ZERO - 004

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62 s'était séparée de 13 et 21, qui étaient partie dans la direction opposée après avoir quitté la maison. Elles s'étaient donné rendez-vous au Saturne, vers midi, pour rassembler ce qu'elles avaient pu observer.

Quelques minutes à peine plus tard, alors que 62 s'enfonçait dans les allées, les odeurs nauséabondes persistaient, seulement, la raison de leur présence était plus répugnante encore. Tous entassés ça et là, on aurait dit que ceux qui n'avaient pas passé la nuit étaient tombés du ciel, à la manière des feuilles quittant les arbres lorsque l'automne vient. 62 se crispait un peu plus à chaque pas, le dégoût était tout ce qu'elle ressentait, avec un peu de tristesse, aussi. Les visages à peine reconnaissables des brûlés lui donnaient mal au cœur et à la tête, et sa nuit blanche n'aidait vraiment pas. Avançant dans l'allée qui semblait interminable, 62 s'était arrêtée plusieurs fois, les odeurs lui montaient peu à peu au cerveau et elle était prise de vertiges.

Environ 5 minutes après, l'air semblait être de nouveau pur -et, surtout, respirable- car elle était finalement parvenue au bout de cette si longue avenue. Elle espérait du plus profond de son être de ne plus jamais avoir à croiser le chemin des cadavres qui jonchaient tristement le sol des rues. Tout en reprenant ses esprits, elle prit une grande respiration : l'air était frais, le parfum de la Faucheuse était loin. 62 se mis en route et, d'un pas plus ou moins assuré, se dirigea vers son point de départ.

Son école.

La fille escalada le grillage de la cour, encore une fois, mais cette fois-ci, c'était pour y entrer. Une petite tâche de sang -presque noir, étant donné qu'il avait séché- persistait là où 41 et 22 étaient, quelques heures plus tôt. Néanmoins, elle n'avait pas l'air diluée. Les jeunes défuntes avaient donc subi la pluie avant de disparaître.

Poussant les portes principales de l'établissement, elle s'engouffra dans l'air glacial. Il avait toujours fait très froid dans le hall principal, il était si grand et si peu meublé, mais là, c'était différent. 62 quitta la pièce (qui, par ailleurs, semblait figée dans le temps : ils avaient du partir précipitamment) et monta rapidement les escaliers de la sortie A (plus communément appelée l'entrée principale). Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle cherchait, ni même si elle cherchait quelque chose, mais elle savait que si elle trouvait, elle saurait.

La luminosité était très faible à l'étage, et les interrupteurs semblaient avoir démissionné. C'est pour cela que, dès que 62 avait repéré une classe entrouverte dont l'abondante lumière s'échappait, elle s'y rua. Elle referma doucement la porte derrière elle.

"Aidez-moi !"

La voix avait fait sursauter l'intruse. Elle se retourna en un clin d'œil et se retrouva face à un professeur (en tout cas, il en avait l'air) désemparé, allongé au sol. L'homme avait l'air amaigri et faible, sa chemise blanche était sale. Il était sûrement là depuis un bout de temps.

Lorsqu'il se leva, un bruit de choc métallique paralysa la fille plus qu'elle ne l'était déjà.

Il était armé.

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