Chapitre 1 Le Chevalier Robin

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L'air était doux, à peine trop chaud et une légère brise soulevait ses cheveux noirs et faisait tourner les pages de son livre.

Un peu plus loin, il entendait les rires de son jeune frère et de ses parents et les aboiements de leur chien. Manifestement une bataille d'eau venait d'éclater au bord de la rivière. Il sourit à son tour et leva enfin le nez de son bouquin.

Plongé dans ces histoires fantastiques, il avait parfois tendance à oublier tout ce qui se passait autour de lui, à occulter la vie alentour.

La forêt était calme comme si elle était en veille. Même les oiseaux semblaient avoir mis une sourdine.

Les rayons du soleil filtraient au travers de l'épais feuillage de printemps et l'atmosphère était emplie d'odeurs fraîches et veloutées.

Il se décida à les rejoindre. Il se leva donc nonchalamment, dépliant ses longues jambes. Il posa son livre, à l'envers, pour ne pas perdre sa page. Il avança en direction des éclats de voix et des bruits d'eau.

C'était vraiment une magnifique journée, pleine de douceur et de simplicité. Il était heureux.

Il continua à marcher dans la forêt vers la rivière. Il ne pensait pas qu'elle était si loin. Il entendait distinctement sa mère pousser de petits cris aigus entrecoupés de rires et les « A l'attaque ! » de son père hilare.

Il pressa le pas car la forêt s'assombrit soudain. Il leva les yeux vers le ciel. De sombres nuages semblaient grossir très rapidement. Un orage allait sûrement éclater d'ici peu. Il les appela.

Personne ne répondit.

Il appela encore.

Rien.

Plus un bruit.

Il siffla le chien.

Rien.

Juste le vent qui se levait et faisait crisser les feuilles et grincer les branches.

Il appela de nouveau, et guetta une réponse.

Devant le silence inquiétant, il se mit à courir.

La tempête se levait et des gouttes commençaient à toucher le sol autour de lui.

Les racines des arbres lui rendaient la tâche ardue et plusieurs fois il failli tomber. Ses vêtements se prenaient dans les arbustes et les buissons et leurs épines lui griffaient les bras et le visage. Il arriva enfin à la rivière. Il descendit le talus pour se tenir au bord de l'eau. Il vit à ses pieds le chapeau de sa mère : une capeline entourée d'un foulard de soie violine.

Il l'appela. Puis son père et son frère. Il n'entendait que les hurlements du vent.

Il fronça les sourcils, son inquiétude grandissait. Il essaya de se calmer pour mieux réfléchir. La pluie drue tombait maintenant sans relâche formant à la surface de l'eau une multitude de petits cercles. « Ils avaient du s'abriter, voilà, c'est sûrement ça », pensa-t-il, « ils se sont abrités pour se protéger de la pluie et avec ce vent, ils ne m'entendent pas ! »

A demi rassuré seulement, il scruta l'autre rive et n'y voyant rien, il décida de remonter un peu la rivière pour avoir un meilleur point de vue.

L'averse redoubla d'intensité et la visibilité était de plus en plus limitée. Mais ce qu'il vit dans la rivière à cet instant ne nécessitait pas une bonne vue. L'eau d'ordinaire si pure et si cristalline était maintenant teintée de rouge sang. Son cœur se serra et il sentit un frisson le parcourir. Il les appela de nouveau mais son cri fût couvert par un coup de tonnerre qui le fit sursauter. Il était trempé jusqu'à l'os. Et il grelottait, de froid et de peur.

Sulfur Filii tome 1 Les enfants perdusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant