Le cimetière

473 37 43
                                    

J'entrai dans le cimetière. Le portail grinça, comme s'il voulait me faire fuir. Mais je n'avais pas peur. Je retirai vite ma main qui venait d'ouvrir le portail, car celui-ci était plein de toiles d'araignées.

J'observai rapidement le cimetière. Il était encerclé par une forêt dense, que je n'avais aucune envie de visiter.

Je continuai de marcher. Arrivée à une cinquantaine de pas du grand portail rouillé, j'aperçus des tombes qui, autrefois, devait être en marbre blanc. Aujourd'hui – enfin, cette nuit –, elles étaient toutes sales et abîmées, et semblaient dater d'il y a des siècles. Elles étaient recouvertes de ronces, qui semblaient vouloir me faire un croche-pied.

J'avançais de quelques pas, et mon sang se glaça : un chat noir s'approchait de moi. Il me regardait de ses grands yeux rouges, d'un air hautain. Le chat me contourna tandis que je le regardais s'éloigner. Il semblait suivre quelque chose... Du sang. Des tâches de sang jonchaient le sol et le chat les suivait. Je reculai de quelques pas, essayant de ne pas trébucher à cause des ronces, qui s'accrochaient à mes chevilles.

Le vent soufflait tellement fort que j'avais l'impression de me faire hurler dessus. Mes cheveux se dressèrent sur ma nuque et je continuai mon chemin d'un pas raide.

Je m'aperçus d'un détail qui, je pense, n'avait pas d'importance : les ronces cachaient les noms censés être écrits sur les tombes. Je ne sais pas pourquoi, mais, à cette pensée, mon sang se glaça. Je me repris bien vite, et me dis, tout en me secouant la tête comme pour confirmer mes pensées : « C'est normal, les tombes sont là depuis des lustres... Bien sûr que les ronces cachent les noms... »

Je repensai alors au chat, qui suivait les traces de sang.

Je contourna une petite chapelle, qui se situait en plein milieu du cimetière. Au-dessus, il y avait une cloche immense. La cloche était en or et, contrairement au portail, elle était propre et en état impeccable. La chapelle, elle, était en pierres et était recouverte de poussière, qui s'envolait à cause du vent. Je m'assis juste à côté, et mon regard se posa sur une forme argentée qui semblait voler à quelques centimètres du sol. Je voyais la forêt et le cimetière au travers de la forme, car celle-ci était translucide. La forme s'approcha de moi et je me rendis alors compte qu'il s'agissait... d'un fantôme...

Je mis quelques secondes à me rendre compte de ce qu'il se passait, car mon sang battait à mes tempes et que mon cœur battait la chamade. Je pris – enfin, j'essayai – de prendre mes jambes à mon cou. Je faillis tomber à plusieurs reprises, car mes jambes tremblaient.

Je courus en direction du portail, la respiration haletante, mais les ronces réussirent leur coup, et je tombai par terre, au pied d'une des tombes. Mon cœur sembla s'arrêter quelques secondes : sur la tombe, il était écrit mon nom et mon prénom. Jusque là, ça pouvait aller, ça pouvait être juste une blague stupide, mais je déplaça une ronce, me piquant les doigts. La date de mort était la date d'aujourd'hui...

Je me redressai, non sans trembler, et regardai une autre tombe. La même chose y était gravée.

La cloche dorée qui était en haut de la chapelle sonna un coup, puis, quelques secondes plus tard, un second coup. Les douze coups de minuit allaient sonner.

Ils ne devaient pas sonner.

Mais... Pourquoi... ?

Je marchai vers le portail, posant mes mains sur les tombes, pour éviter de tomber.

Trois coups.

Quatre coups.

J'étais à vingt mètres du portail.

Cinq coups.

Six coups.

Sept coups.

J'avais l'impression d'être de plus en plus lente.

Huit coups.

Le portail est à sept mètres de moi.

Neuf coups.

Les ronces s'agrippaient à mes chevilles.

Dix coups.

Quatre mètres.

Onze coups.

Je tends la main.

Douze coups.

Trop tard...

J'entends un grincement. Je relève la tête. Une forme blanchâtre - un fantôme, je pense - passe à côté de moi, un trousseau de clefs à la main.

Je me rue vers le portail et tente de l'ouvrir, même si je sais que ça ne sert à rien.

Le portail est fermé.

Je tombe sur le sol humide et puis plus rien.

Le cimetièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant