Lorsqu'elle ouvrit les yeux, son ami était toujours allongé à côté d'elle.
Du sable plein les vêtements, elle se leva, secoua vaguement ses habits, et se rendit soudain compte qu'il était éveillé. Ses yeux bleus encore endormis la couvrirent du regard.
Il murmura un faible "bonjour" et se redressa en fixant l'horizon."La mer, c'est comme le ciel, sauf que les coquillages amenés par le courant remplacent les étoiles." pensa la jeune fille en rejoignant son ami dans sa contemplation de l'océan.
Quelques personnes marchaient sur la plage, d'autres au loin tentaient courageusement d'entrer dans l'eau encore froide. L'heure devait être sacrément avancée.
《 - Tu sais qu'hier soir, on ne s'est même pas boudés ? fit remarquer le garçon en passant ses mains dans ses boucles brunes. 》
Elle lâcha un petit rire, et se rassit lourdement là où elle avait passé la nuit, c'est-à-dire à ses côtés.
《 - Pour changer des deux soirées précédentes...finit-elle par ajouter en donnant un petit coup de poing dans l'épaule de son compagnon. 》
Ils se levèrent finalement et décidèrent d'un commun accord qu'il serait idiot de quitter la mer sans même s'y être baignés.
Ils se dirigèrent vers l'océan, et après s'être envoyé plusieurs litres l'un sur l'autre, les deux amis se laissèrent tomber dans l'eau salée. Les rares promeneurs furent étonnés de voir ces deux adolescents seuls, encore vêtus et entièrement trempés, se battre à coups d'éclaboussures.Ils y passèrent une heure au moins, à barboter et à chahuter comme des enfants découvrant la mer pour la toute première fois. Ils s'amusaient follement. Ils sortirent ensuite, les tissus leur collant à la peau, le vent soudain bien moins agréable. Les mâchoires s'entrechoquaient, et ils se dépêchèrent de prendre leurs affaires et de retourner près de leur voiture.
Le jeune homme commença à retirer son short tandis qu'elle cherchait des rechanges tant pour elle que pour lui. Il se retrouvait en sous-vêtements devant elle.
Il n'y avait pas vraiment de gêne ; elle savait comment il était fait, lui connaissait un peu aussi les formes de son corps à elle. L'année précédente, ils avaient eu piscine ensemble, peut-être que cela aidait. Elle le savait mince, fin et sans muscles, et lui la devinait fine de taille, mais aux cuisses à peine rondes et aux hanches dessinées.Alors qu'elle fouillait les sacs à la recherche d'habits secs et propres, son regard dériva sur son ami. Elle lâcha le sac.
《 - Oh mais qu'est-ce que c'est que ça ?! s'épouvanta-t-elle. 》
L'adolescent baissa les yeux, et fixa la grande marque violette qui maculait sa jambe nue. Il lâcha d'une petite voix :
《 - C'est le cheval... 》
Elle soupira en ne sachant que faire, et tenta d'oublier l'hématome qui décorait la jambe de son ami.
《 - Je ne dis rien, je risquerais de m'énerver.
- Vraiment ? sourit le garçon en haussant les sourcils. 》
Elle souffla d'un air faussement agacé, puis lui tendit ses habits, qu'il saisit. Elle était penchée, entre accroupie et debout, un air soucieux sur le visage. Ses doigts, qui restaient toujours froids, frôlèrent délicatement la peau bleutée de sa jambe.
Il frissonna. C'était le vent, uniquement le vent.
Il enfila un nouveau short et un t-shirt sec. Elle en profita de son côté pour se changer rapidement. Une fois prêts, ils grimpèrent à bord du pick up, firent leurs adieux aux dunes et aux vagues, puis disparurent.
***
Au loin, l'horizon se découpait en pics montagneux, et le ciel ondulait au contact des courbes du relief.
La montagne approchait, le centre de la France aussi. Ils roulaient depuis l'après-midi, mais préfèrèrent s'arrêter tôt, et profiter du lieu qui en valait clairement la peine. Alors, il se garèrent entre deux futaies, tout en songeant à ce qu'ils comptaient faire par la suite.Ils montèrent sur le toit du pick up, qui, au vu de sa largeur, leur permettait d'être tous deux assis confortablement. Une boîte de biscuits secs était ouverte devant eux, et parfois l'un ou l'autre se servait dans la petite barquette.
《 - Demain, articula la jeune fille entre deux bouchées, direction Paris ?
- Formidable, sourit le garçon en la regardant, sans vraiment répondre à la question. 》
Elle rit de son expression émerveillée, et ébouriffa les cheveux bouclés de son ami à l'aide de ses mains.
Il s'empressa d'essayer de se recoiffer, en râlant silencieusement, ce qui fit redoubler les rires de la jeune fille.
Rires qui perçaient la nuit noire comme des rayons de lune.Elle sortit de son sac un roman à la couverture bleue foncée et vint doucement déposer sa tête sur l'épaule du garçon. À la lumière d'une petite lampe, elle continua sa lecture, déjà bien entamée au vu de la place du marque-page.
《 - On part en voyage, et toi tu penses utile de te ramener avec un livre, murmura son compagnon sans bouger, de peur de la déranger.
- Exactement, répondit l'intéressée sans cesser de lire. 》
Il leva les yeux au ciel, scruta les étoiles. Un sentiment de bien-être l'envahit.
《 - Ça parle de quoi ? tenta-t-il.
- Tu n'aimeras pas.
- Tu veux bien lire à voix haute, pour voir ? 》
La jeune fille referma son roman en soufflant. Ils se fixèrent mutuellement, et chacun creusait dans les pupilles de l'autre.
《 - J'imagine que oui, soupira-t-elle avec un sourire en coin. 》
Elle se remit à lire, en parlant bas, et ses yeux parcoururent rapidement les lignes.
Le garçon se détendit, et il s'allongea sur le dos, à côté de son amie, qui lisait inlassablement.***
Le lendemain, le jeune homme ne se souvenait pas de s'être endormi, il avait pourtant sombré rapidement. Une fine couverture le couvrait, et il en déduisit que son amie était allée la chercher au cours de la la nuit. Amie qui était descendue du toit pour aller s'asseoir au sol, où elle écrivait dans un petit carnet.
Ses pieds nus profitaient de l'herbe, et sa peau, du soleil levé depuis plusieurs heures déjà. Elle ne dit rien lorsqu'elle le vit debout, mais rangea son carnet dans son sac, et le garçon se promit de lui demander ce que contenait le bloc-notes au contenu visiblement embarrassant.
Il avait du mal à croire à un carnet secret, surtout venant d'elle. Peut-être étaient-ce des écrits, après tout, elle avait toujours été douée en rédaction.《 - Si on part maintenant, on est à Paris vers disons...dix-neuf heures maximum. Ne pas prendre l'autoroute risque de nous faire rouler plus longtemps, mais les péages sont chers.
- Je te suis ! 》
Ils quittèrent ainsi les montagnes du massif central pour se diriger lentement vers la capitale.
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Voyage, voyage
Short StoryDu haut de leurs seize ans, deux adolescents partent seuls sur les routes de France afin de réaliser une promesse. « Dis, quelle est notre destination ? interrogea le jeune homme en faisant glisser ses longs doigts sur le plan. - Nous n'en avons pas...