</PARTIE_UNIQUE.>

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"-Barre toi!
-Taehyung...
Casse toi, je t'ai dit, qu'est-ce qu'il te faut de plus?! T'en as pas vu assez ?! Et arrête de me regarder comme ça !
-Tae, je te comprends moi... Je sais que tu peux changer, devenir meilleur...
-Non ! T'as rien compris !
Comment je dois te le dire pour que ça imprime ?!"

Ça devait faire un bon quart d'heure que je marchais. Ou devrais-je dire 'fuyais'.
Je fuyais mon ombre, je me fuyais moi.
Je ne suis pas quelqu'un de bien. Je ne suis pas une belle personne.
Et ce pauvre con, qui se croit mon ami, continue à vouloir m'aider après ce que je lui ai fait.

"-Mais tu sais pas de quoi tu parles ! J'ai essayé, ça ne sert à rien, on ne change pas, on change jamais !
Et quand bien même de toute façon, ici y'a pas de deuxième chance, on efface pas les ardoises..."

Après cette réplique, Jin s'était arrêté. Tant mieux. J'ai une réputation à tenir, et personne ne le verra pleurer. Alors je continuais ma route afin d'arriver chez moi avant mes premiers sanglots, quand soudain, il reprit :

"Et Jungkook ?
-Quoi ?
-Ne me dis pas que t'es pas au courant, t'as pas vu ?"

Face à mon manque de réaction et à mon sourcil haussé, il souffla et partit en me lançant un "T'es tellement égoïste que t'as pas remarqué, évidemment..." à peine audible.

Ouais, je sais. Je suis égoïste, minable, laid et même pas aimable. Un connard. Tu nais comme ça, tu vis comme ça, tu cannes comme ça.
Seul à poil face à ton reflet avec ton dégoût de toi-même, ta culpabilité et ton désespoir comme seul témoin.

Je me décidais alors à envoyer un message à Jungkook.

↪ Tu me connais, j'ai pas tout mon temps. Alors qu'est ce que Jin voulait que je remarque à ton sujet ?

Euuh, je peux savoir comment↩ Jin en est arrivé à ce sujet ?

J'explique tout depuis le début ou...? Non, non, pas la peine.

On s'est engeulés et j'ai émis l'hypothèse de sortir de vos vies à jamais pour ne pas vous détruire, Jin, toi et les quatre autres.

Bon, OK... Tu peux↩ développer ?

Non, crois moi, tu veux vraiment pas que j'aille plus loin, parce qu'au mieux ça t'empêchera de dormir, et au pire, ça te donnera envie d'me cracher à la gueule.

Tu vas te transformer en↩
bête féroce, je devrais partir en courant, te fuir comme le choléra ? Non, je pense pas. T'as rien fait d'horrible, rien d'assez horrible pour que je te laisse partir.

Non j'ai braqué personne, planté personne, buté personne, mais j'suis un voyou, c'est comme ça qu'on dit, tout simplement.
J'ai fait des choses que je regrette suffisamment pour y penser tout le temps.
Je pourrais te donner un million de bonnes raisons pour qu'on m'attrape, qu'on me casse les genoux, et qu'on me cloue au pilori.
Et si un jour, on vient me chercher, je résisterai pas, j'sortirai les mains sur la tête, sans faire d'ennuis.
Mais avant que ça arrive... Non, laisse tomber...

Après avoir envoyés ces messages sans trop réfléchir ni les relire pour y trouver un quelconque sens, je partis m'asseoir sur un siège du balcon de mon appartement. L'air frais de la nuit avait calmé un minimum ma colère mais mes sanglots et mes regrets étaient toujours présents. Jungkook m'avait appelé, et pour une fois, j'en avais strictement rien à foutre qu'il m'entende pleurer. J'avais besoin de réconfort, j'avais besoin de lui. Alors j'ai commencé à lui raconter tout, tout depuis le début, jusqu'à ce que mon connard de voisin vienne m'interrompre.

"- Pardon ? Que j'parle un peu moins fort?
Ah, on vous dérange, en fait, merde !
Et bah si on t'dérange, tu te casses, ou sinon, tu fermes ta gueule, tu regardes ton assiette et tu nous fous la paix 5 minutes, le temps que j'termine, tu peux faire ça ?!
Qu'est ce qu'y a ?! Ça te gêne qu'on t'coince comme ça, devant tout l'monde ?!
Ah ouais, c'est chiant, j'comprends mon gars !
Mais dis toi que t'as d'la chance, toi: toi t'es né bien comme il faut, t'es solide, t'es cohérent, tu mets personne mal à l'aise dans les restaurants, tu dors bien sur tes deux oreilles.
T'es un bon p'tit français, t'es beau, t'es bien, comme un magasine de déco, comme une maison témoin !
Ça t'arrive pas ces choses là, hein ?! Tu vois absolument pas d'quoi j'parle ?!
Et bah ouvre pas trop la porte de ton placard, alors ! Tu pourrais être surpris et ça va t'faire tout drôle, le soir, où les choses que tu pensais avoir enfouies te font savoir, qu'en fait, elles étaient là, juste là, planquées sous l'tapis ! Elles sortent une main, puis te plantent une seringue dans le pied, avant de disparaître !
Alors là, ça t'prend à la gorge, comme des odeurs d'ammoniac, ça t'colle des sueurs froides, t'as les dents qui claquent..."

C'en était trop, j'en pouvais plus et il fallait que j'éxteriorise. J'entendais Jungkook me dire de me calmer, il essayait de me rassurer de je ne sais quoi et me prévenait que j'allais m'attirer les foudres de tous les vieux du quartier, mais..

"Non j'me calme pas, j'me calme pas!
Il sait pas c'que c'est lui !
Il sait pas c'que c'est que d'être un crevard, d'être mal foutu, d'être une crasse, un pantin, d'être le terrain où l'bien et l'mal s'affrontent
Il sait pas c'que c'est !"

J'ai balancé mon téléphone avec rage en bas de mon immeuble avant de descendre au bar le plus proche de chez moi, à une dizaine de minutes de chez moi.
En arrivant là bas, j'ai eu la surprise d'y trouver Jungkook, qui a l'air décidé à écouter la fin de mon histoire.

"- Pars pas, disparaîs pas. Je t'aime.
- J-je... Vodka s'il vous plaît..."

Il m'a laissé boire, un peu, beaucoup, trop.
Alors dans un manque de sobriété total, je lui ai raconté la fin de mon histoire avant de lui lancer :

"- Comment est-ce que tu peux penser qu'tu tiens à moi, si moi même j'y tiens pas?
Pourquoi tu dis qu'tu m'aimes alors que moi-même j'me déteste?
Pourquoi t'es là, pourquoi tu restes?"

Ce que je peux être con. S'il reste c'est qu'il a pitié.
Ah, ce gosse, il a vraiment un grand cœur pour être capable d'avoir pitié de la plus grosse enflure sur Terre.
Et apparemment c'est pire quand il a bu, puisqu'il s'est mis en tête de m'embrasser.
Il a essayé plusieurs fois mais je l'ai repoussé. À bout de force, j'ai fini par le laisser faire.
Mais une sensation étrange s'empara de moi, une sensation que je n'avais pas ressenti depuis longtemps.
La sensation d'aimer, d'être aimé.

"- Allez, retourne chez toi...
- Non, pas ce soir, laisse moi s'il te plaît. Non, j'veux pas y aller, j'veux pas rentrer, j'veux pas dormir et surtout, non, j'veux pas parler.
Ce soir, j'veux juste hurler.
J'ai besoin d'ouvrir les vannes, tu comprends, de tout lâcher, comme un puceau qui ment de hurler mes mots pesants, de hurler ma peur de l'abandon, ma recherche phonétique d'attention, mon besoin de reconnaissance en permanence, comme un chien, des caresses, mes tentatives désespérées d'me faire passer pour un mec que j'suis pas et que j'serai probablement jamais...
De hurler mon absence de courage, ma cruauté, ma politesse maladive, mon optimisme débile, mon zèle dangereux, mes réflexes à la con, mes excès de colère, ma culpabilité bidon, ma sexualité en vrac et mes fantasmes tordus...
De hurler ma peur panique des autres, ma mesquinerie sournoise, mes regrets, mes erreurs, mes névroses, mes obsessions, mes méta-obsessions, ma phobie d'la douleur, de la perte, du suicide, de la dépression..."

Sans m'en rendre compte, j'avais augmenté le volume de mes paroles en les sortant de mon esprit et j'avais éclaté en sanglots. Dire tout ça a voix haute me l'avais confirmé, j'étais vraiment misérable.
Alors Jungkook m'a encore dit qu'il m'aimait, qu'il n'en avait rien à branler de tout ce que je venais de dire parce qu'ils ne me trouvait que des qualités.
Et moi comme un lâche je l'ai abandonné.
Et moi comme un lâche, j'ai sauté.

voyou ; taeggukOù les histoires vivent. Découvrez maintenant