Quelque part dans la Marne, 1er Bataillon 161ème régiment d'infanterie Française, 6 Avril 1918
Le soleil n'était pas encore levé. Dans la tranchées, les hommes dormaient tant qu'ils le pouvaient ; ils ne savaient pas précisément où ils étaient, l'Ailette était à proximité et les allemands y étaient depuis quelques jours. La pluie conjuguée aux trous des obus avaient rendu le terrain difficile. Au milieu de cet enfer, cette nature massacrée, ces arbres morts, l'affluent était là, paisible, immuable et immortel.
Johnson ne dormait pas, pas plus que Quincy, pourtant épuisé par les mouvements depuis Villers-Cotterêts en Novembre de l'année dernière, voyait chaque "temps mort" comme une bénédiction du Seigneur, ou du moins de ce qu'il pouvait rester de sa bonté. C'était l'un de ces moments où l'omniprésence de la mort pouvait rendre nihiliste le plus croyant des croyants. Si Dieu épanchait le monde de sa bonté, et que cette bonté devait toucher tous les hommes, pourquoi tant de haine dans le coeur de ceux-ci ? C'était l'éternelle question pour les soldats du 369ème US incorporés à la 161ème division d'infanterie française.
Les français, quels personnages particuliers se disait "Whitey" Williams, un ancien taulard d'origine irlandaise de Pennsylvanie, qui a préféré s'engager dans un régiment de "Négros" comme il le disait au départ de New-York plutôt que moisir dans une prison. Il ne le faisait pas pour échapper à sa peine, ça non. S'il s'était engagé c'était pour la gloire du soldat, pour les femmes, il mettait de côté son aversion pour les "sauvageons américains" comme il le disait à qui voulait l'entendre. Pourquoi ces diables de Français ne comprenaient pas la "menace noire" ? Chaque sous entendu, chaque remarque, avait le don de provoquer l'ire du Révérend, Jonathan Aldridge de son vrai nom. Pourquoi le révérend ? Parce qu'il était révérend, dans une petite ville près de Beaverton, dans l'Oregon.
Les français, qui à l'inverse de "Whitey" étaient admirés par Jesse Jordan, un professeur dans une école d'enfants noirs en banlieue de New-York. Lui qui avait passait l'essentiel de sa vie à vanter les mérites du peuple français. En dépit du colonialisme, dans cette guerre, les faits lui donnaient raison. Fini le temps des travaux et des opérations de soutien, les "Men of Bronze" comme on les appelait, avaient leur rôle à jouer dans ce conflit.
Chacun d'entre eux le souhaitait, faire de ce conflit contre les allemands un pas vers la liberté, fini de s'asseoir au fond du bus, fini d'être mis à part. Non, ils espéraient rentrer chez eux, et être traités comme les WASP au pays, d'égal à égal, d'homme à homme, comme les français les traitaient.
Tout cet élan de réflexions fut brutalement brisé par le retour à la réalité, le bruit assourdissant de la préparation d'artillerie, mais les coups de canon ne venait pas ce côté de la rive de l'Ailette, mais du camp allemand. Les canons de 100mm annonçaient souvent un assaut d'envergure, peut être que les pontonniers boches avaient établi un pont durant la nuit, pour contourner le corridor défensif que les troupes anglaises avaient établi il y'a 2 ans et que les 3 & 8ème bataillons d'infanterie française du régiment avaient transformé en place forte, redoutant une offensive de diversion.
Ca a duré pendant deux heures, les pertes furent minimes, malgré le pilonnage intensif de l'artillerie ennemie.
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Harlem Hellfighters
AdventureHommes de Bronze, Combattants de l'Enfer de Harlem, ce sont les plus connus des soldats Afro-Américains ayant servi durant la Première Guerre Mondiale. Si l'administration Wilson les considérait comme une menace car à l'époque les Afro-Américains ét...