La forêt de mon esprit

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Quel est ce sentiment qui sommeille en moi ? Ce sentiment que j'ai perçu il n'y a pas si longtemps ? Il m'empêche de dormir, il me surpasse, me domine certains soirs où je suis seule, il me ronge petit à petit. C'est un sentiment qui bouge, se mouvoit dans mes pensées, et qui dirige mes actions et mes émotions. Ce sentiment a un nom.
Culpabilité.
Il me renferme sur moi même, me force à me rouler en boule et à me demander qui suis-je réellement, et si la vie vaut la peine d'être vécue, pour un humain comme moi.
Ce que j'ai fait, ce que j'ai vu, ce que j'ai pensé, ou voulu faire, n'est qu'un poid de plus à transporter sur mon dos, m'épuisant, m'exténuant, me rendant faible face aux agressions quotidiennes de mon ego. Ainsi, j'avance, suant, transpirant, dans cette forêt impénétrable et dangereuse qu'est mon esprit.
Je n'en puis plus, à présent. Je marche depuis si longtemps. Je pousse une liane qui me tend un faux espoir, je saute par dessus une flaque remplie de promesses qui m'enfonceraient dans la haine et la douleur. J'évite les moqueries, les pensées empoisonnées et les autres paroles que je n'arrive pas à définir, qui me feraient échouer si jamais je les écoutais.
Je ne sais plus où je vais, ce que je fais ou ce que je suis. J'ai oublié tout cela jadis, au temps où mon insouciance n'était pas écrasée par le poid des remords. Je ne fais que poser un pied après l'autre, et continue cette exploration dérisoire.
Je repense à ce temps où je croyais que tout était beau, rose et heureux, que les humains s'aimaient et que tout n'était que joie et rire. Mais ce cocon si doux, si moelleux dans lequel on m'avait confiné fut cassé, détruit, déchiré, exterminé par la tristesse, la colère et la haine. Je fus aspirée par ce tourbillon si mauvais, noyée dans la confusion.
Je n'arrive plus à respirer. Je suis étouffée, je n'en puis plus. Les lianes se resserrent autour de moi, je trébuche, tombe, face contre terre.

J'ai mal...

J'essaie de me relever, mais la lourde charge que j'ai sur le dos m'en empêche, et je reste au sol.

J'ai tellement mal...

Je piétine la terre de mes pieds, souffle un coup pour me donner du courage. Je me débat. Mais rien de se produit.

Je ne veux plus me battre...

Mes pensées volettent autour de moi. Elles pouffent de mon ridicule, s'exclaffent de ma douleur, rient à gorges déployées de ma médiocrité.

Il ne sert à rien de continuer...

Alors, mes efforts sont vains. Je ne tente plus de me relever. Je ferme les yeux. Les pensées se taisent, les lianes me lâchent, les flaques se résorbent dans la terre, les arbres touffus disparaissent. Tout devient blanc, silencieux.

Tout ira mieux maintenant...

Je n'ai plus à supporter cette charge si lourde, si épuisante. Je peux à présent tout oublier, et sombrer dans un sommeil profond.

La Forêt De Mon EspritOù les histoires vivent. Découvrez maintenant