La proie

La nuit était noire et sombre. Il était autour de minuit ou une heure du matin. C'était une nuit froide, très peu humide. Quelques gouttelettes d'eau tombaient sur mon parebrise et cela devenait un emmerdement. Je quittais une ville pour entrer dans une autre. J'avais passé la fin de semaine chez mes parents, ayant décidé de leur rendre visite. Partie un peu trop tard, j'avais hâte de rentrer chez moi et juste me coucher dans mon lit, dans la chaleur de mes draps et l'affection de mon chien. Je n'étais pas fatiguée malgré l'heure. J'étais juste un peu impatiente, et cela me rendait de très mauvaise humeur. Depuis plusieurs heures que j'avais comme paysage des maisons de campagne éloignées des unes des autres et de petites forêts vertes pathétiquement calmes et ennuyeuses.

J'aperçus du coin de mon œil une figure dans la forêt et faillis foncer dans un arbre. Plusieurs fois je regardai mon rétroviseur pour m'assurer que ce que j'avais vu n'était que moi qui étais fatiguée... J'accélérai pour me sentir mieux, et après une quinzaine de minutes je pus finalement me calmer. Je n'étais pas du type «  superstitieux », mais il y avait des moments dans la vie où mes croyances et ma logique se battaient. Comme en ce moment, où mes nerfs étaient très près d'être à bout. Je pris une grande respiration pour éviter une crise de panique nourrie par la fatigue et me concentrai sur la route une seconde fois. Juste au moment où mon GPS avait repris la parole, me donnant une lueur d'espoir, je sentis une étrange chose passée en dessous de ma voiture comme si j'avais happé un animal, et un de mes pneus eut une crevaison.

— Oh merde... Murmurai-je en m'arrêtant, merde, merde, merde...

Je sortis du confort incomparable de ma voiture et porta une attention particulière à la crevaison. Habituellement, les crevaisons étaient subtiles et banales. Pourtant, celle-là était d'une surprise ; le caoutchouc avait été déchiqueté et des morceaux aléatoires reposaient sur la route asphaltée. Lentement, je m'accroupis pour voir ce qu'il y avait sous la voiture. Malgré la noirceur, je pus voir un animal. Il était large et grand, ce que je trouvais très étrange. Comment une telle bête aurait-elle pu passer inaperçue ? Quelque chose comme ça est très évident et je suis certaine que je l'aurai évitée ! Elle avait des griffes et je me dis que c'était la cause d'une telle crevaison. La pauvre chose avait dû essayer de s'échapper pendant que je roulais toujours et agripper le pneu en espoir que la voiture s'arrête. Je vis du sang et utilisant la lampe de poche de mon téléphone j'inspectai autant que je pus. Je fus prise par surprise. Le sang de la bête sous mon capot était noir et visqueux. Il dégoulinait. Prise de nausée je tournai la tête. C'est à ce moment que je remarquai la position de la chose. Pour un animal, elle reposait étrangement tel un humain. Je roulai des yeux, me chicanant d'une telle question, et me levai. Je composai le numéro d'une dépanneuse, expliqua la situation et attendit une réponse. Elle me choqua.

— Que voulez-vous dire par «  environ une heure » ? Je n'ai pas une heure !

Il me répondit que j'étais tout de même loin et s'excusa. Je raccrochai et pris refuge dans ma voiture. J'attendis. Au bout d'une heure, personne ne vint. Mon téléphone mourut et je dus éteindre le moteur. C'est à ce moment que je remarquai au loin une maison à deux étages. Elle était sur une ferme. Je trouvai intéressant de voir de la lumière au rez-de-chaussée alors qu'il était près de trois heures du matin. Tannée d'entendre la pluie et le vent violent, je sortis et me dirigeai vers celle-ci. J'imagine que sans la pluie et le vent le voyage m'aurait pris quelques minutes. Pourtant, ces éléments combinés rendirent mon voyage long et après une trentaine de minutes je pus enfin arriver sur le porche. Je cognai. La lumière s'éteignit.

— Écoutez, je ne suis pas dangereuse. J'ai juste besoin d'aide. M-Ma voiture a eu un accident et la dépanneuse n'est toujours pas arrivée... J'ai froid, je suis trempée. S'il vous plaît...