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Apparemment, il y a un tas de nouvel arrivant chaque jour. Mais mon jour est le plus calme. Nous ne sommes que trois à être emmenés dans notre nouvelle maison. Nous avons eu le temps de discuter quelque-peu, en toute discrétion. L'homme à côté de moi, comme je l'avais prédit bine musclé et aux airs méchant, s'appelle Regis. Enfermé pour agression d'un représentant de l'ordre. 

L'autre était typiquement le gros dur. Il était chauve avec un bouc brun, musclé et grand, mais pourtant ses yeux inspiraient presque la confiance. Une sorte de gros ours qui ont des airs de tueurs mais qui en fait sont très gentils. Condamné pour viol.

Je m'en veux pour lui : vous savez ce qu'on dit, ceux qui touchent aux enfants subissent bien pire. En soit, je devrais aussi m'inquiéter : j'ai tué ma sœur de 13 ans. Mais ça, ça ne sera pas précisé aux autres prisonniers, donc je n'aurai aucun problème, si il n'y a pas de fuites sur ce sujet. 

Les violeurs, tout le monde sait quand ils arrivent. Et souvent, de ce qu'on m'a dit, dès le troisième jours ils partent aux urgences, car leur anus c'est fait défoncer par une vingtaine d'autres hommes sous les douches. Le coup du savon. Typique.

Après ces quelques sueurs froides, nous arrivons enfin. L'ambiance est bruyante, mais pas trop. L'air est lourd, le soleil tape. On dirait le cliché des prisons du far-west. Un policiers nous emmène, nous sommes bien encadrés, comme si on était des bêtes enragées, alors que nous sommes plutôt calme. Je n'arrive pas à dire si j'ai le délit le plus grave entre nous trois. Agressions multiples, viol. Je pense, pour me rassurer sûrement, que le viol doit être pire que le meurtre.
Au moins ma sœur n'a pas souffert, la victime de cet homme sera marquée à vie.

- "Les nouveaux arrivants. Quoi que l'on dise, la prison n'est pas mieux que vos anciennes maisons toutes pourries. Ici, vous serez nourri et logés, certes. Mais sachez que nous ne cautionnons ni les viols, ni les combats entre prisonniers. Si vous voulez être des sauvages, vous serez enfermés avec des sauvages. A vous de survivre dans votre propre zoo."

Eh bien, le patron, visiblement, ne rigole pas. Il en impose avec sa voix forte et ses grands airs, mais il ne doit pas être bien plus musclé que moi. Ses seuls arguments sont son taseur et son flingue. Le reste ne vole pas bien haut. 

Petite visite rapide et improvisée, la prison est vachement grande. On passe en revue les choses classiques, personne ne se promène dans les couloirs sauf les gardes : c'est le moment de la sieste, je suppose. 

Les horaires sont très strictes ici, 7h réveil, 8h repas, 9h douches, 10-12h visites, 13h repas, 14-16h après-midi libre/dans les cellules. Le reste, c'est libre, certaines personnes ont des mini-métiers ici, comme ceux qui lavent les uniformes, ceux qui nettoient les toilettes, ceux qui font la nourriture, etc. 

Même si je dois y rester 20 ans, je pense pouvoir m'habituer. Ma plus grande peur actuellement est l'ennui. Si dès le premier jour je m'ennuie, au bout de 10 ans je serai sûrement mort, pendu à une douche. Je chasse cette idée de mes pensées puis continue la visite. On nous montre la cantine, les douches, les cours extérieurs, puis on nous amène à nos cellules. Il y a encore pleins de choses à voir, mais il se fait tard. Je suis le dernier à entrer dans ma cellule, grande avec deux lits, toilettes derrière un mur, et franchement, c'est plutôt cozy. Il y a une table, une affiche d'un groupe de rock, et les murs ne sont pas gris-sales comme je pouvais le penser. C'est même plus propre que chez moi. 

La porte se ferme, on me laisse seul, avec mon uniforme. Je me change en vitesse.

- "Ton uniforme est trop grand, tu va souffrir, mon gars."

Je n'avais pas vu mon partenaire de cellule. Un gars semblable à moi, bien qu'il ait un air décalé. Ses cheveux sont blonds courts, ébouriffés vers le haut. Il est plus grand que moi, certes. Mais pas musclé, du moins pas beaucoup.

- "Comment ça, j'vais souffrir... ? Et j'peux savoir qui t'es ?"

- "Ouhla, ça va pas le faire. Déjà, on se calme. Si on est fait pour habiter ensemble des années, mieux vaut s'entendre. Je suis Matthew. Mais j'préfère Matt."

- "Alex. Appelle-moi Alex. Et donc, pourquoi je vais souffrir ?"

- "Non seulement t'es un nouveau, mais en plus le bas de ton uniforme est si grand qu'il te descend en bas des fesse. Ici, c'est très clair, ça veut dire que tu est d'accord de te faire pilonner par n'importe quel prisonnier."

Ah, merci beaucoup, alors. Je pensais bien que les nouveaux étaient souvent les premières cibles, mais cette histoire d'uniforme en bas des fesses ne me rassure pas. Disons que je n'ai pas envie de me faire prendre par un homme, je suis plus du genre attiré par les femmes, ce genre de blondasses a gros seins. 

- "Je ne peux rien y faire... Enfin, j'vais faire un nœud, ça ira. Ça fait combien de temps que t'es ici ?"

- "2 ans. Encore 18 années à faire et j'me casse. Par contre, malheureusement pour toi, ça fait aussi 2 ans que j'ai pas baisé. Et ici, très honnêtement, c'est baiser ou être baisé. Donc fais gaffe à ton cul. Ce que je touche m'appartient."

Le timing devait être calculé, mais les portes s'ouvrirent, pour le repas du soir. Il passe devant moi et sans retenue me claque les fesses. Il en profite, l'enfoiré. Il est plus grand que moi. Je ferme les yeux et respire un instant : calme-toi, calme-toi. Tu va le remettre à sa place et tout ira bien. 
Je rouvre les yeux, fait le nœud dont j'avais parlé, le résultat est assez acceptable. Puis je sors de la cellule. Si avant c'était calme, maintenant c'est bondé. Et tout le monde parle, certains rient, d'autres s'énervent. On se croirait à une soirée où tout le monde est bourré.

Bienvenue en prison, je suppose.

Jailed.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant