma réaction. Je haussais les épaules, faussement désinvolte, mais en vérité des larmes amères suintaient de mon âme meurtrie. Pourquoi l'élue de mon coeur était la seule à ainsi me repousser ? La Vie est une garce.
Je me souviens de ce jour funeste. Du sombre jour où tout à basculé. Je t'ai avoué ma passion, dénudant mon torse pour te montrer à quel point les battements enfièvrés de mon coeur étaient forts. A aucun moment je n'ai cru que tu m'aimais. Avec des mots mielleux, tu m'as apaisé. Nous avions convenu de rester ami, car la perdre me semblait pire sort que la mort. Je ne savais pas que, déjà, l'effilée rapière qui te servait de langue cherchait à me blesser.
Je me souviens des jours qui suivirent. Peu à peu, tu arrêtas de m'écrire. Tu me fuyais par tes laconiques réponses.
Je me souviens de mon désespoir. Je crois ne jamais avoir été aussi mal. Torturé par ce cruel dilemme, je ne dormais plus. Le maigre reste d'amour que j'avais pour toi me fit poser la question fatidique: étions-nous toujours amis ?
Je me souviens de ta réponse. Quatre jours durant je lisais ce que tu m'avais envoyé: je ne sais pas. Je ne sais pas, je ne sais pas, je ne sais pas. Cette phrase me hantait, lancinante psalmodie qui mettait à vif mes sentiments confus. Nul mot ne peut décrire ce que je ressentis, ce tumulte d'émotions qui faillis m'engloutir.
Je me souviens, je me souviens que la vie reprit lentement son cours. Immuables, les sables du temps rongèrent la haine que je ressentais pour toi. Il fallut longtemps, alors que les mots fielleux que tu sussurais avec ta bouche mesquine ravivaient ma flamme noire. Il en reste, ici et là, quelques fragments mais peu m'importe.
Un être de lumière t'a remplacé sur le trône de ma pensée.
Une douce amie qui a pansé les plaies que tu m'as infligé.
Une soeur de coeur qui ne me trahira pas.Mais alors, pourquoi ? Pourquoi, je n'arrive pas à oublier ton visage ?
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Rêves de Dragon
RandomPetites histoires, poèmes, coup de gueule, tout ce qui passe par la tête du Dragon ! ;) Venez, osez entrer dans l'antre du rêveur...