Je suis un soldat de guerre

Verdun, le 20 Juillet 1916

Ma chère Marie,

J'aimerai te dire oui. Oui. Oui, je serai là. Mais ce serait te mentir.

La guerre ravage tout sur son passage. Elle détruit les êtres aimés et lynche les familles les unes après les autres. La violence fait rage. Les obus nous frôlent à chaque instant de notre existence. Beaucoup meurent. Certains simplement de maladies. D'autres, le corps mutilé et défiguré. Survivre dans cet enfer est devenu impossible. On est partit la fleur au canon en se disant : "A Noël, on sera là. Et tout sera fini." Pourtant, voilà trois ans, que nous luttons sans relâche. Que des milliers d'innocents offrent leurs vies.

J'aimerai te dire : "Je serai là". J'aimerai te dire : "oui, je reviens vivant. Pour nous. Pour toi."

Il n'y a pas un jour sans que je ne pense à toi. Pas un jour où je ne t'imagine pas. Pas un jour où je n'espère pas revoir ton beau sourire.

J'aimerai pouvoir passer le restant de ma vie à tes côtés en t'aimant de tout mon cœur, de toute mon âme. Chaque seconde de mon existence te sont consacrés. J'aimerai pouvoir t'embrasser, te dire un million de fois : "Je t'aime". J'aimerai vieillir et mourir à tes côtés.

Pourtant, je ne pourrais pas. Tout ça, à cause de cette putain de guerre. Elle nous prend tout. Notre innocence, notre jeunesse. Envolés en fumé. Et tout ça pourquoi ? Pour que la mort décime nos amis, nos pères, nos frères, nos maris...

Je t'aime. Plus que tout. Plus que la vie. Surtout ne pleure pas. Je t'en prie. Ne m'en veux pas. Je ne reviendrai pas. L'espoir m'a abandonné. Mais je veillerai toujours sur toi. Tu restera à jamais gravé dans mon cœur.

Profite de la vie comme je n'ai pas su le faire. Et surtout aime. Aime. De toutes tes forces. Tu verra, on se reverra un jour ou l'autre.

Je te quitte mon amour. Adieu. Je t'ai aimé, je t'aime et je continuerai de t'aimer. Même bien après l'au delà.

Paul.