Chapitre dix - Émotions

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Je me réveille doucement.. Il doit être midi passé.. Je suis dans mon lit.
Nath est assis par terre contre le mur en face de moi. Il lit un livre en attendant probablement mon réveil.
Je m'assois sur le bord de mon lit et me tiens la tête.
Il lève le regard et sourit en me voyant.
Nath: T'es enfin réveillé! Bien dormi?
Je ne répond pas. Il pose son livre et me tend un verre d'eau avec un doliprane. Je les prend hésitante puis avale le médicament et l'eau.
Moi: ... Merci.
Nath: De rien c'est normal.
Il s'assoit à côté de moi, et passe son bras autour de mes épaules. Il me secoue légèrement.
Nath: Aller va prendre une douche.. Tu va pas passer ta journée au lit.
Je grogne un bruit de mécontentement et pose ma tête contre son épaule.
Nath: Raven.. Ta mère m'a demandé de te dire que tu avais rendez vous chez ta psy ce soir..
Je relève la tête aussi tôt.
Moi: Pardon?
Nath: Je fais que passer le message!
Dit-il en levant les mains au ciel.
Je retombe en arrière sur mon lit et soupire.
Nath: Raven lève toi!
Il se relève et me tire par les pieds! Je tombe à terre, ce qui le fit rire de plus belle.
Moi: D'accord! Ça va!
Je me lève et vais me doucher. Je me prépare pour sortir même si mon rendez vous ne doit être que dans plusieurs heures. Après tout je vais pas passé mon après midi à rien faire..
Nathan est au salon attendant que je finisse de me préparer. Je descend le rejoindre.
Moi: Au fait, tu m'expliques pour Cassandra?
Nath: Y'a pas grand chose à dire.
Moi: Vous vous êtes embrassés.
Nath: Mais comment tu sais ça?!
Je le regarde fixement.
Nath: Oh oui c'est vrai! "Tu sais beaucoup de chose" pas vrai?
Moi: Exactement. Donc?
Nath: Donc je l'aime bien. C'est tout.
Moi: Tu comptes sortir avec elle?
Nath: J'en sais rien.. Peut être oui.
Je me lève d'un bond.
Moi: Quoi?! Mais cette fille est stupide! Inculte! Faible! Et ennuyante!!
Le visage de Nathan se referma.
Nath: Je ne suis pas d'accord. Et je peux savoir en quoi ça peut te poser problème que je sorte avec elle?
Moi: Ça ne me pose aucun problème. Fais ce que tu veux.
Nath: C'est bien ce que je vais faire. Bon, tu sembles rétablie. Je vais te laisser.
Moi: Parfait.
Nath: Parfait.
Il me tourne le dos et sort de chez moi. Je me sens.. Bizarre.. Je me sens.. Triste? C'est tellement étrange comme sensation. Je n'avais pas envie que Nathan parte!
Peu importe. Je n'ai pas de temps à perdre pour ça.
18:00 - je suis assise sur l'un des fauteuils de madame Carpentanie. Elle semble triste aujourd'hui elle aussi.
Moi: Vous allez bien?
Psy: Très bien oui.
Moi: Non c'est faux. Vous mentez. Vous êtes triste je le vois.
Psy: Oh.. Et bien.. Personne ne l'avait remarqué pour l'instant.. Je suis surprise que toi si..
Moi: Vous avez perdu quelqu'un?
Son regard auparavant froid se remplit de larmes.
Psy: Comment tu...
Moi: Quelqu'un de très proche..
Elle m'observe attendant la suite.
Moi: Votre... Mari?
Ça y est.. Une larme coule le long de sa joue.
Psy: Il a eu un accident hier soir effectivement. Mais c'est à toi de me parler de tes problèmes et pas l'inverse.
Moi: Je préfère parler de vous. Parler de ce que vous ressentez.
Psy: Pas besoin d'en parler tu vois très bien ce que les autres ressentent sans problème. Mais toi, que ressens tu?
Moi: Absolument rien.
Psy: Ah.. Je n'ai peut être pas ton intelligence mais reconnaître la vérité est aussi mon métier. Sois honnête.
Moi: Rien je vous dis.
Psy: C'est ce que tu crois. Tu pense ne rien pouvoir ressentir mais c'est faux. Au contraire! Ta maladie te fais ressentir les émotions bien plus fortes que les autres! Que tu aimes ou détestes, ça sera deux fois plus puissant pour toi que pour un être humain normal. Et tu ne veux pas l'admettre. C'est pour ça que tu les bloques. Que tu bloques tes émotions. Que tu t'empêche d'aimer. Tu ne ressens rien car tu as choisi de ne rien ressentir. Mais parfois ça ne se contrôle pas.
Je baisse les yeux. Fixant mes genoux.
Psy: Si je te demande de me dire le nom d'une personne. Lequel est-ce?
Spontanément je répondis "Jade". J'ai ensuite pensé à Nathan, presque aussi tôt. Mais la toute première personne dans ma tête a été ma soeur.
Psy: Et bien "Jade", est soit la personne que tu aimes soit celle que tu détestes le plus.
Moi: C'est ma soeur.
Psy: Que ressens tu pour elle?
Moi: Je ne veux rien ressentir!
Psy: Pourquoi?!
Moi: Parce que je ne peux pas la protéger!! Je ne peux pas! Je n'arrive déjà pas à me protéger moi! Je me noie dans l'alcool, comme mon enfoiré de père! Je voudrais pouvoir l'empêcher de vivre ce que j'ai vécu! Mais je ne peux pas!! Je voudrais l'empêcher de souffrir! De devenir ce que suis devenu! ... Mais je ne peux pas... Je suis impuissante. Je ne pourrais jamais l'empêcher d'avoir mal, d'aimer, de haïr, et même de mourir. Je ne contrôle rien. Et je déteste ça.
Un blanc de plusieurs minutes pris possession de la salle.
Psy: ... Tu veux mon avis?... Le contrôle est une illusion. Personne ne contrôle jamais rien. J'aurais aimé moi aussi le protéger, l'empêcher.. De mourir. Empêcher cet autre enfoiré de chauffard de prendre le volant en ayant bu, empêcher ce chauffard de foncer droit sur la voiture de mon mari. J'aurais aimé contrôler tout ça. Mais je ne peux pas. Tu ne le peux pas. Personne ne le peux. Voilà la réalité Raven. Accepte le.
Je relève les yeux vers elle. Les siens sont bouffis mais aucun sanglot ne sors de sa gorge.
Psy: J'ai mal Raven. J'ai mal parce que je ressens toutes ces émotions. Mais pour rien au monde je ne les ferrais taire. Car ces émotions m'ont permis d'aimer mon mari, m'ont permis de garder tout ces bons souvenirs de lui. Grâce à ces émotions, j'ai été heureuse et je le serais encore. C'est grâce à ces souvenirs et les émotions qui leurs sont rattachés que je vais pouvoir surmonter tout ça. Mais comment feras tu toi, si tu refuses le bonheur. Si tu refuse d'aimer. Tu ne pourras jamais l'empêcher. Mais le nier te fais tellement de mal. Accepte tes émotions Raven. C'est la seul chose qui te rendra humaine, qui te rendra vivante.
Je ne dis rien. Je maintient le silence de mort qui régnait déjà dans le pièce.
Psy: Bon je dois y aller. Notre séance se termine là.
Moi: Où allez vous?
Elle hésite à répondre.
Moi: Si vous voulez que je vous fasse confiance faites moi confiance d'abord.
Psy: Je vais chercher mon fils. D'ailleurs... Je pense le changer de lycée. Il se pourrait qu'il se retrouve dans le tien.
Moi: Dans ce cas il aura déjà une amie.
Elle me sourit et me raccompagne jusqu'à la porte.
Il se pourrait que je l'ai mal jugé. Cette femme n'a pas l'air mauvaise.
20:00 - je suis de retour chez moi. J'ai beaucoup repensé à ce que m'a dit madame Carpentanie. Et si c'était vrai? Si je pouvais ressentir.. Je sais au fond de moi que je le peux mais.. Est ce que je le veux? Honnêtement.. Je ne pense pas. Mais je ne pense pas également avoir le choix.

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