Pas sans toi ( Partie 2)

1

         

               Deux années venaient de s'écouler. Deux années merveilleuses. Kristen avait grandi à une vitesse folle. Elle marchait... Non elle galopait en compagnie de Tyny. Elle avait des cheveux blond qui retombaient en un cascade de boucles sur ses épaules. 

         J'étais toujours associée à tante Lise, notre collaboration fonctionnait à merveille et la clientèle prenait de l'ampleur.

         Mélanie avait reprit son poste au service pédiatrique de l'hôpital, William quant à lui était désormais professeur d'histoire agrégé. Addyson allait bientôt avoir deux ans, elle avait le teint caramel de son père, les yeux bleus de sa mère et des boucles couleur du miel. Elle était devenue une petite fille curieuse et espiègle tout comme sa mère. Le chien ne font pas des chat.

          Laurine était toujours cadre aux urgences, elle avait aménagé chez Ben depuis un an et l'attente avec les enfants était tout simplement génial. Tyler avait tenu sa promesse envers Ben. Quelques semaines après le baptême des filles, il avait passé tous les tests qu'il avait réussi avec brio. Il avait rejoint la brigade de police. Tyler et lui étaient désormais coéquipiers.

          Charly poursuivait ses études de ferronnerie. Il était le premier de sa classe, ce qui n'avait surpris personne. Christie étudiait à cinq cents kilomètres de Beaumont dans une prestigieuse école de stylisme et leur histoire d'amour était fabuleuse.

          Donna était devenue la nourrice exclusive de toute notre tribu. Elle alternait la garde de Kristen, Addyson et de temps en temps Lyra et Kellan. Sa nouvelle vocation professionnelle lui avait rendu une seconde jeunesse.

          Tout était parfait, rien à l'horizon n'avait terni nos vies paisibles. 

          Ce matin là il faisait doux pour un mois d'octobre rien de plus normal au Texas. Je me dirigeais d'un pas léger au restaurant après avoir déposé Kristen chez Donna. Je ne pouvais l'expliquer mais j'étais beaucoup plus sereine de savoir ma fille avec Donna plutôt qu'à la crèche.

           J'arrivais enfin devant les portes du " Lise and Co ". Les lumières étaient encore éteintes, à l'exception de celles des cuisines. Je cherchais les clés dans mon sac à main et glissa la clé dans la serrure. Ma main exerçait machinalement un tour et la était déverrouillée.

            Un silence inexplicable envahissait la salle de restaurant. Comme si personne n'occupait les lieux. Je traversais calmement la pièce avec néanmoins un sentiment étrange.

      - Tante Lise ?!  Tu es là ?!

              Aucune réponse, au moment où j'allais contourner le comptoir afin de déposer mes affaires, ce que je vis me glaça le sang. Une main gisait au sol, je reconnus instantanément le bracelet que j'avais offert à ma marraine pour son anniversaire. Ma poitrine se comprima et la panique m'envahissait comme un poison parcourant mon corps à la vitesse de la lumière.

           Complètement décontenancé je ne savais plus réfléchir normalement. Je retournais mon sac sur le comptoir et chercha maladroitement mon portable. Des perles de sueurs froides se dessinaient sur mon front. Je n'arrivais même pas à composer le numéro des urgences.

            Je pris une grande inspiration et je cherchais le numéro dans mon répertoire, les mains tremblantes. Les bips avant que mon interlocutrice ne prenne mon appel me parurent interminables. Un léger soulagement me parcouru une fois que Laurine décrocha, mais la terreur revint au galop.

     - Allô ?
     - Laurine !!
     - Tout va bien Jen ?
     - Non !!  Lise est entendue au sol !!  Je sais pas quoi faire !!
     - Calmes toi !  Écoutes moi, places ton index et ton majeur sur son cou et dis moi si tu sens son pouls.

         Je me baissa et exécuta ce que Laurine m'avait demandé.

      - Je ne sens rien !!!
      - Ok je fais partir une ambulance, mets ton portable sur haut-parleur et fais ce que je te dis.
       - C'est bon.
       - Tu vas la tenir sous les aisselles et la tirer pour avoir plus de place.
        - Arrrgggg !!!!!  C'est bon !
        - Maintenant vérifie que son col et sa ceinture ne soient pas trop serrés.
        - C'est fait !
        - Bascule sa tête en arrière et regardes qu'elle n'ait rien dans sa bouche.
        - il n'y a rien !
        - Très bien ! Maintenant places tes mains sur sa cage thoracique. Tes auriculaires d'un côté et fais tes pouces se rejoindre. Ensuite à la jonction de tes pouces, places ta main à plat.

           Je réalisais tous les gestes évoqués par Laurine avec maladresse. Je paniquais de plus en plus mais je continuais ma manoeuvre.

      - Je fais quoi maintenant ?!
      - Mets ton autre main par dessus. Tu vas exercer quinze fortes pressions sur sa poitrine. Vas y fort.
      - Quoi ?! Mais elle est folle !!!!
      - Tu peux le faire Jen !!

          Je commençais les mouvements en appuyant fortement. Un... Deux... Trois. Soudain un craquement m'interrompis.

      - Mon dieu  !!!!  Il y a eu un bruit bizarre !!! Un torrent de larmes inondé mes joues.
      - C'est rien tu as certainement cassé ses côtes !!  Mais c'est pas grave !!  Continues !!!!  Arriver à quinze tu vas pincé son nez, ouvrir sa bouche. Tu vas placé ta bouche sur la sienne en enveloppant bien ses lèvres et lui insuffler de l'air. Tu as compris ?
       - Han han, quatorze, quinze...fffffff
       - C'est bien recommences à masser sa poitrine !!!

           Je répétais inlassablement les mêmes gestes, sans voir de résultats positifs. Il me semblait que cela durait depuis des heures quand la porte s'ouvrit dans un fracas. C'était les secours enfin !!!!

      - Pouvez-vous madame !  Depuis combien de temps est-elle inconsciente ?
     - Je ne sais pas.
     - Depuis combien de temps faites-vous le massage ?
     - Je ne sais pas bordel !!
     - C'est pas grave. On intube !  Une ampoule d'adré !
     - Intuber !
     - Super on commence le massage ! Un, deux, trois, quatre, cinq, ballonez !
     - Toujours pas de pouls ! 
     - On recommence !  Un, deux, trois, quatre, cinq, ballonez !
     - Toujours rien !
     - Encore !  Un...

        Les voix des secours se dispersaient autour de moi. La peur laissa la place au néant. J'étais debout au milieu de toute cette agitation et pourtant tout se déroulait au ralenti. Un mot me fit pourtant reprendre mes esprits.

       - J'ai un pouls mais faible !
       - Super !  À trois on la soulève !  Un, deux, trois ! Madame... Madame ?
       - Euhhh oui ?
       - Vous nous accompagnez ?
       - Oui, oui !
       - Vous pouvez être fière de vous !  Vous avez eu les bons gestes !

            Les secours mirent le brancard dans l'ambulance. Nous nous dirigions vers l'hôpital. J'espérais qu'il ne soit pas trop tard et que nous arriverions à temps pour que tante Lise s'en sorte. J'avais encore tellement de choses à lui dire...