« Le prix de la liberté, c'est la solitude »Hervé Godec
Je, moi, Nicolas, « Nico » pour les intimes (diminutif idiot ou surnom banal), était ce fou isolé, un jeudi matin sans date, au cours du mois d'août 2016.
L'expérience que je vous ai narré ne me résume pas, fort heureusement. Néanmoins je dois bien concéder que quelques traits de caractère s'y sont glissés.
Le fait que je vous confie mon intime avant mon prénom était un de ceux-là. Comme dans un speed-dating où j'aimais bousculer une rencontre, prendre les raccourcis pour mieux revenir sur les codes communs. Piquer la vivacité et le répondant de mon interlocuteur.
Qu'est ce que tu as dans le sac ? Vide toi comme moi, de toute façon on ne se connaît pas !
Apprenons de l'autre, sans vergogne, plongeons au plus profond, montrons nous vrai, tel que nous sommes sans paraître, sans artifice de complaisance. Payons nous une tranche de communication, d'échange, de partage, d'humanité.
Donne moi tes vices avant tes qualités parce que c'est bien de tes vices que je vais devoir m'accommoder mais aussi m'amuser. C'est encore eux qui me permettront de t'identifier entre mille, de me rapprocher de toi.
Donner confidence de ces défauts est le gage d'une intimité vraie et sincère. Confier son talon d'Achille, c'est rendre l'être aimé, unique. Il devient alors le gardien des secrets, le gardien d'une Âme.
Enfin il y a bien que les perversions pour nous divertir complètement, la monotonie est si faucheuse d'envies.
Je ne suis pas quelqu'un d'extravagant mais parfois j'aime briser les convenances. Je ne suis pas un provocateur mais j'ai un penchant pour les tests sociaux grandeur nature. Je vous confierai la recette de quelques-uns plus tard.
Je suis complexe mais je me comprends.
Très tôt, je me suis rendu autonome, je pense avoir gagné durement ma liberté, ma très précieuse liberté.
Avec l'âge, comme tout à chacun, j'ai perdu mon innocence, mon insouciance.
La société, le système, l'administration est venue empiéter sur mon libre arbitre, insidieusement, lentement mais sûrement. Je prenais un certain plaisir et une douce revanche à suivre la direction du troupeau pour éviter mon péril tout en prenant garde d'emprunter, autant que possible, les chemins détournés. Ce stratagème ne prenait pas la forme d'une rébellion, il me servait de protection. Je restais conforme tout en gardant ma réserve vitale de plaisir. « Éviter de subir » était en sorte une devise.
Je suis singulier et apprécie par conséquent mes pairs.
Les« gens » trop lisses, enlisés dans les normes sociétales, aux conversations consensuelles ou vides, ne font pas partis de mon environnement. Ils m'ennuient, pire ils m'inquiètent ! A trop de tenue en société, je reste réservé quant aux potentiels de l'individu. Je deviens méfiant et cherche la déviance, la faille dans la matière de cette surface trop brillante.
Je réside la région parisienne et plus précisément l' Essonne (91). Un de ces départements de la Grande Couronne, où les villes moyennes sont déjà rurales pour le citadin et pourtant trop agitées pour les provinciaux.
Je ne souhaite pas être plus précis sur ma localisation. Cette ville vous le comprendrez peut être par la suite, me laisse un goût amer. Je veux oublier jusqu'à son nom.
Je vis seul. A ma connaissance, je n'ai jamais été père. Les petites têtes blondes m'attendrissaient naturellement, mais je ne me sentais pas de taille pour signer ce chèque en blanc, m'engager dans ce contrat à vie. Je demeurais néanmoins fasciné par leur don inimitable, celui de chiper les sourires à la volée, sans même prendre le soin de faire connaissance. Une magie qui malheureusement disparaîtra avec les années.
Pourquoi avons nous oublié ce don ? J'en était jaloux.
Mes conquêtes féminines étaient éphémères. Le schéma des rencontres se répétaient dans une boucle inlassable. La séduction, le jeu, la passion, les émotions fortes, les tranches de vie puis les contraintes, les objectifs qui divergent.
Déjà trentenaire, les situations matrimoniales de mes rencontres étaient rarement simples.
La rupture annoncée d'avance, ne tardait jamais.
Devant notre incapacité à réunir nos deux sphères de vie, nous nous quittions d'un commun accord. Je gardais le plus souvent de bonnes relations avec mes compagnes. On se quittait, épisodiquement nous nous donnions des nouvelles. Certaines sont devenues mes confidentes.
Ces amours tronqués prenaient fin généralement, lors de la rencontre d'un nouvel amant. Elles prenaient le large dans un nouvel essai, puis revenaient sans pleurs après avoir échoué.
Nos discussions s'accordaient alors sur le fatalisme de la situation. Nous nous retrouvions dans nos échecs comme pour nous persuader que notre relation passée n'était pas moins bonne que les autres.
Mon physique n'était pas exceptionnel mais je n'avais pas à m'en plaindre. J'étais dans la moyenne, ma silhouette était harmonieuse. Je me connaissais tout de même quelques atouts, en premier lieu, mes yeux gris clair.
Ils étaient perçants et soulignés par de longs cils, presque féminins. Je ne baissais jamais les yeux lorsqu'une femme captait mon regard. Je ne le faisais pas par fierté ou par arrogance mais tout simplement par jeu. Les yeux trahissaient souvent la personne. Ils sont source d'indices précieux, comme si la génétique de cet organe n'avait pas été modifié depuis notre ère animal.
Mon second atout était sans doute ma taille, je n'était pas très grand, environ 1 mètre 85 mais l'expérience me faisait dire que cet aspect était loin d'être négligeable pour la gente féminine. Après tout le message de protection commençait avant tout par la stature de l'homme.
Mon dernier atout, je ne le comprenais pas. Je ne l'aurai pas deviné sans les compliments appuyés de mes amies. J'avais de grosses et larges mains. De paroles de femme cela définissaient de 'belles mains'. J'ai toujours regardé mes mains comme une femme regarde ses orteils, sans amour.
Je ne reconnaissais aucune beauté à ces extrémités. Je ne détestais pas les compliments mais qualifier mes pognes de superlatifs me dérangeait. Je n'avais rien d'autre de plus beau à complimenter que la somme de mes phalanges ?
Je n'étais pas une icône de magazine mais mon physique suffisait àme rendre heureux. Il n'était pas un fardeau et ma séduction était satisfaisante, je n'en voulais pas plus...
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Suivez-moi jeune homme
RomanceDéjà trentenaire, Nicolas est un homme solitaire, sans enfant, sans relation stable. Chineur d'un nouveau style, il tient une boutique dans le fabuleux quartier de Montmartre à Paris. Son oeil aiguisé lui permet de développer des traductions très p...