Chapitre un

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Ma dix-neuvième bougie vient d'être soufflée, et pour la énième fois, celle-ci se trouvait sur un cupcake qui, avec le temps, était de plus en plus ridicule. Je crois que j'aurais préféré vivre ce jour comme si il n'était qu'un parmi tant d'autres, c'est-à-dire comme ma mère et mon beau-père l'ont vécu.

Rien de différent. Trois années se sont écoulées depuis le jour où tout a changé, et il faut dire que ma relation avec ma mère ne s'est nullement améliorée. Après un tel secret, c'est fort difficile de pardonner, elle qui prône la vérité.

Mais soit, rien à changer. J'ai gagné quelques centimètres, peut-être cinq. Je me suis amincie, et j'en remercie la danse, même si j'ai gardé certaines formes féminines.  Disons qu'il y en a là où il le faut. Mes cheveux sont toujours bruns, je ne les ai pas touchés, simplement quelque peu coupés, je ne voudrais pas m'en servir comme écharpe tout de même. Il y a une chose de différent, néanmoins : Gaby. Son cancer est passé de sage, disons, à féroce, tenace, au point que ses cheveux roux sont devenus inexistants, tout comme son sourire, sa force. Si il y a bien une chose qui existe encore, ce sont ses os, et je peux le confirmer étant donné qu'ils sont parfaitement visibles, finement recouverts d'une couche de peau. J'avais mal au coeur en la voyant ainsi, se dégrader petit à petit, et c'était seulement maintenant que son père et notre mère se souciaient d'elle, comme si ils n'avaient jamais cru à ce cancer, comme si ils leur fallait des preuves. Ou, peut-être avaient-ils été peinés par cette nouvelle au point de se forcer à ne pas voir la vérité en face, au point de se forcer à se mettre dans le crâne que c'était faux, que les diagnostics étaient erronés ou appartenaient à une autre patiente. Mais je ne voulais pas avoir cette idée en tête, je ne voulais pas leur trouver d'excuses, pas après tant d'années de silence.


Nous étions le soir, dans les environs de vingt-et-une heure. Le repas avait été vite englouti pour ma part, et c'était après avoir attrapé une petite bouteille d'eau du frigo que je filais dans ma chambre, troquant mes vêtements d'intérieur contre un pyjama cocooning afin de me poser sur le matelas moelleux de mon lit, mes jambes recroquevillées et mon ordinateur portable installé sur mes cuisses. Je m'étais fait un petit plaisir en me procurant cet appareil qui me permettait d'avoir une certaine intimité, puisque de nombreuses fonctions étaient présentes : un traitement de texte pour écrire mes pensées, un bloc-note pour divers liens Internet, des idées, des choses à faire, un logiciel pour des montages photos, un outils pour bouquiner des magazines, et un tas d'autres choses, utiles ou non, entièrement à ma possession et cachées grâce à un mot de passe demandé une fois l'appareil allumé. Je m'étais aussi acheté l'un des derniers smartphones, avec une caméra de haute qualité, une bonne mémoire pour me divertir sur de nombreux jeux durant le trajet entre la maison et l'université dans laquelle j'étudiais la littérature, ou même une application pour dévorer des livres avant de finir dans les bras de Morphée, le soir. 

Cela faisait exactement trois jours que j'avais ces deux appareils que j'avais réussi à me payer grâce au salaire d'étudiant du Subway dans lequel je travaillais après les cours, le plus possible, pour éviter un maximum cet endroit appelé "maison". Et puis, étant donné la grosse dissertation que je devais rendre dans deux jours, cet ordinateur tombé à pic ! Après quelques minutes et un travail acharné depuis la procuration de l'appareil, ma dissertation était enfin bouclée, datée, soulignée, prête à être imprimée dès le lendemain pour être rendu le Jour J. J'allais enfin pouvoir utiliser cet appareil pour faire des recherches plus approfondies sur mon père biologique. Jusque là, me servir de l'ordinateur familial était impossible car l'historique était, je ne sais comment, bloqué, et donc impossible à supprimer. Probablement Bill qui s'était amusé à régler ça pour espionner ma mère. Et trop de pages Internet étaient bloquées aux ordinateurs de l'université, apparemment certains encadrés de publicités étaient un peu trop osés.

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⏰ Last updated: Feb 20, 2017 ⏰

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