Chapitre 1

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Dysill s'approcha de manière insidieuse vers le sac déposé là quelques instants plus tôt. Elle glissa sa main fine dans l'ouverture, s'empara du portefeuille en cuir rempli, et s'enfuit en courant.

Le vol, bien qu'il la rebutait, était une nécessité pour elle. Depuis ses sept ans, Dysill devait vivre seule, mais surtout savoir se débrouiller seule. Vivre à la rue, ne pas savoir de quoi demain serait fait était son quotidien depuis maintenant onze ans. Elle vivait de manière bohémienne. Et ce train de vie, bien que dur à assimiler, lui plaisait désormais. La vie, qui ne lui avait pas fait de cadeau, lui avait forgé un caractère de combattante, et elle connaissait la valeur des choses, la valeur de la vie. Elle appréciait les petits bonheurs, manger sur un banc devant le coucher de soleil, pouvoir dormir dans un lit lorsqu'elle pouvait se le permettre, être au chaud durant les longues nuits d'hiver, et ce,encore une fois, lorsqu'elle pouvait se le permettre.

Elle arrêta enfin de courir pour contempler son trésor. Le butin qu'elle avait dérobé subtilement était pas négligeable : une certaine somme dormait paisiblement au fond de la pochette. Avant, cette pratique lui causait de violent remords. Aujourd'hui, la faim la déculpabilisait totalement. Et les conditions de vie s'était terriblement dégradé,au point que désormais, très peu de personne pouvait avoir autant d'argent que se que contenait le trésor, et le nombre de personne qui pouvait se permettre d'avoir un porte-monnaie en cuir se comptait sur les doigts de la main...

Dysill leva la tête.L'endroit qui l'entourait n'était pas non plus d'un grand luxe, et en vérité, c'est dans cet état que se trouvait la plus grande partie de la Nouvelle-Paris.

Il s'agissait en réalité d'un endroit bien lugubre, humide. C'était comme si toute émotion, tout amour avait été banni à jamais de ces lieux. Tout était insalubre, malfamé, détruit, délavé,inquiétant, tout comme le silence, omniprésent, faisant ressentir une sorte de pression, pesante. Des rongeurs inquiétants, des voix chuchotantes et le bruit des gouttes tombant sur les maisons abandonnées ou occupées par des gens peu fréquentables étaient les seuls sons qu'elle entendait dans les environs. Le square, où tant d'amis avaient marché, ri et pleuré, où tant de couples avaient du se rencontrer et se disputer, se réconcilier ou se séparer... Le square, où des enfants s'amusaient dans le sable sous le regard bienveillant de leurs aînés... Le square était un endroit où la joie comme la tristesse, la jeunesse comme la vieillesse avait été présente. C'était un endroit où le temps et la vie elles-mêmes s'étaient écoulées, et il semblait désormais figé dans le temps, vestige d'une époque lointaine, d'un passé effacé... La place, entre quatre murs, semblait être une prison, vaste, mais tellement vide que l'on avait l'impression de tomber dans un gouffre sans fond d'où l'on ne ressortirait jamais.Les ruelles, elles, étaient étroites et encore plus effrayantes.Par leur aspect inquiétant, mystérieux et son air coupe-gorge, elle n'avait pas besoin d'être médium pour devinait que de nombreux comptes avaient dû être réglés dans ces endroits. Aujourd'hui,personne, ni même les ombres, n'osait s'aventurer.

Quant aux habitations, elles semblaient être empilées et serrées les unes contre les autres, du moins si l'on pouvait vraiment les qualifier d'habitations. Les passages allaient dans tous les sens,semblables à ceux d'une gigantesque termitière géante, offrant très peu de confort. Ces « maisons » étaient d'ailleurs habitées peu longtemps, étant donné que les locataires ne restaient que très peu de temps, ou squattaient temporairement des vieux abris faute de moyens nécessaire. De temps à autre, elle entendait une sirène de police, donnant une illusion de justice dans ce chaos misérable.


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