Eva regardait le ciel noir limpide d'un œil morne. Elle aurait voulu en voir plus. Elle aurait voulu voir les bleus de l'aube et les orangés du crépuscule.Mais elle les avait ratés.
Comme tous les jours.
Alors, elle se contentait de la nuit.
Car c'était tout ce qu'on lui avait donné. Tout ce qu'on avait bien voulu lui laisser.
Pourtant, elle voulait voir, elle voulait voir le monde et toutes ses couleurs. Elle voulait regarder le soleil en face. Elle voulait juste emplir ses yeux vides d'un peu de lumière.
Mais si, elle n'avait ne serait-ce, que formulé ce souhait, la lune se serait moquée d'elle.
Alors, passant ses pieds par la fenêtre, elle prit appui sur son rebord et sauta dans l'herbe fraîche.
Elle ferma les yeux, profitant des sensations que lui procurait la nature : le vent soufflant dans ses cheveux, le froid contre sa peau, les caresses de la rosée sur ses pieds nus.
Puis, elle les rouvrit, survola d'un pas léger le sol gelé et atterrit gracieusement sur le paillasson de la porte d'entrée où se trouvaient ses chaussures.
Elle enfila prestement ses chaussettes et ses chaussures, traversa l'allée puis tourna à l'angle de la rue.
Ce n'était pas la première fois que la jeune fille faisait cela. En vérité, elle commençait à en avoir l'habitude. Elle vivait la nuit et dormait le jour ; et cela lui allait très bien.
Autant profiter des jours qu'il lui restait à vivre, car, elle était vieille, elle le savait.
Elle savait qu'elle était bien trop vieille pour pouvoir vivre encore. C'est pour cette raison qu'elle profitait, qu'elle vivait chaque nuit comme si c'était la dernière. Elle se disait que c'était juste une aventure et que ça ne durerait pas.
Quand on sait qu'on va bientôt partir, on n'attend pas le dernier moment pour commencer à vivre.
Eva arriva ensuite sous le lampadaire, son lampadaire. Elle s'arrêta, jeta un coup d'œil vers le ciel brumeux, soupira et commença à attendre.
Il arrivait toujours en retard, remarqua-t-elle, en s'adossent contre le poteau. Il n'était jamais arrivé à l'heure, et pourtant au lieu de l'agacer, elle aimait cela. Elle aimait ce moment d'attente fébrile, où l'impatience et l'excitation de le voir se réveillaient en elle. Elle aimait le guetter dans la pénombre, elle aimait voir sa silhouette se dessiner sous la lumière des lampadaires et attendre qu'il soit assez près pour pouvoir l'enlacer.
Mais, cela, elle ne lui dirait jamais. Elle ferait toujours semblant de s'énerver en lui donnant un petit coup de poing dans la poitrine.
Puis, il lui adresserait son sourire ravageur, qui pulvériserait son pauvre cœur dès elle le verrait. Il lui enlèverait enfin la moue boudeuse de ses lèvres par un baiser et il l'emmènerait.
Cela se passait toujours ainsi.
Le même scénario se déroula sous ses yeux, sa poitrine se compressa une fois encore devant les yeux du jeune homme et ses pensées les plus sombres s'envolèrent. Ne restait plus qu'eux, seuls, libres.
Hélios entremêla ses doigts dans les siens, son pouce caressant doucement la paume de sa main.
Il lui fit quitter la lumière rassurante du lampadaire pour s'engouffrer dans une petite rue, pourtant, elle n'avait pas peur. En fait elle n'avait jamais eu peur avec lui ; il était son ange, son protecteur, il ne pourrait jamais lui faire de mal, elle le savait et elle en était tellement sûre...
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Nouvelles
Short StoryVoyagez, rêvez, imaginez au travers de petites nouvelles. Une rencontre inattendue et bouleversante... Une petite fille en quête de soi... Une maladie incurable... Retrouvez leurs aventures dans ce recueil au titre original de "Nouvelles"! ***...