Chapitre 3

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Ce fameux soir où je me suis retrouvé sur la plage avec Lisa (je me souviens de son prénom maintenant, et ce n'était pas un prénom en y), je passais la soirée chez Ted. Je ne vous ai pas encore parlé de Ted. Pour faire court, Ted est tout ce qu'il y a de plus détestable. Trente sept ans, brillant avocat associé dans un cabinet majeur de L.A, marié à une femme sublime compréhensive et amoureuse éternelle, père de deux charmants bambins, un garçon Jed, et une fille Mary, propriétaire d'une splendide maison avec piscine à Santa Monica, président du Lawyers Golf association of L.A (un club de vieux avocats richissimes tapant la petite balle blanche sur tapis vert chaque vendredi), ex. champion universitaire de tennis, et parrain de la dernière fille du propriétaire des L.A Lakers.

Ce type est une énigme. Il est la somme de toutes les aspirations des hommes de trente, quarante ans tentant de faire quelque chose de leur vie. Les jeunes le vénèrent, les vieux l'adorent, les femmes le courtisent. Ce type est détestable.

Bon tout cela n'est qu'une façade. Moi qui le connais mieux que quiconque, je peux vous le dire, même si je ne devrais pas.

Un soir de Thanksgiving, Ted et moi nous sommes retrouvés au ByPass, un bar branché de Melrose, qui donnait l'illusion à sa clientèle huppée de se retrouver dans un endroit louche de Brooklyn. Le tour de force, c'est que ce n'était pas une illusion, le bar était vraiment miteux. Ted avait le blues, je n'ai donc pas le monopole de la prise de tête, et il avait besoin de parler avant de rejoindre sa famille pour un repas de fête.

- Il faut que je te dise quelque chose.

- Sans déconner !

- Je me suis fait sucer.

- Félicitation, Emma est plus dévergondée qu'elle n'y parait.

- Mais non pauvre con, ce n'est pas d'Emma dont il s'agit, Emma est la mère de mes enfants bordel !

- Et alors ça l'empêche de te pomper le dard ?

J'étais allé un peu trop loin, mais Ted était mon meilleur ami et il ne m'en tint pas rigueur.

- Je me suis fait sucer par ma secrétaire...voilà c'est dit.

Je ne parvins pas à retenir un pouffement, mes lèvres trempant dans ma Margarita, ce qui eu pour effet de faire des bulles, un peu comme un gamin soufflant dans la paille plantée dans son verre de soda.

- Tu fais dans l'originalité mon cher Ted ! Se faire sucer par sa secrétaire, c'est presque comme s'inscrire au Lion's Club quand on est avocat.

- Ouais, sauf que ma secrétaire est d'une intelligence rare, en plus d'avoir un talent presque irréel lorsqu'il s'agit de prendre son patron en bouche.

- Et alors, son intelligence te fait peur, ou c'est sa dextérité à te faire une pipe qui t'inquiète ?

Ted commanda une deuxième tournée, whisky pure malt sans glace pour lui, frozen Margarita pour moi.

- Cette fille est futée, elle me faisait du rentre dedans depuis des mois. J'ai craqué comme un bleu, et maintenant elle va foutre ma vie en l'air cette petite salope.

- Mais non, Ted, tu sais bien que tu n'as qu'un mot à dire, et je la butte.

- Tu me fais vraiment chier avec ton humour à deux balles, je vis un moment terrible de ma vie, et toi tu me sors des blagues de comptoir. Je pensais pouvoir compter ...

- ... oh là bijoux on se calme. Bon tu t'es fait sucer par ta secrétaire, et t'as peur que ta femme l'apprenne ?

- Evidemment que j'ai peur que ma femme l'apprenne. Et en plus, ce n'est pas la première fois.

BovarysmeWhere stories live. Discover now