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Sunggyu se pose sur le lit de la chambre du premier étage, sa chambre, celle dans laquelle il a passé plusieurs étés il y a des années. Quelques mois seulement dans ce chalet avaient suffit pour qu'à présent, habitué à chaque recoins, chaque particularité de terrain, chaque degrés de luminosité et de couleur, son corps se souvienne dans les moindres détails des gestes qu'il avait pu faire et de la manière qu'il a eu de se mouvoir, toujours la même mais auparavant plus discrète, invisible à la conscience endormie du quotidien, maintenant inattendue et surprenante. C'est comme si le temps lui-même ne peut désormais plus altérer la puissance de la répétition et le garçon s'étonne de toute cette familiarité, de tout ce savoir qui n'est plus uniquement conservé dans sa mémoire mais qui se loge intacte dans toutes les parties de son être et qu'il prend tant de plaisir à voir jaillir sans s'y attendre, plaisir commun de la reconnaissance imprévue, inimaginée, réjouissante. Il s'installe en appui sur son coude gauche, le corps tourné vers la fenêtre de la pièce, elle-même donnant sur une suite gonflée de champs se superposant les uns aux autres. Il soupire. Le garçon aperçu à l'instant n'est pas juste un voisin de vacances, il a aussi été son camarade de jeu ainsi que son premier amour. Mais les deux ont perdu contact pendant longtemps car la famille de Sunggyu n'avait plus l'argent ni l'envie d'organiser des vacances aussi loin de la ville et quand, au lycée, il a revu Woohyun si charismatique, si fière, si loin de tout et de tous, il en a été intimidé et a préféré ne pas le déranger. C'est resté un amour secret et des sentiments enterrés et Sunggyu a alors pris la résolution de s'intéresser à quelqu'un de son niveau, quelqu'un de moyen, comme lui. Seulement, quand il a aimé de nouveau, ça a encore été sans oser s'approcher et ceux qui se déclarèrent à lui ne l'intéressèrent guère. Mais, aujourd'hui, pour les vacances, Woohyun est là. Et s'il impressionne toujours autant Sunggyu peut-être le contexte lui permettra d'aller faire ce qu'il accuse avoir été abandonné par tous: apprendre à se connaitre.


Woohyun n'a pas bougé de son paradis vert et bleu. Un seul élément est venu perturbé le décor. Une couleur étrangère. De l'orange. Et avec elle tout un monde de vérités sur lui: des souvenirs de son enfance. Des souvenirs heureux. Il ne faut pas y penser; Woohyun a abandonné. Il ne veut plus rien faire, il n'a envie de rien. Il restera là, fera le stric minimum. Il sera seul. Il ferme les yeux pour apprécier les rayons sur ses paupières clauses. Des images de son rêve lui reviennent. Il les rouvre. Ça recommence. Il va encore devoir subir ça. Il va encore vouloir des choses et devoir penser à elles sans qu'elles ne se réalisent concrètement dans le monde. Il va encore désirer parler, écouter parler, passer du temps avec quelqu'un, des gens qui l'aimeront et qu'il aimera aussi mais sans jamais réussir à réaliser la moindre de ses résolutions. Il s'assoit en tailleur, l'air irrité. Il veut être seul, tranquille, en paix avec le doux flot de la nature. S'il n'y a personne il sera en paix. Mais la voie douce lui revient en tête. Le garçon à qui elle appartient est très doux, et gentil, il s'en souvient. Il se lève agacé. Il n'aura qu'à l'éviter si jamais il le croise.


Mais, malgré les tentatives pour se calmer, Woohyun ne put rester sans bouger et il dut se promener tout l'après midi dans les bois derrière la colline pour essayer de ne pas penser à des choses vaines.



Du bleu et vertOù les histoires vivent. Découvrez maintenant