Le prix du billet pour le Pays des Merveilles...

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        Alice, assise auprès de sa sœur sur le gazon, commençait à s'ennuyer de rester là à ne rien faire. La petite, lassée, décide d'aller courir après les lapins. C'est ce qu'elle fît durant toute son adolescence. Les douceurs qu'ils donnaient lui permettait de continuer à les voir. Quand elle s'arrêtait, c'est comme si elle tombait dans un trou sans fond, la privant toujours plus d'oxygène à chaque seconde. Le monde était si beau grâce à leurs friandises, elle se mit peu à peu à s'exprimer comme eux, n'arrivant presque plus à parler comme ses semblables. Mais, quelque chose clochait. Après toutes ces années, le papillon n'était toujours pas sorti de son cocon, il n'était encore qu'une chenille frêle et fragile. Son corps n'avait pas bien évolué et la jeune femme semblait avoir de la peine à se déplacer.

       C'est auprès d'un homme toujours courtois, bien qu'étrange, qu'elle avait fait sa vie. À l'inverse de la demoiselle, il était souriant et toujours joyeux, il égayait tout ceux qu'il fréquentait mais ne parvenait qu'à faire esquisser un léger sourire à sa bien aimée. Le pauvre monsieur s'enfonça lentement dans le folie à mesure qu'il voyait sa bien aimée pleurer et se noyer dans sa tristesse.  La peau d'Alice était blanche, pas le genre de blanc qui orne les ailes des anges, plutôt celui des statues de marbre brisées qui ornent les collections d'art. Ses yeux verts abritaient à la fois la beauté des jeunes années et la peur de l'avenir, ils ne lui servaient plus vraiment à voir, juste à discerner ce qu'elle avalait, n'ayant plus vraiment de goût. Ses cheveux d'or était la clef de sa survie, personne ne pouvait lui refuser quoi que ce soit, sa tignasse légèrement abîmée hypnotisait toujours les traînards des ruelles malfamées. Incapable de se repérer, elle suivait dès qu'elle le pouvait la direction des chats de gouttières qui ne faisaient que la perdre dans les dédales pavées où on voyait les fleurs fanées. Comme Alice, ces roses n'étaient ni resplendissantes ni bavardes, elles mourraient lentement dans une agonie silencieuse. 

         Adulte et veuve, Alice vivait de vol et de mendicité, d'alcool et d'opium. Elle aurait aimé être aussi une traînée de vapeur, un je ne sais quoi d'enivrant pour les gens qu'elle croisait. Elle aurait voulu qu'ils soient tous addict de sa présence, de parcourir leurs âmes pour s'y abriter. Mais, si elle ne le pouvait guère, alors personne ne le pourrait. Fatiguée de peiner à survivre, elle prît les choses en main. Tout devenait plus chère et sa jeunesse avait fui son corps, plus rien ne lui permettrait de s'en sortir. Elle se disait que le monde lui en voulait, ce monde qui devenait toujours plus violent au fil des années. De par delà la Manche, on tranchait la tête à qui ne se pliait pas aux règles des fous. Il fallait que les autres ressentent sa détresse, sa douleur, sa peine. Honte aux hommes qui la regardaient de haut, ils ne méritaient pas de vivre de toutes façons. Puis, les femmes qui ne cherchaient qu'à plaire, obéissantes et futiles, elles ne savaient pas ce que c'était l'amour, le vrai, celui qui vous ronge les entrailles. Elle n'était pas sûr que c'était l'amour qui en était la cause, peut être était ce le manque qui la guidait mais ce dont elle était sûre, c'est que ça venait de ses tripes, il fallait que les autres femmes le sache, qu'elles ne souffrent plus.

       C'est une main sur l'épaule d'Alice qui la réveilla de son long et profond sommeil, sa grande sœur lui souriait tendrement quand elle ouvrit les yeux. Derrière la grille attendait un garde, la sentence était tombée la veille. Elle garda en mémoire cet instant en fermant les yeux lentement, emmenée par ses geôliers. Ce fût les dernières forces qu'il lui restait mais, au moins, elle mourrait heureuse.  


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