Pourquoi respirait-il encore? Levi ne le savait pas. Il n'en avait plus la force, mais il le faisait quand même. Peut-être ce soi-disant instinct de conservation auquel il n'avait jamais cru?
Il était assit sur la barrière glacée d'un pont, habillé de noir. La capuche de son sweat était ramenée sur son visage, ses écouteurs faisaient résonner des morceaux de piano dans ses oreilles. Il avait courbé le dos et fixait, immobile, l'eau qui tourbillonnait bruyamment en dessous de lui. Sa première sortie depuis trois semaines. Hanjie était venue tous les jours sonner à sa porte, et tous les jours il l'avait ignorée, restant allongé sur son canapé, dans le noir. Il n'avalait rien, ne bougeait pas. Les genoux ramenés contre son torse, il ne ressentait rien. C'était incroyable. Tout pouvait changer en quelques secondes dans une vie. Avant ce moment, il passait du bon temps à s'entrainer avec ses seuls amis, les regardait rire avec compassion, et après il ne pensait juste à rien. C'était le vide dans sa tête. Pas ce vide agréable que l'on aimait ressentir pour sa douceur. Ce vide dont il ne comprenait pas l'origine. Il ne savait pas pourquoi il était là, mais il le ressentait clairement. Sa seule pensée était: "Pourquoi? Qu'est-ce-que j'ai fait?". Comment pouvait-on partir aussi facilement? Pourquoi les autres avaient l'air de s'en remettre avec facilité? Comment faisaient-ils pour combler cette douleur? Il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas pourquoi ça avait du se passer comme ça. Pourquoi, pourquoi, pourquoi... Pourquoi il ne pleurait pas, pourquoi il n'en avat ni la force ni le courage? C'était le seul mot qui accompagnait ce vide. Il lui faisait mal, il lui donnait envie de vomir, de se faire souffrir. Parce qu'il ne captait pas sa raison d'être dans son esprit et de résonner en riant de lui, comme un carillon de douleur. Il voudrait crier, il voudrait hurler sa haine au monde, mais s'il le faisait, personne ne l'écouterait. Personne ne savait ce qu'il ressentait, personne ne semblait s'en soucier. Il voudrait saigner, il voudrait expulser sa haine, mais il n'y parvient pas. Parce que son corps ne voulait plus bouger, il ne répondait plus à ses ordres. Pourtant, il y a deux heures, il s'était levé et ses jambes l'avaient porté sur ce pont silencieux, où l'escouade s'était retrouvée avant d'être dissoute par une série de balles. Il se souvenait du bruit que chacune d'entre elles faisait. Des coups, les uns après les autres. Quand ils s'étaient engagés dans l'armée, ils savaient tous qu'ils allaient un jour ou l'autre mourir. Pourtant les années étaient passées, et pas l'un d'entre eux n'était mort. Ils avaient appris à se connaître, à s'apprécier, et tous ces moments passés ensemble avaient été détruits par quelques coups d'arme à feu dérisoires.
Il entendit des pas réguliers à côté de lui, et un jeune homme posa ses avant-bras sur la barrière avant de le regarder en souriant, une cigarette dans la bouche.
-J'aime bien venir ici moi aussi, dit-il.
Levi tourna ses yeux nuageux et vides vers lui et croisa ses irirs émeraudes et turquoises à la fois. Par cette simple phrase, il venait de faire ressurgir des souvenirs en lui. Le jour où l'escouade s'était retrouvée ici, Petra avait prononcé cette phrase en souriant à Levi, exactement comme ce gamin brun venait de le faire. Il fronça les sourcils et reporta son attention sur l'eau qui tourbillonnait bruyamment. La fumée entra dans son champ de vision et se dispersa en serpentant.
-Tu comptes sauter?
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Les ailes de la Liberté prirent ainsi leur envol
FanfictionLevi ne ressentait rien. C'était le vide dans sa tête. Un par un, coup de feu par coup de feu, ils étaient morts. Il balança ses jambes dans le vide et entendit des pas s'approcher. Un gamin aux cheveux brun chocolat le regarda en souriant. -J'aime...