Elle a seize ans. Elle se blâme d'avoir tant bu et de ne pas avoir utilisée aucun moyen de contraception ...au Canada, en 2016 ! Elle ne verra plus le garçon qui ne sait même pas qu'elle est tombée enceinte. Ses parents ne le savent non plus. Son père, religieux, la reniera.
Elle ne pense pas avec son cœur. Ou à son cœur. Pas dans cette société malade, superficielle au maximum, qui lui a bien lavée la cervelle. Elle pense aux jugements des autres. Les études interrompues. Le linge de mode qui ne lui fera plus. Elle a une décision à prendre. Vite et seule. Elle a un mauvais karma.
Il choisi sa lumière. Pas la jaune, rouge ou orange, ni la brillante.La sienne est bleuâtre et faible, celle de sa mère. Il sait qu'il n'est pas la bienvenu, voulu. C'est parfait pour lui !
Il se souvient de sa vie antérieure. Comment il décidait le sort des gens. Qui mourait et qui souffrait, mais qui vivait. Il se rappelle de chacune de ses victimes. Pour payer sa dette karmique, dans cette vie, il faut qu'il laisse sa vie dans les mains des autres. C'est soit sa mère qui l'avorte, ou quelqu'un d'autre plus tard qui décidera de sa vie. Il a un mauvais karma.
Pas de sélection naturelle. Pas de choix réelle. Jeune femme avec une bonne réputation, argent, image et relations familiales versus ado monoparentale avec responsabilités, jeunesse gâchée et l'avenir mal parti. La fille perdue et honteuse, prend sa décision. La mort. Le choix facile.
Il ressent l'indifférence intérieur de sa porteuse. Tel fils, telle mère?
Elle se rend discrètement à une clinique d'avortement, avec son bébé non-né. Elle se sent soulagée d'avoir finalement dévoilé son secret. Même à un adulte inconnu sans émotions. Le professionnel lui fait prendre de quoi.
Le poison fait son travail. Dans la soirée, la douleur abdominale fait hurler la fille dans son oreiller.
Il combat pour sa vie. Il ne veut pas mourir. Ça fait mal ! Le poison gagne la bataille contre un être minuscule, bien sûr. Le sang coule dans la cuvette.
La fille pleure, mais est soulagée. Pour l'instant. Lui aussi. Dans le fond, sous l'eau froide, une conscience éteinte.
Une dette karmique payée, une autre d'acquise.
