Il était 21h30, j'étais allongée sur mon lit, enroulée dans ma couverture jaune, la tête et les cheveux posés sur le torse de mon père. Dehors, il n'y avait aucun bruit, mes volets étaient fermés, nous étions en autarcie confinés entre quatre murs. Comme seule lumière, ma veilleuse branchée près de ma table de chevet en bois qui peinait à éclairer le bleu azur de mon papier peint et représentait que peu mon armoire tapissée de chevaux et mes boîtes de jouets empilés sous ma fenêtre. Mon père qui m'étreignait allait commencer son histoire, les battements de son cœur s'accéléraient toujours à ce moment précis. Il me demandait souvent de fermer les yeux pour que la magie opère puis il débutait à la manière d'un conte :
- Il était une fois, il y a de cela bien longtemps, une tribu africaine située dans une forêt au sommet du mont Mabu au nord du Mozambique. Ils se faisaient appeler les Hedarebs, pour leurs courages, leurs persévérances et leurs générosités. A la tête de ce peuple un roi d'une trentaine d'années, grand, fort, serein et intelligent. Il se nommait Agathos, cela signifiait l'Homme Bon. Il était l'époux de la reine Lamia, son nom annonçait sa beauté : ses yeux noirs étaient aussi brillants que la pleine lune un soir d'hiver et son regard plus captivant qu'un coucher de soleil qui descendait lentement embrasser les bras de Morphée. Son teint était toujours frais et radieux. Sa peau si douce était une caresse lorsqu' on la touchait. N'importe quel homme était transpercé par sa beauté naturelle. Gracieuse, élégante, elle était la fierté de son mari mais surtout de son peuple. Un peuple qui n'avait rien à envier aux civilisations modernes, ni à quiconque, ils étaient heureux dans leur forêt verdoyante où les oiseaux chantaient perchés sur leurs géants de bois, car pour eux le vrai bonheur résidait dans les choses simples. Leurs habitations étaient faites de palétuviers pour les murs et de boue séché comme plâtre. Les toits en feuilles de cocotiers étaient préalablement déshydratée au soleil et tressées par les femmes du village. Leurs félicités résidaient dans cela. Ils ne se privaient pas de là célébrer chaque soir autour d'un feu à l'heure du dîner. Pour cela, ils empruntaient des allées sèches, à la poussière marron, aux cailloux sales, au sol dur et à la verdure invisible effacée par le temps. Nous n'étions pas à Rome et pourtant tous les chemins menaient au palais. Palais royal, son nom différait totalement de la réalité, à des meubles et modernités techniques près, elle n'était que la pâle copie qui se donnait de la contenance par son rang des autres maisons du village. La simplicité était la plus grande vertu et le mot d'ordre de ses Majestés.
Mais un soir d'été, la vie du village allait prendre un nouveau tournant. Cela faisait plusieurs mois que la reine était prise de violentes nausées. Le temps était venu d'annoncer la nouvelle officiellement. Le roi fit ordonné à son plus fidèle garde, Ashtun, de rassembler le peuple devant l'estrade royal au coucher du soleil. Le garde s'exécuta, il alla frapper aux dix-huit maisons des villageois prévenant chaque chef de famille, hommes ou femmes que ce soir un grand rassemblement aura lieu.
Cette nuit-là, l'air était doux et le ciel parsemé d'étoiles. Le discours allait bientôt commencer. Lamia monta les deux marches qui la séparaient de l'estrade et qui surplombaient le peuple, vêtue d'une longue robe noire aux contours dorés qui épousait parfaitement ses courbes plus prononcées depuis ses derniers mois. Elle fixa la foule venue l'écouter. Ses mains tremblaient mais elle reprit alors son souffle, jeta un dernier regard en arrière pour s'assurer de nouveau du soutien d'Agathos et commença d'une voix assurée et solennelle son discours :
- Peuple Hedarebs, je vous annonce en cette belle soirée que la lignée royale est assurée. Je vous informe officiellement que je suis enceinte. J'espère que cela fait votre bonheur car en cette nuit, je suis la plus heureuse des femmes.
Jusqu'à mes 12 ans, mon père coupait toujours le récit à ce moment-là, me disant que la suite n'était pas pour les jeunes filles de mon âge et que je devrais encore attendre quelques années pour connaître le reste de l'histoire. Cela me convenait, les petites filles de mon âge aimaient les histoires qui se finissaient bien et où tout le monde vivait heureux jusqu'à la fin des temps. Mais, je grandissais, et je ne me contentais plus de cette fin, j'en voulais davantage. Je voulais tout savoir, tout connaître, j'avais un appétit dévorant pour ce conte qui laissait planer trop de mystères et où toutes les fins étaient envisageables, toute sauf la vraie ...
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Promets-moi
Teen FictionLe destin, ce petit mot qui trace une vie à l'insu du bon vouloir de chacun. "Il était une fois, ..." Tout les contes heureux ou tragiques débutent ainsi même le sien. Extrait : - Tu me promets que tu m'aimes, hein papa ? - Les promesses sont fait...