Je ramasse les quelques pièces restantes sur le comptoir et jette un coup d'œil vers mon employeur. Affublé d'une chemise blanche et d'un pantalon en velours beige, Elbert est occupé derrière une pile de bouquins. Il numérote, trie et range toute la section traitant des mythologies dans le monde et il est si concis dans son travail que pas une seule fois il ne pose son regard sur la porte de la boutique. Il n'est pas comme beaucoup de gens, avare par nécessité, mielleux par obligation et menteur par procuration, il vit de sa passion et est assez fier que celle-ci lui rapporte suffisamment pour vivre. J'ai un profond respect pour cet homme silencieux.
J'hume soudainement l'odeur citronnée de la pièce. Celle-ci se mari presque avec celle, plus acre, des livres. Je respire tout ce calme, tout ce silence qui m'apaise et diminue les battements irréguliers de mon cœur. J'ai bien souvent pensé à rester ici, parmi les rayonnages poussiéreux à lire et à apprendre, dans cette ville sereine où l'atmosphère est si différente de l'endroit où je suis née, parmi des gens qui apprécient la quiétude mais je ne peux pas, je ne peux vraiment pas. Un coup d'œil vers mes mains me rappel à quel point il m'est impossible de rebrousser chemin. J'inspire profondément puis je soupire tout en reportant mon attention vers mon employeur, ses cheveux poivres et sels agréablement peignés vers l'arrière.
« Alors, Elbert, de bonnes choses dans cet arrivage ? »
Il relève son buste recroquevillé et m'adresse un petit sourire.
« Pas ce que tu recherches. » Répondit-il simplement en enlevant ses lunettes.
J'hoche la tête avec un pauvre sourire. Il me connaissait plutôt bien. Du moins, il connaissait ce que je voulais bien lui montrer. Sans attendre ma réponse, il se redonne à sa tâche et je finis par me rasseoir derrière le comptoir, ne m'attendant à aucun nouveau client au vu de l'heure. Sous mes doigts, la première de couverture d'un gros livre m'appelle et me repousse à la fois. J'ai toujours ce creux au fond de l'estomac, cette appréhension mêlée au besoin suprême de lire chaque ligne. Mythologie Nordique, interpelle mon regard comme un aimant. Plus encore, la représentation grossière du Dieu Thor et de son marteau magique. Il prend la majorité de la couverture. Derrière lui, ce qui s'apparente au Valhalla. Puis mon regard se fige lorsque j'aperçois au loin sur un rocher, au côté d'autres figures emblématiques, le Dieu du mensonge et de la traîtrise ; Loki.
C'est à chaque fois la même chose, je suis partagée entre cette soif ironique d'ouvrir le livre à la volée et cette peur étrange de savoir des choses qui pourraient tout remettre en question. Je ne comprends pas cette obsession viscérale que je continu de rassasier alors que toute la vérité que j'y trouve me fait un mal de chien. Mais c'est bien plus fort que moi. Je me tiens au fait qu'il vaut mieux toujours en savoir sur ses ennemis. Et cette certitude soulage quelque peu ma conscience.
« Tu viens manger à la maison ce soir Constance ? »
Les paroles d'Elbert me tirent immédiatement de mes pensées. Je lève mon regard troublé vers lui puis vers l'ancienne horloge accrochée au mur en face de moi. 18h45.
« Merci beaucoup, mais je vais rentrer Elbert » M'excusais-je avec un petit sourire.
« Alors va ! Files, rentres chez toi ! »
Un petit rire s'échappe de sa gorge enrouée tandis qu'il fait des gestes avec ses bras.
« Je peux encore rester les 15 dernières minutes, je ne suis pas pressée vous savez... »
« Une fille de ton âge devrait s'en réjouir, alors oust ! Je fermerai la boutique. »
Je savais qu'il n'y avait rien à redire. Elbert prenait des décisions et personne ne pouvait lui refuser quoi que se soit. Je lui souris. Un large sourire dévoilant de minuscules fossettes.
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New York
FanfictionL'attaque de New York ne fut pas seulement le début de la gloire des Avengers et la fin du sentiment de suprématie propre aux Hommes. Elle n'eut pas seulement des conséquences dévastatrices sur Tony Stark et son presque sacrifice ne sauva pas tout c...