Un soir de mars ou un soir d'août. Une après midi d'avril ou une matinée de novembre. Peu importe. On y fait les mêmes choses. On y vit les mêmes instants. De froid, de chaud, de peur ou de réconfort. De solitude, d'ennui, d'amusement ou de tristesse. Tous ces moments forts sont la clé de notre destin. Celui pour lequel nous sommes ici ou là-bas.
Moi, je n'y suis pas. Je ne m'y reconnais pas ou peut-être plus. Je suis le fléau d'un futur sans avenir, d'un avenir sans fin. Je suis dans un train qui roule à l'arrêt, désorienté par une boussole qui ne tient plus la route.
J'attends chaque instant avec impatience. Chacun de ces instants pour lesquels je ne contrôle rien. Je suis la route, je cours vers le troupeau. Des fois je m'arrête pour réfléchir mais je ne tiens pas l'ombre d'une minute. Alors je demande mon chemin. Je demande.... Toujours. Un jour, une personne m'a dit que je demandais trop. Quand j'ai demandé pourquoi, elle m'a répondu : "Encore une question de trop. Choisis, décide et ne te préoccupe pas des autres. Coupe par la forêt." Alors, c'est ce que je me suis risqué à faire. Mais la forêt était dense, la nuit était noire et les étoiles ne se montraient pas. J'ai alors regagné la route, j'ai suivi le marquage blanc, j'ai attendu les saisons et je me suis accroché à quelques rêves perdus.
À force de marcher, j'ai recroisé cette personne. Elle courait dans les champs. Elle s'est arrêtée, l'air déçue. Puis s'est enfoncée dans les bois. Ce jour-là, j'ai compris que je ne pouvais plus marcher la tête basse, le regard fixé sur le marquage blanc d'une route sans fin avec le seul rebondissement d'un virage ou d'un trait qui s'efface. Mais je ne pouvais pas non plus marcher la tête haute.
Alors je me suis arrêté. Je me suis assis, puis allongé. J'ai écouté, puis regardé une dernière fois les étoiles scintillant dans le ciel noir.
J'ai fermé les yeux.