La forêt était silencieuse, le clair de lune ne perçant que difficilement les épaisses frondaisons qui plongeait les sous-bois dans une obscurité profonde. Aucun vent ne soufflait, aucune brise ne venait troubler la quiétude des feuillages. Dans le lointain, un loup hurla, relayé par un autre, puis un troisième, plus proche celui-là. Les restes d'un feu s'éteignaient lentement, là où un repas frugal avait été pris. Adossée à un arbre, une silhouette noire, immobile, semblait dormir debout. A peine un léger souffle sortait de ses lèvres, seul indice montrant que la vie l'habitait. Posé à coté, un paquet volumineux et sanglé semblait abriter un objet de taille importante, plus haute qu'un homme. Seul le haut du paquet, arrondi, bien plus large, se démarquait du reste, sans pour autant révéler ce qu'il contenait. Cependant, le paquet avait attisé la convoitise du groupe de brigands qui résidait dans cette partie de la forêt. Ils avaient croisé l'homme peu après qu'il ait pénétré la forêt en empruntant le sentier pourtant déconseillé aux voyageurs non accompagnés par des gardes. Ils l'avaient suivi durant l'après-midi et avaient attendu qu'il s'arrête, pour ensuite, comme à leur habitude, l'égorger durant son sommeil. Lâche, mais efficace, l'effet de surprise jouant en leur faveur si jamais leurs victimes de réveillaient. De plus, dans la forêt, le corps ne serait probablement jamais retrouvé. Peu de risques pour des récompenses parfois faramineuses, comme lorsqu'ils avaient montré à leur receleur ces bijoux qu'ils avaient récupéré sur un couple noble ayant trouvé amusant de se retrouver dans les bois pour quelques amourettes. Les brigands imaginaient déjà ce que pouvait contenir le paquet, et ce qu'il pourrait leur rapporter.
Soudain, ils quittèrent leurs rêves de fortune lorsque la silhouette qu'ils croyaient endormie se mit à bouger. L'homme ramassa son paquet, le mit sur son dos et se dirigea vers une trouée dans les bosquets environnants. Les brigands se mirent en mouvement, leur chef à leur tête, et suivirent l'homme. Ils se retrouvèrent après quelques minutes de marche aux abords d'une clairière assez grande, où la lumière du clair de lune octroyait une visibilité bien plus élevée que dans le reste de la forêt. Le chef des brigands eut un temps d'hésitation. L'homme avait-il une quelconque idée de leur présence ? Ses hommes s'installèrent en silence, attendant son commandement. Leur victime se tenait devant eux, leur tournant le dos, la tête levée vers la pleine lune. Le chef réfléchissait à la meilleure manière de s'occuper de lui, lorsqu'une voix le tira de sa réflexion.
« La lune est belle. »
Le chef tiqua. Cette voix était celle de l'homme dans la clairière. Se parlait-il à lui-même ?
« Vous pouvez sortir, je vous attends. »
Les brigands se tournèrent vers leur chef. Celui-ci leur fit signe de sortir du couvert des bois. L'homme était seul, et visiblement sans armes, là où les brigands étaient une quinzaine, armés et habitués aux combats. Ils ne risquaient rien. A présent, ils encerclaient le jeune homme, plus jeune que ce qu'ils avaient cru voir, qui regardait toujours la lune.
« C'est une erreur. Vous devriez faire demi-tour. »
Sa voix était calme posée, sans réelle menace. Il avait l'air sûr de lui, comme s'il établissait un fait. Le chef sourit. Tout compte fait, c'était simplement un jeune arrogant qui avait dû parier avec ses amis qu'il passerait la nuit dans la forêt.
« C'est une erreur ? Vraiment ? Et en quoi, je te prie ? »
Le jeune homme baissa légèrement la tête, et jeta un coup d'œil aux brigands par-dessus son épaule. Il souriait.
« Dois-je vraiment vous l'expliquer ? »
De lui se dégageait une sorte de force tranquille, une confiance en soi évidente, comme en ont les jeunes gens qui ont vécu de nombreuses expérience et qui savent s'adapter à toutes les situations. Le chef eut un léger frisson, mais ne se démonta pas. Ce qui l'intriguait le plus, c'était les cheveux du jeune homme. D'un blond platine qui semblait fantomatique sous la lumière lunaire, ils s'organisaient en mèches étonnamment pointues, qui se démarquaient les unes des autres, pointant vers l'arrière. Ces mèches, étrangement, semblaient comme fixées sur son crâne, ce qui ne ressemblait à rien que le chef ou ses hommes pouvaient avoir vu auparavant.
« Jolis cheveux. Pas d'ici, je me trompe ? »
Le jeune homme se retourna, laissant voir son visage, élégant et fin.
« En effet, je ne suis pas d'ici. Je viens de loin.
-Ça se voit et ça s'entend.
-Pardonnez-moi si cela vous incommode, répondit le jeune homme en effectuant une gracieuse révérence.
-Non, c'est moi qui m'excuse ».
Le jeune homme se redressa, toujours souriant. Habillé tout de noir, quelque chose d'inquiétant se dégageait de lui. Le chef devait reprendre l'initiative.
« Allons-y, les gars ».
Comme un seul homme, les brigands se ruèrent sur le jeune homme.
**********
Le combat n'avait pas duré plus d'une minute. Quatorze corps gisaient sur le sol, un quinzième se vidait lentement de ses dernières forces. Le chef des brigands parvint à articuler péniblement :
« C..Comment.... »
Le jeune homme se pencha vers lui.
« C'était une erreur. »
Puis il se détourna, son paquet toujours en place sur son dos, et repartit tranquillement vers les sous-bois, pendant que la vie quittait le chef des brigands.
Il n'avait pas cessé de sourire.

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Tales of the end of the world-Tome 1: un conte de sang et de larmes
FantasyDans un monde où le pouvoir le dispute à la puissance, où les forces des uns rivalisent avec les capacités des autres, où les contes et légendes sont plus vraies qu'ailleurs, des gens que rien ne lie se retrouvent à partager un voyage parsemé d'obst...