Amères retrouvailles

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Je l'ai finalement fait. J'ai fini par suivre Annie après d'innombrables remises en questions sur moi-même.

Je sais très bien que je ne lui arrive pas à la cheville et pourtant, lorsqu'elle a dû quitter notre ville pour intégrer les rangs de l'armée, je n'ai pu m'empêcher de la suivre. Elle n'en a bien évidemment aucune idée.

C'est sous le nom de Ran Riley que je me suis engagée.

Je n'avais aucune envie de poser le moindre problème à Annie, c'est pourquoi, ici, au sein de ces murs, elle sera une parfaite étrangère pour moi. Personne ne saura qu'un lien de sang nous unis toutes les deux. De toute manière, elle et moi sommes très différentes aussi bien physiquement que mentalement. Personne ne peut deviner quel lien nous unis toutes les deux. J'ai toutefois préféré porter un nom de famille qui n'est pas le mien pour n'éveiller aucun soupçon.

Je comprends l'ampleur qu'a la mission qui lui a été confiée et ne m'interposerai pas. Toutefois, je serai présente à ses côtés dès qu'elle aura besoin de moi. Je suis prête à me sacrifier si cela est nécessaire, du moment que sa mission soit menée à bien.

Je n'ai jamais eu de place au sein de ma famille ni même dans ma ville natal. À vrai dire, j'ai grandi dans des conditions particulières et personne ne sait que j'existe. Je peux donc aisément en tirer profit et ne me gênerai pas d'aider ma sœur en douce. Personne ne se doutera de ma présence.

Je continuerai d'être l'ombre d'Annie.

Je souffle bruyamment. Je n'arrive toujours pas à me rendre compte que j'ai pu avoir un tel audace. J'ai fui la maison et parcouru plusieurs dizaines de kilomètres pour pouvoir m'infiltrer au sein de ces murs. Fort heureusement, la chance a été de mon côté ou plutôt le titan colossal et le cuirassé ont appliqué le plan du boss à la lettre. C'est ainsi que j'ai pu me fondre dans la masse de réfugiés fuyant les titans.

Annie n'a jamais remarqué ma présence et notre père n'a jamais essayé de me retrouver.

Je soupire à nouveau puis lève mes bras vers le ciel et tente d'attraper les étoiles. Elles sont si belles mais cela ne les empêchent pas d'être inaccessibles.

- Tu penses vraiment y arriver ?

Je me retourne brusquement et vois un garçon se tenir non loin de mon emplacement. Il a les bras croisés autour de son torse et se retient d'éclater de rire.

- Sincèrement, non, répondis-je. Mais j'aimerai bien en attraper une un jour, continué-je sur le ton de la plaisanterie.
- Tu ferais mieux de te lever et rejoindre les autres si tu ne veux pas qu'on t'attribue le pire groupe de chambre et le lit dont personne ne veut, réplique-t-il avant de s'asseoir à mes côtés.
- Ça m'est égal. Je préfère contempler les étoiles, finis-je par dire en relevant mon visage vers le ciel nocturne.

Ce n'est que très récemment que j'ai eu ce privilège. Étant donné que je n'avais pas le droit de sortir de notre maison, je n'ai jamais connu le plaisir de marcher les pieds nus sur l'herbe ou même la joie de s'émerveiller devant la beauté du ciel étoilé.
Toutes les merveilles du monde, je les ai connu à travers les différents livres et encyclopédies que mon père me laissait. Je passais mes journées à rêvasser, lire et dormir au sous-sol.

- Dans ce cas, ne viens pas te plaindre après.
- Je ne le ferai pas, répliqué-je plus froidement que je ne l'aurai voulu.

Je ne comprends pas pourquoi il reste à mes côtés. Les dortoirs m'ont l'air tellement plus animés et enchanteurs qu'ici. Je ne suis pas une personne sociable et encore moins bavarde ou du moins, je n'ai jamais pu le devenir étant donné que j'ai grandi seule, dans mon coin. Même si j'avais Annie à mes côtés, je ne la voyais que très rarement.

Je ne comprends pas pourquoi il s'est installé à côté de moi mais ne m'attarde pas sur cette réflexion. Je ne veux pas m'encombrer de questions inutiles qui resteront sans réponse.

Nous restons assis sur l'herbe à regarder le ciel étoilé. Aucun de nous deux ne brise le silence qui s'est installé entre nous deux. Mais cela me va. Le silence m'a toujours apaisé. Et puis, sentir le vent frais me fouetter le visage me fait un bien fou. Jamais je n'aurai imaginé aimer autant la fraîcheur du soir.

Au bout d'un certain moment, je vois du coin de l'œil que le garçon à mes côtés est sur le point de se lever. Il a dû comprendre que j'étais la dernière personne avec laquelle il aimerait passer son temps. Bizarrement et pour je ne sais quelle raison, je ressens un petit pincement au cœur. En vérité, j'ai toujours détesté la solitude, elle m'a toujours effrayé et pourtant, seule elle me côtoyait à longueur de journée. Et voilà que je fais fuir le premier individu ayant eu la gentillesse de me parler.
Je souffle à nouveau. Suis-je si désespérante que cela?

Il s'éloigne de plus en plus mais s'arrête à un moment donné.

- Si tu ne viens pas avec moi rejoindre les autres, je peux te dire que cette fois-ci, tu te plaindras d'être tombé malade. Au lieu de rester seule ici, rejoins nous, finit-il par dire avec un ton plutôt amical qui me fait chaud au cœur.

Je tourne ma tête vers lui et constate qu'il reste debout, au beau milieu de la cour et attend.

- Hey !, s'exclame-t-il. Je ne vais pas t'attendre indéfiniment.

Un fin sourire étire mes lèvres et je finis par me lever à mon tour. S'en plus perdre de temps, je m'empresse d'aller le rejoindre tout en gardant un visage neutre. Je ne veux pas qu'il ait l'impression que j'étais désespérément seule et que j'attendais qu'on veuille bien m'accepter.

- Au fait, je m'appelle Eren Jäger, dit-il une fois que je suis arrivée à sa hauteur.
- Ran Riley, dis-je à mon tour.

Et c'est à ses côtés que je rentre pour la première fois dans l'auberge où se trouve les dortoirs de la 104ème Brigade d'entraînement.

- Les gars, s'écrie Eren pour obtenir l'attention de tout le monde. Je l'ai ramené, continue-t-il en enroulant un bras autour de mes épaules. Les festivités peuvent enfin commencer.

Tout le monde lance un cri enthousiaste. Ils sont tous heureux de se retrouver ici, cela se voit sur leur visage. Cependant, je constate un petit groupe de trois personnes qui ne partagent pas cet enthousiasme.

Annie se trouve à quelques mètres de moi, nos regards se croisent un bref instant et la seule chose que je trouve à faire, c'est me diriger dans le sens opposé de son emplacement.

Malgré son visage de marbre, je sais que plusieurs sentiments différents sont en train de s'entrechoquer entre eux. Elle ne doit pas comprendre ce que je fais là ni même comment j'ai réussi à fuir la maison et traverser un chemin autant dangereux pour venir jusqu'ici. Cela m'est égal. Tout ce que je veux, c'est leur montrer que je peux me rendre utile malgré leurs nombreux interdictions. Et puis, au fond de moi, une petite voix me susurre que je peux enfin vivre librement et me battre pour défendre mes propres convictions.

Malgré tout, je sens de légers picotements en mon intérieur. Je ne peux nier le fait que cela me fend le cœur de ne pas la serrer dans mes bras.
Nos retrouvailles n'étaient pas comme je l'imaginais mais je ne peux pas me permettre de la prendre dans mes bras au risque d'éveiller les soupçons de ses amis Reiner et Bertholdt qui d'ailleurs, ne connaissent pas mon existence.

- Ran !, m'interpelle une voix masculine.

Suite à l'entente de mon prénom, je me tourne vers l'emplacement du son et constate qu'Eren se trouve devant moi, celui-ci me fait des signes de mains pour m'inviter à le rejoindre auprès des ses camarades.

Et c'est avec un sourire sincère que je me dirige vers eux, tournant ainsi le dos à ma sœur jumelle.

Shingeki No Kyojin : Ran LeonhardtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant