L'appel

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Carnet.
8 septembre. -
Quelle journée ! Nous voilà enfin installés. Nous sommes dans les tentes, sous un immense tas de duvets et de couvertures, tellement les nuits sons froides ici, c'est d'ailleurs assez étrange pour un mois de septembre... Nous sommes exténués, et demain, c'est une grosse journée qui nous attend.
Nous nous trouvons en plein milieu de la forêt, à l'endroit même où se trouve d'après des légendes, le rocher dit de la sorcière. C'est un grand rocher immense et glacial, qui aurait servi à l'époque gauloise d'autel à sacrifice humain, au Moyen-âge, les habitants des lieux fuyaient cet endroit qu'on disait maudit.
Malgré le climat froid et l'air hostile, nous n'avons pas peur. Les bruits des petits animaux, le chant des oiseaux, la lumière abondante nous font oublier la légende de la sorcière, certainement inventée pour faire venir les touristes comme nous ! Nous, un petit groupe de 3 personnes envoyées ici par le syndicat d'initiative pour un reportage sur la forêt et son célèbre rocher. Moi, je suis ici pour rédiger les textes, il y a aussi Guy qui s'occupe de la caméra et enfin Mary qui s'occupe du son et de la lumière. Mais à présent, c'est l'heure de dormir...
9 septembre. –
Le réveil était super aujourd'hui... Quand je suis sortie de la tente, Guy m'attendait avec un rat mort soi disant trouvé aux pieds de sa tente, et il courait autour de moi. Quelle frousse de me retrouver nez à nez avec un cadavre de bestiole à 8 heures du matin ! Malgré tout, nous avons bien ri ! Mais fini la rigolade. Nous nous sommes rapidement mis au boulot. Le temps nous a été plutôt favorable et nous avons continué à avancer dans nos recherches sans difficulté. Vers 13 heures, nous avons eu très faim, nous avions décidé de laisser le matériel sur place car nous n'avions vu personne depuis presque deux jours, et d'aller retrouver le campement. Bizarrement, le repas fini, le temps s'est brutalement assombrie et le brouillard est tombé, causant une impression inquiétante, on se serait crû comme enfermés, pourtant nous étions dehors. Malgré cela, nous avons décidé de continuer mais la pluie est vite arrivée, une pluie violente, comme agressive, alors nous avons vite couru pour protéger notre matériel laissé en plan dans la clairière. Mas là, Guy et Mary se sont disputés, la caméra était restée allumée et une batterie s'est vidée inutilement. Guy assura Mary qu'il était certain d'avoir vérifié que le matériel était bien éteint mais Mary ne voulut rien entendre, elle commença à l'insulter. Bonjour l'ambiance... Rentrés au camp trempés, nous enlevâmes nos habits et nous passâmes le reste de la journée à nous raconter des « histoires qui font peur ». Mary qui ne voulait rien entendre, s'est mis un oreiller sur la tête toute la soirée ! L'un des deux s'est amusé à secouer la tente en plein milieu de la nuit, je me suis réveillée en sursaut, mon cœur battait la chamade : bien entendu le lendemain, tous les deux juraient qu'ils étaient parfaitement innocents. Mary a dû se venger de toutes ces horreurs racontées !
10 septembre. -
Journée insupportable : une migraine épouvantable m'a clouée au lit. Je n'avais jamais eu aussi mal. En plus, un corbeau a passé la matinée à croasser au dessus de ma tente, on aurait dit un ricanement, je lui aurais bien clouée le bec à cet abruti... J'ai dormi en faisant d'affreux cauchemars, la fièvre sans doute. Le temps est de plus en plus exécrable, les oiseaux sont partis, morbide ce silence. J'espère que cela ira mieux demain. Mary et Guy ont continué à se chamailler.
11 septembre. –
Il faut que je raconte, vous devez savoir. Malgré l'épouvante qui m'épuise, j'écris. Voici ce qui s'est passé
Ce matin, j'ai été réveillée par ce satané corbeau, ses cris me glaçaient le sang. Je réveillai Guy en l'appelant à travers la tente, puis je me leva pour réveiller Mary. Sa tente était vide, le lit froid, j'ai souri, pensant qu'elle avait dormi avec Guy...
Soudain Guy sortit de la tente, je lui demanda de réveiller Mary. Il s'en alla vers la tente de celle ci. Je crus qu'il se moquait de moi et je ris. Je lui raconta ma découverte mais Guy devint blême : on comprit que Mary avait disparu. Encore en pyjama, nous courûmes autour du camp, en l'appelant. A bout de souffle, je revins vers ma tante et je vis que les caméras et tout le reste du matériel que nous avions déposé là, j'en étais certaine, hier soir, s'était volatilisé. Nous étions glacés, la brume se faisait de plus en plus épaisse, le soleil avait complètement disparu. Angoissée, je me mis à la recherche de mon I-Phone. J'étais sure de l'avoir laissé sous mon oreiller : il avait disparu lui aussi... j'ai retourné la tente, mais rien.
Guy est revenu, les yeux rouges, fatigués, je n'ai pas eu le temps de le mettre au courant de la disparition de notre matériel que l'on a entendu un hurlement venant de loin, un cri glacial qui ressemblait étrangement à celui de Mary. Nous étions pétrifiés, figés par la peur, on entendait un hurlement de peur mélangé à la souffrance. La sueur me coulait le long du dos et pourtant je n'ai jamais eu aussi froid de toute ma vie. Les secondes qui suivirent nous parurent longues, très longues... Nous partîmes vers la direction du cri : le rocher. Guy était devenu complètement fou, il criait, vociférait des paroles en latin auxquelles je ne comprenais rien, il m'attrapa, me cogna contre le rocher, une douleur immense me pénétra : ma cheville doit être fracturée... La brume s'abattit sur nous. Guy disparut, je ne l'ai plus revu.
Il fait nuit, je peux à peine bouger, je suis tétanisée par le froid et la peur. Je suis seule, horriblement seule. Si je veux survivre je dois tenter de me réchauffer, et c'est pourquoi je suis à nouveau dans la tente. C'est le néant, je n'entends rien, je ne vois rien, à part mon corps qui tremble, j'ai l'impression d'être morte... Pour me tenir en vie, pour dominer la panique qui m'étreint, j'écris.
Oh ! Un bruit ! Des pas, j'entends des pas. Les branches au sol craquent, j'entends quelque chose marcher, quelque chose ou quelqu'un... Le bruit s'approche, il entoure la tente et je sens même son souffle horrible, glaciale qui traverse la toile. Je n'entends plus rien. Rien. Si, là, un léger grincement, un bruit de... le bruit de la fermeture de la tente ! La peur m'étouffe, mon cœur bat à tout rompre, je vois la fermeture s'ouvrir, s'ouvrir, s'ouv...

Ce carnet a était retrouvé par les gendarmes le 13 septembre. Jusqu'à ce jour, l'enquête n'a rien donné.

L'appelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant