Kuroo riait, lui couvrant l'épaule de baisers. Il lui contait sa journée, ses cours ennuyeux, ou intéressants, s'extasiait devant certains points, s'offusquait devant d'autres. Ils étaient allongés dans son lit, tout les deux nus comme des vers, dans la petite chambre étudiante qu'avait loué l'ancien capitaine de Nekoma, chambre juste en face de sa faculté de droit.
Kenma l'écoutait, silencieusement, ce n'était pas la première fois qu'il venait ici. Il était là lorsque Kuroo avait emménagé, avait rangé ses affaires avec lui, avait mis et sorti du carton. Les cours avaient commencé depuis presque un mois. Kenma allait au club, toujours, maintenant capitaine d'équipe. Les autres l'encourageaient et l'épaulaient du mieux qu'ils pouvaient, il le savait, mais, sans Kuroo, ce n'était plus la même chose. Et il avait toujours eu du mal à s'exprimer en public, alors être à la tête d'un club l'épuisait, bien qu'il adorât le volley-ball.
Il portait maintenant le numéro de maillot qu'avait laissé son meilleur ami en rentrant à la fac. Parfois, être le numéro 1 l'angoissait, parfois, la nuit il songeait à ce qu'il avait dit au club, et aux erreurs qu'il avait fait. Tout cela l'étouffait. Et il n'y avait plus Kuroo.
Kuroo, qu'il pouvait aller voir parfois, en semaine, en prenant le métro, et plus souvent le week-end. Ils se rejoignaient toujours chez le brun, il avait des devoirs, il ne pouvait pas se déplacer, il avait fait la fête la veille, il était fatigué... Kenma ne se plaignait pas. Il était heureux de le voir. Ils faisaient l'amour sans se dire « Je t'aime », ils se le disaient au début, mais c'était passé.
Kuroo avait une petite amie. Une grande rousse, pulpeuse, avec de grands yeux verts pâle, des cils démesurés, des dents blanches éclatantes et un caractère de lion. Partout où elle passait on la remarquait, ses jambes fines, ses hanches pleines, son rire doux et fort, sa voix, son sourire. Elle était belle, très belle. Elle se moquait du monde, formait un très beau couple avec Kuroo, ils étaient parfaitement accordés. Avaient le même regard déterminés, la même fougue et la même rage de vivre. Kenma le savait, Kuroo lui parlait souvent d'elle, le matin, allongé à ses côtés. Il lui parlait de leurs moments de douceurs et leurs colères. Kenma ne lui disait pas qu'il ne voulait rien entendre.
Que ça faisait mal à en crever.
Kuroo lui parlait de sa peau douce, et du grain de beauté qu'elle avait sur l'omoplate, il lui parlait de ses lèvres, et de la manière qu'elle avait de passer ses mains dans ses cheveux. Il lui racontait même comment ils faisaient l'amour. Et il lui avait présenté.
Aria, car c'est comme cela qu'elle s'appelait, avait dit « C'est lui ton meilleur ami ? Qu'il est mignon ! » la première fois qu'elle avait vu Kenma, et il savait très bien qu'il ne faisait pas le poids contre elle. Lui, il n'avait que le temps pour lui, le temps derrière lui, et le temps qui filait. Kenma perdait prise, voilà tout, Kenma aimait Kuroo, et il savait que Kuroo l'aimait, mais pas assez.
Et chaque jour l'abîmait un peu plus. Kuroo s'éloignait. Il le voyait dans son regard, et dans ses gestes. Dans l'attitude qu'il avait lorsqu'il fumait une cigarette à la fenêtre de sa chambre, adossé à la rambarde. Il ne pensait plus à lui, il rêvait d'elle. Kuroo ne se tournait plus vers lui pour lui proposer d'aller chasser les étoiles alors que celles si étaient dans ses yeux, ou de prendre le vélo et de rouler sans frein, avec le vent fouettant leur visage, dans la plus raide descente de la ville, en pleine nuit. A se rompre le cou.
Kenma semblait rétrécir, alors Kenma voulu rétrécir. Il avait peur que si il prenait trop de place, trop d'espace, Kuroo le chasserait. Comme un amant devenu trop envahissant, un amant qui menacerait l'équilibre fragile que Kuroo avait instauré, entre Kenma, lui et Aria. Kuroo ne l'invitait plus à l'aquarium, au parc d'attraction, il l'invitait elle. Ou lorsqu'il invitait Kenma, il n'avait d'yeux que pour elle, et Kenma devait lui prouver qu'il voulait venir pour le lieu, et non pour lui.
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Regarde où nous en sommes
Fanfiction« Une brume grisâtre dansait devant ses yeux jusque dans son ventre. Il savait qu'il avait faim, mais il ne savait plus la dissocier de la douleur. Du manque. Parfois, lorsqu'il se levait, il était obligé de s'asseoir, ne voyant plus rien, plus rien...