Poèmes d'une Ado qui voit la vie en noir et rose ...

Vous ne tuerez pas le printemps...

J'attends l'aube au visage pâle,

J'attends l'aube au yeux gris .

Je ne veux pas compter les heures

A l'horloge aveugle du temps,

Le temps lui-même s'abolit,

Qu'il meurt dans un dernier râle:

Adieu , temps du mépris !...

Je ne veux pas écouter mon coeur.

Adieux passé, ils m'ont tout pris.

Là-bas je sais qu'une femme pleure.

Adieu, mes tout-petits...

Adieu ma vie , mon beau printemps.

Adieu le temps du bonheur.

Combien peut-il me rester d'heures ?

Le temps est mort, tuons le temps ...

J'attends que se lève le jour, 

Le jour que je ne verrai pas.

Adieu mon rêve et mes amours ,

Adieu le ciel et la prairie.

Je n'attends plus qu'un bruit de pas,

-Adieu mes fils qui me sourient-

Un bruit de clef , la porte s'ouvrira ,

S'ouvrira grande sur l'avenir.

A l'aube d'un jeune printemps.

Qui me parle donc de mourir ?

J'attends demain ; j'attends mon heure.

Mère chérie sèche tes pleurs,

Sèche tes pleurs ma mie.

Demain vivra! Vive la vie!

On ne tue jamais que le temps.

J'attends l'heure de partir

Et de marcher vers un grand mur

Mon amour , je saurais te sourire,

je t'ai souri à la torture ,

Je vous sourirais mes tout-petits ...

Je vous emporte dans mon coeur,

Adieu ma femme et mes amis,

J'emporte le temps du bonheur,

Je porte en moi tout l'avenir.

Pourquoi pleure-tu ma mie ?

Qui donc a parlé de mourir ?

J'attends l'aube pâle en vainqueur.

Tuez bourreaux ! Tuez déments !

J'attends votre glas et mon heure.

Vous ne tuerez pas le printemps...

Ce poème à été écrit à la prison de Montluc , à Lyon , dans la nuit du 17 au 18 mars 1943, par un condamné à mort avent son éxécution.

Je trouve ce poème absolument magnifique et touchant ...