Pour mon premier jour de travail, j'étais en train de visiter les lieux à l'aube. Je n'avais pas l'habitude d'être éveillée à une telle heure, mais je me sentais prête à bien des choses pour garder mon nouvel emploi.Andréa, vingt ans, cesse de se plaindre et prend enfin sa vie en main. Si ma mère avait été là pour le voir...
Ana était déjà sur place quand je franchis le seuil de l'établissement. Elle semblait m'attendre depuis un moment, même si j'étais arrivée avec quinze minutes d'avance.
Elle n'était pas seule, toutefois. En train de passer le balais, un homme assez massif aux cheveux grisonnants cessa de se concentrer sur le sol pour me jeter un bref coup d'œil avant de s'en remettre à sa tâche. Je remarquai que son bras droit était amputé au niveau du coude.
-Andréa.
Ana s'approcha de moi, un air indéchiffrable sur le visage.
-Laisse-moi te présenter Nicolae. C'est mon frère. Il est cuisinier.
Alors qu'il s'avançait, je lui fis un sourire aimable en lui tendant la main.
-Enchantée.
Nicolae ne la serra pas. Je crus d'abord que c'était par impolitesse ou bien pour m'irriter, mais je réalisai bien vite que c'était simplement parce qu'il n'y avait pas de main à serrer. Je sentis le sang me monter aux joues.
Nicolae me dévisagea d'un air agacé, mais me grommela tout de même un « bonjour » avec un fort accent que je ne reconnu pas. De nouveau, il se concentra sur la poussière au sol. Je marmonnai un faible « pardon » et m'éloignai en direction de ma patronne, qui me faisait signe de la suivre dans la salle des employés.
-Tu pourras déposer tes effets personnels ici, fit-elle en me désignant un casier sur ma droite.
Avec toute la nonchalance du monde, elle en arracha ensuite un autocollant sur lequel j'eus le temps de lire « Carmen ». Je déposai mon manteau dans le compartiment métallique sans passer de commentaire.
-Alex s'occupera de ta formation. Il ne devrait pas tarder à arriver.
Au même moment, une voix retentit derrière nous.
-C'est qui, elle?
Je me retounai pour voir une fille sur le pas de la porte. Ses longs cheveux bruns encadraient parfaitement son visage rouge de colère.
-Roza, voici Andréa, notre nouvelle serveuse.
Ana avait dit cela avec un maintien sans égal, en dévisageant la nouvelle venue d'un regard insistant. « Tu te calmes, et tout de suite, » disaient ses yeux.
Roza ne sembla pas du tout concernée par le sous-entendu de ma patronne.
-Tu te fiches de moi, là? On perd Carmen et Sara, et quarante-huit heures plus tard, tu embauches une nouvelle?
Un silence froid s'installa, mon regard passa de Roza à Ana, cherchant sans résultat une logique à ce mélodrame.
-Bonjour mes amours!
Un garçon entra, tout sourire, puis s'interrompit en voyant la scène.
-... Je suppose que Roza est au courant?
-Tu savais qu'on les remplaçait aujourd'hui? s'emporta la concernée.
Le rouquin leva les mains en signe d'innocence:
-Hé, il nous faut des serveuses, et les jumelles ne sont pas près de revenir. Désolé Rosie.
La tension était palpable, même si Roza était la seule à être en colère. Elle avait beau mesurer un tête de moins que moi (et je n'étais moi-même pas très grande), elle semblait prête à défigurer tout le monde, et je devais avouer qu'elle me faisait un peu peur.
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Les Chasseurs
FantasyJe ne croyais pas en leur existence. Ils n'étaient pour moi qu'un mythe. La malchance a voulu que je découvre la vérité par hasard, en me situant au mauvais endroit au mauvais moment. Je n'avais pas l'intention de les combattre, mais je n'ai plus le...