quand l'humeur se met à écrire

.

elle regarde passer les trains depuis déjà deux heures. elle regarde ces gens pleurer des séparations ou sourire des retrouvailles. elle n'attend rien, ni personne, si ce n'est autre que la mort. non, elle ne veut pas sauter sous une locomotive passante, elle veut juste voir de belles choses comme de mauvaises, pour tenter de ressentir quelque chose.

ses joues sont un peu creuses bien que loin d'être maigres, ses cheveux noirs sont un souvenir lointain d'une coupe courte, son maquillage bien trop sombre fait ressortir ses cernes et sa veste tombe sur une épaule. elle n'a pas froid, ni peur. elle a déjà fumé bien un paquet et n'a pas sourit une seule fois.

- Liz ?

elle ne se retourne pas, ferme juste les yeux pour apprécier cette main se posant sur son épaule, ce contact doux mais inquiet. elle inspire profondément en se penchant en avant pour ramasser son sac à dos échoué à ses pieds.

- tu es encore ici depuis plus de deux heures, je m'inquiétais.
- tout va bien, nous pouvons rentrer.

elle sourit et ça ne sonne pas faux, pourtant le garçon sait qu'il y a ce quelque chose qu'il ne comprend pas. il ne peut rien y faire car elle ne s'explique pas, il sait juste qu'il doit la laisser tranquille quand elle vient sur ce quai.

il ouvre la portière côté passager en regardant la jeune fille se laisser tomber sur le siège comme si supporter son poids était une épreuve bien trop grande. sans plus attendre une bloque une autre cigarette entre ses lèvres pour l'allumer alors qu'il fait le tour pour rejoindre le volant.

- à quoi penses-tu ? essaye-t-il sans grande conviction.
- tu m'aimes vraiment ?

il est surpris mais se reprend vite en tournant à l'intersection. elle lui pose bien trop souvent cette question et il trouve ça angoissant mais il sait qu'elle doute de tout, tout le temps. il n'a pas d'autres choix que de la rassurer et il prédit sans mal la suite de la conversation.

- bien sûr.
- pourquoi ?

jamais il ne sait quoi répondre, tout simplement car ça lui est tombé dessus sans prévenir. parce que cette fille n'était pas comme les autres. parce qu'elle est mystérieuse. parce qu'il n'y a pas plus beau cadeau que son sourire. parce qu'il en est véritablement dingue.

alors il se contente de ne pas répondre car finalement elle hausse les épaules : elle se moque éperdument de la réponse, tout ce qu'elle veut c'est mourir.