Dans deux minutes, je quitterai ce monde à tout jamais.
Je marche sur le trottoir, le soleil dans mon dos. Mon ombre déborde sur la route. J'ai une gros cul, c'est comme ça. Ce n'est pas une calamité. J'aime bien mes rondeurs. Elles me donnent un côté... sexy ; on a envie de me croquer. Je me reconnais dans ces tableaux de la Renaissance. J'aurais été une vraie bombe à cette époque.
Des gouttes de sueurs coulent sur mon visage, glissent le long de mon cou et se logent dans mes clavicules. Soixante-seize kilos à transporter, ce n'est pas rien. Encore deux-cents mètres et je suis chez moi.
Le feu du carrefour vient de tourner au vert ; d'habitude il faut poireauter un quart d'heure avant qu'il ne daigne s'allumer. Je m'élance en direction du passage piétons. Tant pis pour toute la graisse de mon cul qui se trémousse au rythme de mes foulées, tant pis pour le tissu de ma robe qui s'envole chaque fois un peu plus haut, tant pis pour mes boucles blondes qui s'emmêlent. Je veux rentrer chez moi.
Dix.
Encore quelques mètres et j'atteins ces lignes blanches.
Neuf.
Le bonhomme vert clignote. Encore un petit effort.
Huit.
Ça y est, j'y suis. Je les traverse et je suis chez moi.
Sept.
Un klaxon.
Six.
Une camionnette.
Cinq.
Des cris, des gens qui m'appellent pour que je réagisse.
Quatre.
Un cri. Mon cri. Qui sort de ma poitrine, qui me perce les tympans.
Trois.
Je suis figée, mes membres ne m'obéissent plus. J'ai arrêté de respirer.
Deux.
Elle se rapproche ; elle me percute. La douleur dans mon bras est fulgurante.
Un.
Le temps s'arrête. Les cris se taisent. Le vent cesse de souffler.
Zéro.
C'est maintenant. Adieu, monde terrestre.
Bonjour, nouvelle vie.
VOUS LISEZ
La tour
ParanormalUne tour plus haute que les nuages. Des gardiens mi-hommes mi-corbeaux. Pas de porte, pas de fenêtres, juste cette petite lucarne aux barreaux de fer. Cet ivrogne à la peau pustuleuse et ce garçon qui apparaît peu à peu. Il n'y a pas d'issue. Imposs...